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Actualités
La revue
cette année
• Nous y trouverons des reportages
variés concernant le premier et le second degré dans chaque numéro.
• Un numéro sera consacré à « L'imagination»
et témoignera de la richesse des échanges entre enfants d'âges différents
à partir de la recherche d'un élève de cours moyen.
• Le n° 100 sera un numéro international
avec la contribution de sept pays dont le Brésil, la Pologne, la Suisse,
etc.
• Un grand reportage relatera par
l'image aventure des «mioches» de l'école Jean-Zay à Vendôme : «Comment on fait musique dans notre classe.»
Plein d'idées à prendre !...
• Des adolescents de 3e feront partager
car la peinture leur vision de notre époque et évoqueront les grands
problèmes qui es préoccupent.
Ces points sont un petit aperçu
des numéros à venir.
Courrier
des lecteurs
L’abondant
courrier reçu cette année nous permet d'ouvrir la rubrique «Courrier
des lecteurs ». Des opinions sur des numéros parus sont l'occasion
de mieux cerner le pourquoi et le comment de notre pratique de classe.
Souhaitons que ces mises au point concernant le n° 94 paru à la rentrée
dernière, incitera le lecteur à réagir à la lecture des numéros de l'année...
Guy et Renée
GOUPIL :
De la page
35 à la page 39 du n° 94, Annie François présente des sculptures réalisées
par ses élèves qui, dit-elle, se sont inspirées de... S'inspirer de...
ce n'est pas bien sûr copier, mais il y a tout de même là une démarche
qui s'en approche, et si la copie a pu montrer le geste juste de l'ouvrier
ou de l'artisan ce qui n'est pas rien), elle n'a que apparence des oeuvres
dont elle est née quand elle n'en est pas seulement une fade réplique.
Nous ne croyons pas nous tromper en disant que ce qu'on a toujours voulu
montrer dans la revue, c'est une démarche diamétralement opposée à celle
qui aboutit à la copie. Comme le dit J. Caux : « Nous ne
cherchions pas à faire «beau» mais à faire reconnaître une forme d'art
méconnue, ignorée. » II s'agissait de montrer que les enfants
pouvaient être des créateurs, que tout individu avait sa forme d'art,
était un artiste à sa manière. Nous défendons encore ce point de vue car
nous continuons de penser que la création personnelle, c'est la vie.
Il est clair pour nous que la copie,
c'est la mort de l'art. II n'y a d'artiste que dans la création et le
plus habile faussaire ne peut être considéré comme un artiste car il ne
crée rien, n'apporte rien de nouveau. Il n'enrichit pas le patrimoine
culturel, commun, il ne participe pas à l'immense tâtonnement de la société
humaine et ne peut donc pas le faire progresser. Il tend tout simplement
à le faire stagner. Ne confondons pas art et technique, création et savoir-faire.
Qu'un être à la conquête de la maîtrise de ses potentialités ait besoin
de se répéter, cela nous semble normal ; qu'il s'appuie sur une connaissance
du milieu, une connaissance des oeuvres des autres hommes présents et
passés, cela paraît nécessaire ; qu'au titre de la prise en charge pour
faire passer «dans les mains» un certain savoir-faire on accepte la copie
? Peut-être. En tout cas, il ne nous paraît pas qu'elle puisse être proposée
en exemple, comme modèle à suivre, sans explication autre. Et il nous
semble bien qu'en définitive, c'est de cela qu'il s'agit dans le n° 94
d'Art enfantin, qu'on l'ait voulu ou non.
Réponse
d'Annie FRANÇOIS à Guy et Renée GOUPIL :
Dans ma réponse,
je vais parler principalement de «la copie» (bien que j'estime le terme
inexact pour ce qui se passe dans mes classes), car c'est sur ce point
que porte la critique. Mais je veux auparavant dire que ce ne sont pas
les seuls travaux qui existent dans mes classes. D'ailleurs, dans le n°
94 d'Art enfantin, sur les 15 travaux présentés venant de mes élèves
du L.E.P., 4 sculptures seulement sont inspirées de façon plus
ou moins proche d'un document.
