TECHNIQUE
L'ATELIER DE PEINTURE
Il est installé
en permanence et occupe tout le fond de la classe. Oui, il prend une grande
place ! C'est là un choix personnel : chacun de nous donne de
l'importance à ce qui est, pour lui, primordial. Chez Guérin, c'est l'atelier
audiovisuel qui utilise une bonne part de l'espace-classe.
Chez J.P. Lignon, c'est l'atelier imprimerie.
Chez C.Delvallée, ce sont les vivariums, les cages réservées aux
élevages d'insectes et l'atelier électricité électronique qui occupent
une place prépondérante...
I. ORGANISATION
MATÉRIELLE
Donc, dans
ma classe, une vieille table de cantine en bois de 2 m sur 0 ;80m, récupérée avant qu'on ne la brûle, aux pieds écourtés,
permet aux enfants de travailler à plat, horizontalement.
Derrière, un
panneau de contreplaqué léger, fixé au mur, permet de travailler verticalement
et de prendre du recul pour juger des effets obtenus chaque fois que cela
semble nécessaire.
Sous la table,
deux planches servent à ranger le papier à dessin et les dessins en cours
bien à plat.
Sur la table,
au milieu, s'alignent 25 ou 30 pots de yaourt en verre, maintenus entre
2 tasseaux cloués. Cela évite les accidents dus aux maladresses et permet
de poser les pinceaux fins à poils souples : si on les laisse dans les
pots, ils se courbent, ils se déforment, ce qui empêche de travailler
convenablement.
C'est toujours
moi qui prépare les couleurs
* La peinture
ne doit pas être trop épaisse sinon elle s'écaille en séchant le résultat
peut être très intéressant,
II n'a généralement
pas été recherché par l'enfant !
* La peinture
ne doit pas être trop liquide. II faut qu'elle soit couvrante et lisse
quand on l'essaie sur le papier.
On m'a souvent
demandé comment j'obtenais une trentaine de couleurs différentes,.. Bien sûr, il faut s'amuser à préparer des mélanges.
Alors, pour ceux qui manquent d'audace, voici des « recettes » qui permettent
de créer une belle palette à partir des 14 couleurs PEBEO composées en
collaboration avec la CEL. A l'aide du blanc
(il faut en acheter beaucoup) on fabrique les teintes pastel que certains
enfants affectionnent particulièrement,
Blanc + un
petit peu de bleu cobalt
Blanc + un
petit peu de bleu outremer
Blanc + rouge
Blanc + carmin
Blanc + rubine
Blanc + violet
Blanc + rouge
(à peine) + jaune = rose saumon
Blanc + bleu
de cobalt + vert émeraude = turquoise
Blanc + ocre
+ jaune -;- rubine = couleur chair ou fond de
teint comme disent les filles!
II est également
important de préparer des gris
Blanc + un
soupçon de noir = gris souris
Blanc + un
soupçon de noir + bleu = gris bleu
Blanc + un
soupçon de noir + rubine = gris rose
Et d'autres
tons encore :
Sépia + un
soupçon de noir = brun
Vert clair
+ un soupçon de noir = vert olive
ATTENTION !
Toutes ces teintes doivent rester propres.
Je ne remplis
les petits pots qu'à moitié. Cela évite le gâchis.
II y a un pinceau
14 ou 16 et une brosse pour chaque pot. Si on utilise le pinceau vert,
on doit le remettre près du pot de vert.
Les responsables
veillent à la propreté des couleurs qui sont renouvelées tous les 15 jours
environ.
Si le jaune
est sale, on le jette et on prépare un nouveau pot avec de la peinture
neuve.
Si les enfants
désirent préparer leurs mélanges à eux, ils peuvent le faire dans des
coquilles, ou des palettes qu'ils lavent ainsi que leurs pinceaux après
usage, Cela permet d'économiser la couleur qui doit, dans notre budget,
durer toute l'année.
Les pinceaux
sont lavés par deux responsables chaque soir.
Les pots sont
couverts chaque soir afin que la peinture ne sèche pas et que la poussière
ne la salisse pas.
II.
