C'est, sans doute, grâce à cette commune ignorance de l'adulte et de l'enfant que les réflexions orales ou les dessins de nos écoliers n'ont, semble-t-il, pas retenu l'attention des psychologues, pour ce qui regarde le ciel. Les psychanalystes eux-mêmes restent silencieux : on ne trouve pas de symboles phalliques dans le champ d'étoiles où Ruth posait ses regards angoissés, près de Booz endormi... Cependant le triangle Père‑mère‑fils, est bien ici de la partie puisque le soleil épouse la lune et qu'ils ont beaucoup d'enfants étoiles. Mais, n'en doutons pas, le complexe d'Oedipe et celui de la castration auraient du mal à se mettre en place : impossible de raisonner ici sur le cas exceptionnel susceptible de se hausser à l'abstraction valable pour la multitude... Le rêve poétique de l'enfant y est soustrait aux lois du freudisme...
Il faut s'en réjouir : voilà au moins un coin de prairie vierge dans lequel le Père Noël et le Petit Jésus échappent à une symbolique onirique pour devenir de rassurants compagnons dans un instant féerique. Ici, pas de signe défensif, pas de censure, pas de phantasme à pourchasser pour exorciser le subconscient de l'enfant.
Les soleils rient de toutes leurs dents, chevelure déployée aux quatre vents ; la Lune promène son visage serein « pour éclairer la route de celui qui s'est perdu ». Les étoiles innombrables attendent le petit cueilleur d'étoiles qui monte vers elles, la nuit, pour ramener « plein ses bras, plein ses mains, plein ses yeux, plein son coeur de ces fleurs du ciel » qui, depuis toujours, enchantent la Terre et les hommes devenus à leur tour « cueilleurs d'étoiles » pour de bon.
Elise FREINET