Je ne sais pas si vous avez déjà
fait de la sculpture vous-même. Moi j'en ai tait et j'en fais encore,
j'aime ça et j'ai envie d'offrir la possibilité de sculpter à mes élèves
car ils peuvent y trouver un moyen de s'exprimer qui peut leur convenir
mieux que le dessin ou la peinture. L'inconvénient c'est que la sculpture
demande du temps et un effort physique assez important même avec un matériau
tel que le béton cellulaire. Aussi, vu le peu de temps dont disposent
les élèves, il m'est difficile de les laisser tâtonner (comme on peut
le faire davantage dans les différentes techniques du dessin) et risquer
d'aller à l'échec. A cela il y a deux raisons primordiales :
1. Les élèves de L.E.P.
ont subi tout au long de leur scolarité et subissent encore des échecs
dans la plupart des matières qui leur sont enseignées. Or une succession
d'échecs entraînent au refus de l'effort. «Pourquoi se donner du mal
puisque, quels que soient les efforts que l'on fasse, on se retrouve avec
2 ou 3 comme note. » C'est une réflexion que j'ai souvent entendue
à propos des cours de maths, français... Donc un de mes premiers buts,
c'est de leur permettre de réussir quelque chose, de leur redonner confiance
en leurs moyens, car il ne me semble pas qu'ils puissent s'exprimer réellement
s'ils n'ont pas une certaine confiance en eux.
2. J'ai envie que les élèves puissent
s'exprimer vraiment dans cette technique parce que ne l'ayant jamais pratiquée,
ils n'ont pas avec elle l'expérience de l'échec et que d'autre part ils
peuvent y trouver un moyen d'expression plus approprié à leur caractère.
Et je veux leur donner les moyens de cette expression. Je ne veux pas
que, tout bêtement, ils se retrouvent devant un creux irréparable là où
ils auraient voulu faire un relief. II y a donc une technique de base
à donner comme je vais l'expliquer dans les exemples suivants.
En sculpture, certains élèves se
lancent carrément car ils ont bien en tête ce qu'ils veulent faire et
qu'ils savent imaginer leur forme finie au travers du bloc. Ceux-là sont
très rares. C'est le cas de Vincent Lucas (p. 35 du n° 94). Il avait son
désir de faire une licorne. Depuis la première séance de l'année où il
avait appris que l'on pouvait sculpter ici, il n'avait de cesse de commencer.
Et quand il a démarré il a très vite compris la technique de l'épannelage (dégrossissage d'un bloc de pierre par une taille
en plans qui dégage la forme du sujet) parce qu'il avait en tête son sujet.
II ne s'est servi de documents qu'à la fin pour préciser la forme du museau
qu'il ne voyait pas très bien comment faire.
Le cas de Vincent est très rare.
Les autres ont souvent leur idée mais elle est plus vague et ils ne savent
pas toujours comment attaquer le bloc, par où commencer. Et pour moi,
il est très difficile de leur expliquer la technique de dégrossissage
sur quelques vagues indications de leur part. Alors quelquefois ils recherchent
le ou les documents qui se rapprochent le plus de leur idée et à partir
de là je peux leur montrer comment épanneler. Il est sûr qu'après, certains
élèves ont du mal à se détacher du document qui représente une sécurité
(de toute façon il y a toujours une part de transposition et d'imagination
par le fait même que le document ne présente qu'une face du sujet alors
même que la sculpture en présente quatre).
Le cas des deux Françoise (p. 35
et 37) est un exemple d'élèves ayant pu se libérer du modèle. Cas de Françoise
Lemblée, p. 35. Je l'ai encore cette année et
le premier travail qu'elle a eu envie de faire, c'est à nouveau une sculpture.