ORGANISATION DU TRAVAIL
1. Recherche
des idées, recherche pour la
mise en page. Rôle important du carnet de croquis (ci-dessus et photo
p. 43) sur lequel on a le droit de griffonner, de dessiner à tout moment
de la journée. Les dessins aboutis peuvent servir pour l'illustration
du journal scolaire également.
2. A l'atelier
de peinture :
- Choisir de
préférence du papier canson (il faut apprendre
à reconnaître les différentes sortes de papier).
- II faut choisir
le format dans lequel on veut travailler : petit, grand, long, large,
rond...
- Choisir la
disposition de la feuille selon le sujet à traiter : en hauteur ou en
largeur.
- Dessiner
à la craie blanche (les autres craies salissent le papier) et demander
aux copains ou au maître ce qu'ils pensent de la mise en page (il faut
éviter de faire un dessin minuscule au milieu d'une grande feuille par
exemple).
Si on s'est
trompé, la craie blanche s'efface facilement avec un chiffon propre en
frottant fortement.
- A la peinture,
on doit recouvrir des surfaces de couleurs. On travaille par taches colorées
et juxtaposées.
C'est très
différent du travail aux feutres avec lesquels on fait des traits colorés
ou du travail à la craie, à l'encre de chine où on peut superposer les
couleurs transparentes, les mélanger.
IL NE FAUT
PAS PASSER SUR LES TRAITS DE CRAIE QUI DOIVENT RESTER BLANCS. Cela évite
les mélanges malheureux ou involontaires et de salir les pinceaux qu'on
est toujours tenté de remettre tels quels dans les pots. Les traits de
craie servent de « frontières » entre les différentes surfaces colorées.
- Lorsque toute
la feuille est bien remplie et que la peinture est bien sèche, il est
temps de « rapprocher les frontières » en les recouvrant de l'une des
deux couleurs voisines ou en utilisant une autre couleur. Attention cependant
à l'usage abusif des cernes.
- Enfin, fignoler
le travail en brodant les robes, en «dessinant» les cheveux, les cils,
les prunelles, les rayons du soleil, les feuilles des arbres, les fantaisies
des fleurs ou du plumage des oiseaux.
- Avant de
présenter l'oeuvre terminée à la classe, FAIRE SA TOILETTE pour que disparaissent
les maladresses, les taches, les coulures, etc.
3. L'exposition
des travaux (photos p. 43)
- L'auteur
présente à la classe sa réalisation et explique son idée.
- Tout le monde
observe la lisibilité de l'idée, la propreté, le soin apporté aux finitions.
- Les critiques
doivent toujours être POSITIVES, par exemple :
« On ne voit
pas ton bonhomme jaune! Pourquoi ?
Parce qu'il
est sur un fond blanc ! Que peut-on faire ?
Peindre le
bonhomme d'une autre couleur ou bien le faire ressortir sur un fond foncé.»
- Encourager
les idées originales, poétiques, humoristiques, agressives au besoin,
même si la réalisation n'est pas parfaite.
C'est en forgeant
qu'on devient forgeron !
III.
LA PART DU MAÎTRE
« JE CROIS
QU'IL FAUT DÉTRUIRE CE MYTHE DE LA LIBERTÉ.
C'EST UN MOT QUE NOUS NE DEVRIONS JAMAIS PRONONCER EN PÉDAGOGIE.
C'EST L'ORGANISATION DU TRAVAIL QU'IL FAUT PRÉVOIR. LES ENFANTS N'ONT
PAS SOIF DE LIBERTÉ. ILS ONT SOIF DE TRAVAIL VIVANT. »
Freinet
La part du
maître est faite d'écoute, de permissivité, mais aussi d'exigence et d'apports
personnels.
On est sans cesse sur la corde raide : il faut savoir
accueillir, il faut savoir refuser, et avec quelle prudence, quel doigté
! « II est facile de rester prudent, écrit Élise Freinet, II est moins
aisé d'avoir du doigté car le doigté suppose la culture »...
Oui, il faut
savoir donner, et le meilleur de soi-même. Si nous voulons des enfants
riches et multiples, il nous faut être riche et multiple. Cela implique
que nous devons sans cesse nous passionner, nous «cultiver», au contact
les uns des autres. Et cela demande effort et travail. Et cela implique
l'humilité.
Nicole DELVALLEE
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