Il n'est pas d'éducation naturelle qui puisse se passer de présence extérieure. L'environnement joue un rôle fondamental dans le processus de tâtonnement qui permet à chacun de progresser:

C'est pourquoi nous devons nous interroger sur

LA PART DU MAÎTRE,

Comment l'adulte peut-il inciter à la création ? Quelle peut être son action afin d'éviter les inhibitions ? Comment, à partir d'un graphisme, peut-on en tirer d'autres et permettre ainsi l'intégration par l'enfant de sa réussite ?

Car tout est tâtonnement mais pour que le tâtonnement réussi devienne une technique de vie intégrée par l'individu et un élargissement de son être en même temps qu'une base nouvelle d'un nouveau tâtonnement, il faut des répétitions qui assurent le palier de la découverte de cette aptitude. La prise de conscience est souvent longue. Et de la prise de conscience à la reconnaissance par l'enfant du fait « qu'il est capable de... » ou « qu'il domine la technique de... », il y a encore un fameux pas à franchir, marche nécessaire pour qu'il soit définitivement maître, dans ce domaine, pour l'avenir. Il s'agit en fait d'un accès à un pouvoir nouveau.

Ne posons-nous pas ainsi notre existence face au monde ? Nous n'existons que par la reconnaissance, en nous-mêmes, de nos capacités et de nos savoir-faire. Ne serait-ce pas là le fondement de la dynamique de l'être ?

C'est pourquoi les « ratages » ou les « dessins bruts » ne sont en fait que des essais dans le processus de tâtonnement propre à chacun. C'est du côté de l'enfant, et non du maître, qu'il faut considérer la réussite : si elle participe au plaisir de l'enfant, si elle entraîne vers de nouveaux tâtonnements, on peut admettre que l'essai est réussi ; il est raté par contre si l'essai le bloque ou provoque son déplaisir.

Et là c'est encore au maître de sentir comment il faut intervenir si toutefois, comme il arrive le plus souvent dans nos classes, l'enfant, de lui-même, en recours, n'a pas déjà fait appel. Un simple encouragement ou une présence que l'on fait sentir plus proche, suffira le plus souvent à redonner confiance en soi après le doute, pour une nouvelle recherche. De même, si nous exposons, dans nos classes, l'ensemble de ce qui s'y produit, c'est pour affirmer et confirmer à chacun que ce qu'il a offert est visible par tous et peut apporter à tous.

Alors si l'un des enfants doute de lui-même, il trouvera dans la présentation de son oeuvre, la confirmation de son existence et la reconnaissance de son savoir-faire. L'exposition devient une proposition à parfaire, une incitation à la création. Le maître met à la disposition de chacun le patrimoine culturel commun, directement accessible par ce qu'il a de proche et qu'il contient de charge affective (il n'y a pas de mystère, ni de mystique, ni de mythe ; l’œuvre s'est faite aux yeux de tous).

Et, en comparaison de ce qui s'est réalisé naturellement dans la classe, c'est l'accès aux oeuvres humaines en général, par l'exposition d’œuvres d'autres enfants (ou leur publication dans Art enfantin par exemple), par l'observation d’œuvres d'adultes (B.T. Arts).

Il nous faut amener l'enfant jusqu'au bout de ses tâtonnements, jusqu'à la maîtrise de son expression, même si elle ne touche pas directement notre sensibilité car nous avons le devoir de dépasser les pressions de notre propre vision de l'art sous peine d'être conduits, immanquablement, à enseigner une esthétique.

Guy et Renée GOUPIL

 
 
 

Télécharger ce texte en RTF

Retour au sommaire