Et cette fois-ci, elle ne s'est servie d'aucun document et elle a été
trois fois plus rapide pour le faire. Elle réalise en ce moment
un grand masque en grillage recouvert de papier journal. En une demi-heure,
les principaux volumes de ce visage ont été mis en place sans petitesse
et sans hésitation. Cas de l'autre Françoise, p. 37. C'est une élève qui,
durant les deux ans où je l'ai eue, n'a jamais réussi à terminer un travail.
Toujours mécontente de ce qu'elle faisait, ses dessins finissaient souvent
à la poubelle. Ce n'est qu'au cours de la deuxième année qu'elle s'est
lancée dans la sculpture. Et là, ça a accroché mais je ne pense pas que
sans support de document, ça ait pu marcher. Déjà il a fallu encourager
souvent pour amener le travail jusqu'à son terme et pourtant elle y tenait.
Dès qu'elle a eu terminé sa sculpture, elle l'a emmenée, tout heureuse,
chez elle. Pour moi, ça c'est une réponse. Malheureusement, il n'y avait
pas d'année supplémentaire pour approfondir l'évolution.
Quand je dis : «Pour moi, ça
c'est une réponse», ce n'est peut-être pas très clair, aussi je vais
m'expliquer.
Cela veut dire, pour moi, que Françoise
a enfin réussi, après de grosses difficultés, beaucoup d'efforts, à faire
enfin quelque chose dont elle pouvait être fière auprès des autres. Et
cela, c'est déjà très important. Ce n'est pas tout mais c'est une première
étape nécessaire pour un grand nombre de mes élèves. Après peuvent venir
les autres étapes de créations personnelles comme pour Françoise Lemblé.
Peut-être que tout ce que je viens
de dire ici aurait dû être écrit en accompagnement des photos du n°94.
En fait j'ai conçu cet article plutôt comme une fiche technique sur la
sculpture. J'espère que, maintenant, il est clair que je ne prône pas
la copie en exemple, qu'il n'y a d'ailleurs pas de copie dans mes classes
au sens où l'entendent Guy et Renée Goupil. Le document n'est le plus
souvent qu'un point de départ aidant à se lancer dans une création plus
personnelle, un peu comme lorsque l'on est devant un paysage ou visage
que l'on aime et que l'on veut le peindre ou le sculpter.
A ce propos, je voudrais ajouter
quelque chose. Jusqu'à un certain âge, les enfants ne se préoccupent pas
de la «forme» de ce qu'ils dessinent. Ils disent ce qu'ils ont envie de
dire. Ils ne se préoccupent pas de l'aspect réaliste des choses. Or moi,
j'ai des adolescentes de 15 à 18 ans et pour elles la forme a une très
grande importance. Elle a une importance au vu des sujets qu'elles veulent
dessiner. Ce qui intéresse quasiment toutes mes élèves pour ne pas dire
toutes, c'est l'amour, le couple, les visages, la nature telle qu'elle
permet la rêverie, les animaux, la danse, le feu, l'eau... Or le problème,
il est là : comment dessiner sur un sujet que l'on aime, que l'on a vraiment
envie de faire lorsque l'on ne sait pas le dessiner comme on voudrait
qu'il soit. Je prends un exemple précis : une élève veut faire
un couple enlacé. Elle veut deux êtres beaux et jeunes... Elle regarde
son dessin, ce ne sont plus que deux pantins raides et grimaçants (ce
n'est pas moi qui juge, c'est elle), qui ne correspondent pas à son désir.
J'arrive, le dessin est gribouillé ou déchiré et j'entends : «Ça faisait
enfantin, je n'y arrive pas, je ne sais pas dessiner.» Que faire alors
? Lui dire de trouver un autre sujet ? Lui apprendre à dessiner des personnages
? Lui dire que son dessin n'était pas si mal, qu'en le refaisant une,
deux, trois fois, elle arrivera à plus de souplesse... C'est sans compter
sur les blocages qui reviennent à la hâte.
