EN PARTANT DES ALUS Chantal , 13 ans bientôt, entre cette année en 6ème de transition. Petite rapatriée d’Algérie, elle a un gros retard scolaire (niveau C.E.2) et beaucoup de difficultés pour parler. Au départ, comme tous mes nouveaux, elle ne sait pas « dessiner », c’est à dire, pour elle, « copier un livre ». Elle ne se risque pas vers la table de peinture. Pas pour elle, ça ! Puis j’apporte les feuilles d’aluminium, en coupe de petits morceaux et explique comment l’on pourra faire des cartes de nouvel an. Elle « veut bien essayer », sans plus ; ce n’est pas le coup de foudre. C’est alors que naissent ces petits bonshommes bien braves, dans le vide tout d’abord, puis de plus en plus entourés et tenant enfin par la main leur petite bonne femme. Ses camarades apprécient : elle est la première qui ait osé « faire des gens » parce que, lorsqu’on entre en transition, on a rarement dessiné, encore moins peint, mais sûrement jamais tenté (ou abandonné tout de suite alors) la représentation de soi-même ou des autres. Les premiers dessins sont des déserts. Nous avons donc passé l’encre sur les premiers alus. Chantal a vu peu à peu apparaître, tout doré, son soleil et la tête de son brave petit homme. Puis elle a voulu en faire un grand, en couleurs… A la rentrée de janvier (certains camarades avaient déjà donné quelques beaux dessins) elle a choisi, en atelier, la peinture, et elle a pris un petit morceau de papier pour faire ses personnages. Cela ne donne rien… « Si tu faisais plus grand ? » Et sur une grande belle feuille, jour après jour, après le premier tracé très sûr de son petit couple, elle a choisi ses couleurs, apporté des retouches, et accueilli avec un sourire… « contrôlé » mais ravi, le « ça c’est beau » de ses camarades… et le mien ! DANIELE COCHET |
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