Que donne l'analyse de la peinture d'enfants par rapport à ces critères ? Sans oublier que l'enfant s'il est artiste, n'est pas un artiste car son oeuvre ne porte en elle aucune responsabilité, on constate, non sans un certain étonnement que cet art de l'enfance relève lui aussi exactement des mêmes impératifs, à cette différence près que l'âme individuelle de la peinture d'adulte est remplacée par l'âme collective de l'enfance. Cette constatation ne manquera pas de chagriner ceux qui ne voient encore dans cet art qu'un exercice et un divertissement gratuits. L'enfant, dépositaire du patrimoine mystique, poétique et émotionnel de sa race « anime une fraction du tout » dans la moindre de ses créations, qu'elles soient picturales ou poétiques et ce n'est pas là le moindre miracle de l'art. C'est là sans doute, que réside le vrai mystère cher à Drouant. Cet état de grâce qu'ignore et doit ignorer l'enfant, ne dépasse en général pas 10 ou 12 ans, avant d'être enfoui dans le « conventionnel ». Il est bien vrai cependant qu'une certaine forme d'éducation, puis de culture pourrait le prolonger, et qui sait, peut-être, le sauver. Les efforts de l'Ecole Moderne n'ont pas d'autre but. Dans un chapitre qui n'est pas écrit sans un très grand courage étant donné sa position personnelle, l'auteur s'élève avec véhémence contre l'excessive commercialisation de l'oeuvre d'art, et son annexion à des fins purement spéculatives. En attendant, écrit-il, c'est la confusion, la folie collective, la duperie - à tous les échelons il faut flatter le goût du client (je dirai le mauvais goût) ses manies, ou disparaître. |
|
L'exposition d'un peintre de talent sera passée sous silence (cela ferait bailler les lecteurs des critiques d'ennui).
Le marchand devant l'ostracisme qui frappe la peinture d'honnête talent se verra dans l'obligation de ne présenter que des génies factices, ou faire faillite.
Dans cette aventure, disait Vlaminck, les amateurs y entrent comme dupes et restent comme complices.
S'il faut conclure, le livre de A. Drouant est plein de qualités novatrices, car il pose des questions pertinentes dans un domaine où l'on a fait beaucoup plus de mauvaise littérature que d'analyse objective. Et il répond d'une façon pertinente dans un style agréable et personnel - jamais fastidieux - à ces questions les plus diverses.
A ce titre, il peut initier beaucoup d'éducateurs curieux de s'instruire de la réalité de l'art vivant, et dans un domaine où il n'existe pratiquement pas de documentation valable.
C. Chaveau