J'ai pris l'exemple du dessin d'un
couple, mais le même problème se retrouve avec tous les sujets qu'elles
veulent faire. Si l'une d'elles veut dessiner un paysage, tous les éléments
se retrouvent les uns à côté des autres sans aucune perspective.
Moi, ça ne me gêne pas forcément
mais elle, si, et je retrouve cette phrase : «Ça fait bébé.»
En définitive, les élèves ne possèdent pas la technique qui leur permettrait
de s'exprimer comme elles le désirent, et la -formation qu'elles
ont reçue jusque-là les bloque pour trouver une autre manière de s'exprimer.
Avez-vous ce problème ? Y avez-vous trouvé une solution ?
Moi je fais comme je peux. Je leur
apprends à dessiner un visage. Je leur fais observer comment un oeil peut
être différent d'un autre à partir d'une même construction... Et cela
je le fais avec les moyens dont je dispose : le visage de la camarade
d'à côté, des photos, des reproductions de tableaux. Et je fais la même
chose dans tous les domaines qu'elles me réclament. Tant pis si elles
sont tentées de suivre d'un peu trop près un des modèles que j'ai montrés.
Le prochain travail sera plus libre parce qu'elles auront appris quelque
chose en faisant celui-là et qu'elles auront retrouvé la confiance en
elles.
Il est possible que je fasse fausse
route. De toute façon je n'arrête pas de culpabiliser parce que ça ne
me satisfait pas. Aussi je voudrais que vous me disiez comment vous faites,
vous, pour vous sortir de ces problèmes.
Maintenant pour ne pas trop culpabiliser
tout de même, voici ce que j'estime de positif dans mes classes : les
élèves sont heureuses de venir en dessin, elles travaillent généralement
avec acharnement sans souci d'une note, elles ont envie de faire d'autres
travaux quand elles ont terminé le précédent. Elles ont hâte d'emmener
leurs dessins... pour les montrer chez elles.
Réponse
de Guy et René GOUPIL :
Vous voudrions
d'abord te dire combien ta lettre nous a permis de nous sentir proches
de tes problèmes, car nous les connaissons bien pour les avoir vécus pendant
toutes les années que nous avons passées dans les classes de transition.
Vous avions alors, non seulement tous les élèves que tu retrouves en L.E.P.
mais aussi ceux dont les possibilités étaient telles à la sortie du collège
qu'ils ne pouvaient pas même y trouver place. Mais nous avions l'immense
avantage de les avoir toute la journée et non pas pour un court moment.
Nous les connaissions au travers de nombreuses activités, ce qui modifie
tout à fait les données de ton problème. Cependant
tu imagines que l'on comprend tes difficultés.
Mais revenons à «imitation de...»
(car nous n'avons pas parlé de copie en ce qui
te concerne). Tu le dis toi-même, il aurait sans doute fallu des explications.
Encore que nous nous posons toujours des questions sur l'opportunité de
la présentation dans la revue de travaux «inspirés de... ».
II nous paraît que montrer ainsi
des travaux qui s'inspirent de... sans autres explications du pourquoi,
du comment, du vers quoi ils ont débouché, risquent de mener à une copie
servile des camarades qui ne sont pas suffisamment en contact avec
nous. Ce serait aboutir à l'opposé de ce qu'a toujours été la pédagogie
Freinet, toute entière tournée vers l'appel de l'expression libre personnelle,
la création, le dépassement de soi, la mise en commun des recherches en
coopérative.
Ta lettre nous a permis d'approfondir
notre réflexion sur le problème car elle pose une question fondamentale
à propos des voies qui mènent à l'expression personnelle «libre».
Et si l'expression pouvait se trouver
débloquée par des détours que nous aurions jusqu'ici négligés ou trop
hâtivement peut-être refusés ?
Nous partageons avec toi le désir
de voir les élèves réussir ; la réussite des enfants, c'est en quelque
sorte notre réussite à nous, notre joie aussi. Nous disons : «C'est
la réussite qui procure la joie» mais nous ajoutons : «C'est du côté de
l'enfant et non du maître qu'il faut considérer la réussite ; si elle
participe au plaisir de l'enfant, si elle entraîne de nouveaux tâtonnements,
on peut admettre que l'essai est réussi; il est raté par contre si l'essai
le bloque ou provoque son déplaisir».
