Notre fresque en relief

Jean LE GAL
École de Ragon
Rézé (L.-At)

Une bonbonne à gaz dans notre jardin coopératif … un affreux mur en parpaings pour la protéger et la cacher …

     

MAIS COMMENT CACHER LE MUR ?

Les idées trottent dans l’air du conseil : planter du lierre … des arbustes …

Et si « on faisait un dessin dessus ! »

Oui mais on ne peut pas peindre sur des parpaings, il faudrait un enduit !.

Pas de solution en vue durant longtemps, mais un matin du mois de mai, Isabelle nous dit : « Mon père, il est maçon... Il est en chômage... Il pourrait peut-être nous aider ?

Nous sautons sur l'occasion et Monsieur ILARDO accepte avec enthousiasme de venir animer notre chantier.

Compte de coopérative : achat d'un sac de ciment ; programmation d'un après-midi maçonnerie, et nous voilà prêts pour l'aventure !

Le jour prévu, notre maître-maçon est parmi nous avec ses outils. Nous apprenons l'art du mélange : deux seaux de sable tamisé (on le prend dans le sautoir) ; un seau de ciment ; chacun manie la pelle pour bien mélanger le tout ; on ajoute l'eau, on brasse... et en avant les truelles et la taloche ! Tous les apprentis, dont je suis, s'aperçoivent alors que ce n'est pas facile de manier ces outils : nous sommes plus experts en crayons et en pinceaux !

Voilà, c'est terminé... pour aujourd'hui, car M. ILARDO nous indique qu'il faudra une deuxième couche la semaine suivante... et un autre sac de ciment. Notre caisse de coopérative va subir un choc !

Le lendemain, il vient au conseil pour nous présenter ses outils et son travail de maçon.

Sa parole de travailleur est entendue fortement : - aimer le travail que l'on veut réaliser ;

- respecter les outils, les nettoyer, les ranger ;

- faire avec conscience le travail que l'on a choisi ;

 - être satisfait de ce que l'on a réalisé.

Nous causons longuement tous les deux ensemble : formation des enfants, coopération, autogestion. Les mots se suivent les uns les autres, et je ne sais plus qui de nous a parlé le premier de fresque en relief. Mais le hasard fait bien les choses : M. ILARDO connaît la technique et j'ai, en réserve depuis des années, des pigments purs de la Pébéo : de l'oxyde jaune et rouge, du bleu de manganèse, du noir.

     

Dès le lendemain, j'en parle aux enfants. Tous sont d'accord d'emblée. Il va falloir puiser encore dans la caisse pour acquérir d u ciment blanc, mais l'aventure vaut bien qu'on y sacrifie nos derniers deniers ! L'élaboration du projet de dessin est programmé et au jour convenu, nous sommes prêts. Notre «maître» est là, le travail commence :

- Préparation du ciment pour la deuxième couche d'enduit que nous avons décidé de teinter en bleu-noir (ne pas dépasser la dose de 5 % pour ces couleurs) ;

- Répartition soigneuse de l'enduit sur la première couche après l'avoir bien mouillée, et lissage. Puis nous gravons, avec des bâtons taillés en pointe, les graphismes prévus dans le ciment encore frais. La responsable de jour va alors chercher les cuisinières : nous voulons en effet leur avis, ce sont elles qui verront la fresque de leur cuisine.

« Ça manque d'oiseaux dans le ciel » Alors, inventons des oiseaux !!! La fresque est une école de la patience : il nous faut maintenant laisser sécher cette deuxième couche d'enduit, avant de commencer notre véritable entreprise.

En attendant, nous rassemblons le matériel nécessaire : des pots en verre, des petites bassines en plastique, pour la préparation du mortier coloré ; des truelles : «langue de chat» et autres ; une fourchette pour les branches d'arbres ; des cuillers pour les feuilles ; et tout ce qui peut servir à étaler et modeler la pâte sur le mur : pinceaux, couteaux...

     

Le grand jour, le soleil est au rendez-vous... et bientôt aussi des spectateurs, les assistantes sociales du centre d'à côté, quelques anciens du club. du troisième âge, les cuisinières... Dernier conseil de notre guide : « Surtout n'utilisez pas vos doigts, le ciment mangerait votre peau ! » Nous mouillons à nouveau le mur, puis chacun prépare un mortier bien homogène dans son récipient, le teinte à sa guise avec les pigments en poudre et commence à modeler son graphisme : chacun en effet a le sien. La progression est lente car il y faut beaucoup de minutie et d'attention... Le chantier durera trois jours entiers... Mais la joie de tous, devant l'oeuvre collective réussie qui nous vaut de nombreuses félicitations, est la récompense des efforts individuels.

C'est M. ILARDO lui-même, notre maître-maçon, qui nous donne la plus belle conclusion : « C'est passionnant de travailler avec les enfants, merveilleux de les voir mettre toute leur imagination, pour vouloir bien faire... et ils prennent leur travail en considération ! Je vous envie ! »

     

Technique

1. PRÉPARATION DU FOND sur un mur vertical ou sur une plaque que l'on prépare spécialement.

a) Doser ciment ordinaire et sable tamisé : 2 seaux de sable pour un seau de ciment.

b) Mélanger soigneusement à l'aide d'une pelle avant d'ajouter l'eau.

c) Ajouter l'eau et brasser longuement pour obtenir un mortier bien homogène.

Si l'on veut teinter le fond, faire dissoudre d'abord les pigments  en poudre dans l'eau.

d) Graver les graphismes.

2, TRAVAIL EN RELIEF :

a) Préparer le mélange ciment blanc et sable : mêmes proportions qu'au 1a.

b) Chacun prend un peu de ce mélange, ajoute le pigment choisi (dose de 2 à 4 % suivant les couleurs), de l'eau et brasse  pour obtenir un mortier dur et compact qui ne coule pas si on travaille sur un plan vertical.

Bien mouiller la partie sur laquelle on veut l'appliquer et donner peu à peu le relief que l'on veut obtenir.

On n peut aussi se servir de moules divers que l'on remplit et que l'on applique à l'endroit voulu.

Cette technique, que nous venons de redécouvrir, me semble pouvoir offrir un vaste champ de possibilités à la créativité et au tâtonnement expérimental.

Elle est passionnante et enrichissante, car elle réunit différents aspects de nos activités :

- le graphique, le pictural, le manuel ;

 - le personnel et le coopératif.

C’est pourquoi nous nous sommes promis de recommencer quand le soleil du printemps sera revenu.

Jean L E GAL

 

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