Tu montres bien que le temps,
l'absence de temps t'a imposé de rechercher une voie plus directe (l'inspiration
de...) que celle du tâtonnement mais qu'il te semble bien qu'elle permette
un retour vers l'expression tâtonnée alors qu'il y avait auparavant absence
d'expression. C'est ce retour vers l'expression tâtonnée qui est fondamental.
II nous reste cependant encore une
inquiétude à propos de la copie et même sans parler de copie à propos
même de l'inspiration de... Si tu en fais une réussite (ou jugée telle
par l'enfant, l'adolescent ou l'adulte), ne penses-tu pas qu'elle aura
valeur de recours en cas de difficultés ? qu'elle
s'instaurera en technique de vie ? et que bon
nombre de nos élèves s'y installeront dans un semblant de confort qui,
tous comptes faits, élèvera une barrière entre eux et les moyens auxquels
ils auraient pu accéder par l'intermédiaire de pratiques de l'expression
libre ?
C'est-à-dire entre ce qu'ils sont et ce qu'ils auraient pu devenir par
l'exploitation de leurs potentialités propres. As-tu remarqué qu'ils débouchent
vraiment dans des recherches personnelles après avoir passé par l'expression
des autres ?
Il semble bien en tout cas qu'on
valorise une oeuvre d'un autre ; en la recopiant on lui accorde une valeur
que l'on refuse à son oeuvre propre. Il y a parfois de ces détours qui
nous surprennent.
Les choses n'ont souvent que la
valeur qu'on leur donne. Si les enfants ou adolescents ou adultes considèrent
comme un échec leurs réalisations, c'est que leur désir s'est trouvé conforme
à des normes d'une esthétique à laquelle on ne leur a donné qu'un accès
passif. Ces normes sont d'ailleurs effectivement hors de portée de leurs
capacités actuelles. C'est à nous de leur montrer qu'il existe d'autres
formes, d'autres valeurs également reconnues auxquelles leurs oeuvres
participent. De même qu'en français on accepte le texte, le poème tel
qu'il est, on le valorise en dehors des jugements de comparaison avec
les «grands» auteurs ; peut-être faut-il au niveau de l'art accepter tout
ce qui est fait mais refuser des jugements dévalorisants, en formuler
d'autres qui replacent plus convenablement le travail réalisé à une place
plus haute. On peut comparer l'art des ouvriers-artisans
bâtisseurs de cathédrales souvent inconnus avec les oeuvres d'artistes
tels que Michel-Ange en montrant combien chacun a de mérites divers, chacun
ayant donné à sa mesure, le meilleur de soi-même. Pourquoi accepter de
refuser avec eux des formes raides au profit de formes souples ? A chacun
son être. Pourquoi ne pas motiver, montrer qu'on n'atteint pas de prime
abord les sommets et qu'il faut s'essayer avant de réussir ? II nous faut
absolument faire connaître à chacun de nos élèves sa valeur propre (d'où
l'intérêt de nos expositions).
II n'est guère éloigné le temps
où les psychologues expliquaient le manque de productions des grands élèves
du primaire par l'écart qui existe entre le monde objectivement observé
par l'enfant et ses capacités à le dessiner tel quel. Se reconnaissant
incapable effectivement, l'enfant se bloquait. Cela paraît normal et c'est
ce que l'on enseignait.
Nous avons depuis montré que les
grands enfants du primaire peuvent tous continuer à dessiner pour peu
que l'on prenne en compte telles quelles leurs réalisations sans vouloir
les faire coller à tous prix à des représentations objectives (ou tout
de suite arriver à la qualité d'oeuvres achevées d'adultes).
Peut-être y a-t-il là matière à
réflexion
pour notre
manière d'être à l'égard des autres en général.
Ainsi tu parles de culpabilisation
pour toi-même. II n'y a pas de culpabilité de personne là-dedans. De quoi
serions-nous coupables les uns ou les autres ? On se sent coupable d'avoir
une opinion qui n'est pas celle d'un autre camarade. Comment pourrions-nous
nous sentir coupables de ne pas savoir toujours nous en sortir ?
Nous essayons de comprendre, de
faire mieux notre tâche si difficile. Nous travaillons ensemble, nous
réfléchissons ensemble, chacun apportant ce qu'il a cru tirer de ses expériences
pour une mise en commun qui nous permettra peut-être de faire quelques
pas, de mieux appréhender notre travail. Voilà bien des raisons de ne
pas nous sentir coupables.
Nous avons
lu...
• Isabelle
par Arnold
LOBEL, École des Loisirs (Joie de Vivre).
Isabelle, la jument qui travaille
dur dans les champs, se trouve terne et sale quand elle se regarde dans
les flaques d'eau. Un beau jour, le fermier et la fermière vont en ville
et achètent à Isabelle de beaux vêtements, de belles chaussures vernies
et un magnifique chapeau à fleurs.
Isabelle découvre à ses dépens que
ces atours lui imposent des contraintes. Très vite, elle comprendra que
rien ne vaut l'amitié de Porculus, le cochon,
même s'il est un peu sale, et la vie toute simple avec les travaux des
champs.
Ce livre a eu le même impact dans
ma classe que «Porculus» (même auteur, même
collection). C'est une classe de maternelle petits/moyens. C'est un livre
facile à lire pour les C. P. et C.E. 1.
Les enfants se reconnaissent dans
Isabelle comme ils se sont reconnus dans Porculus.
Voici quelques réactions d'enfants
lorsque nous eûmes fini de raconter ce livre...
Guillaume. - Moi, j'ai des souliers avec des petites languettes,
je n'aime pas les mettre, ils me font mal aux pieds. Ma maman me les met
quand on va faire des courses.
Jeanne. - Un jour, je suis allée chez une dame, pour l'anniversaire
de Sophie ; mes souliers vernis, ils me serraient aux pieds. Ma robe,
elle tombait parce que le noeud se défaisait, je marchais dessus à chaque
pas, je ne pouvais pas courir.
Loïc. - Ma maman m'avait mis un beau pantalon, pour être joli,
en faisant du vélo, je l'ai sali...
Alexandre. - Ma maman, elle m'avait mis un beau pantalon parce
qu'on allait chez quelqu'un. En montant les escaliers, j'ai glissé, mon
beau pantalon, il était tout sale, ma maman m'a grondé...
Mathilde. - Quand je suis allée à Paris, avec ma mamie, j'avais
mon beau pantalon du dimanche, il ne fallait pas que je le salisse, ma
maman me l'avait bien dit.
J'ai demandé : «Est-ce que vous
aimez mieux avoir de beaux habits... pour être beau et ne
pas vous salir, donc ne pas trop jouer ou bien être moins beau et pouvoir
jouer ?"
Jeanne. - Moi, j'aime bien avoir de beaux habits et pouvoir
jouer mais alors je me salis et mes habits, ils ne sont plus beaux, alors
j'aime mieux tout de suite être moins belle et pouvoir jouer.
Soline. - Moi, j'aime mieux jouer, tant pis si je n'ai pas
de beaux habits...
Céline, Mélanie, Jean-François. - Moi, j'aime mieux pouvoir
jouer...
J'ai encore demandé : «Est-ce
que vous pensez qu'avec de beaux habits, on est plus beau ?.., "
Toute la classe.
- Oh ! oui alors...
Dernière remarque : les illustrations
qui représentent la jument sont à la fois nettes, précises, expressives
et humoristiques. C'est depuis que ce livre est dans la classe que les
chevaux commencent à apparaître en dessin, peinture, marionnettes...
• A
ta santé, le loup,
illustration
: Éléonore SCHMID, texte de Chantal DE MAROLLES, Éditions Centurion
Jeunesse.
Passepoil, fatigué, ne peut
plus suivre le reste de la meute qui lutte contre le froid et la faim
; il doit être abandonné.
D'abord rejeté par les hommes dans
les villages où il se réfugie, il est ensuite accueilli, soigné et entouré.
Ce livre a tout de suite plu dans
ma classe (maternelle petits/moyens) par son illustration : les couleurs
sont douces. Les détails de chaque illustration sont nombreux mais très
nets. Les personnages dessinés simplement sont cependant très expressifs.
Le texte, phrases courtes et vocabulaire
facile, toujours imprimé sur fond blanc ou bleu clair doit être aisé à
lire pour des élèves de la fin du C.P. et début du C.E.1.
Les enfants ont trouvé que ce loup
ressemblait plus à un renard ou à un chien qu'à un loup... Le loup restant,
malgré des livres comme celui-ci, l'animal tout noir qui dévore tout et
qui fait peur...
Marie-Claude LORENZINO
• Un
samedi de l'an deux,
par Nicole
MARQUET, Éd.. de la Marelle.
Plusieurs éditeurs renouent,
cette année, avec les albums pour enfants aux épaisses pages cartonnées
du temps de notre enfance. C'est le cas de ce petit livre qui raconte,
en images, la journée d'une enfant de deux ans. Une vraie enfant, dans
un monde réel où le soleil fait des ombres sur les murs, où les jouets
se cassent, où on cogne son biberon sur le bois du lit, où on ne peut
pas emmener tous ses jouets en promenade et où les interrupteurs sont
hors de portée des enfants. C'est surtout ça qui fait le charme de cette
histoire simple : qu'on sente, à chaque page, que l'auteur parle d'un
enfant en chair et en os. Les jeunes enfants aussi sauront certainement
reconnaître parmi toutes ces images des situations qui leur sont bien
familières.
• La
maison,
par Philippe
DUMAS, L'École des Loisirs.
Encore une de ces histoires
poétiques dont Philippe Dumas a le secret. Un enfant passe chaque jour
devant un pavillon qui l'intrigue. Finalement, il se décide à y entrer
pour découvrir que c'est une maison magique: «Elle est pleine de palmiers,
avec des singes qui se balancent aux branches» ; «La salle à manger
est une salle qui est toute à manger» ; «La porte du frigidaire
s'ouvre sur un coin de Pôle Nord»; etc. II y a même une belle
princesse captive qui n'est autre que Laure Perrault, la fillette qui
depuis quinze jours manque la classe. Entremêlement de l'imaginaire et
de la réalité avec des dessins extraordinaires.
Christian POSLANIEC
NOUS avons
lu par ailleurs
Dans le Bulletin de la Société
des Professeurs de Dessin et Arts Plastiques (lycée Buffon, boulevard
Pasteur, "5015 Paris) :
Depuis le début de l'année scolaire,
nombre de renseignements et de témoignages nous parviennent de nos collègues
; tous font état d'une dégradation sérieuse de la situation des arts plastiques
à l’école.
Par ailleurs les réunions, les discussions
interprofessionnelles, les contacts avec divers partenaires concernés
par le fait éducatif les textes officiels nous permettent de penser que
l'existence des arts plastiques est reconnue et jugée nécessaire dans
le projet global de l'école aujourd'hui. La situation serait, là, positive.
Ces deux constatations, bien que de nature différente, sont contradictoires,
il nécessaire d'en avoir bien présent à l’esprit les deux aspects pour
avoir des raisons de ne pas désespérer; désespérance qui est le cas de
nombreux collègues, dont l'isolement et les difficultés augmentent.
LES ATELIERS OPTIONNELS
La mise en place d'ateliers optionnels
n'est toujours pas effective.
LE RECRUTEMENT
La chute du recrutement des professeurs
certifiés a des conséquences multiples. Inversement par rapport à cette
chute du recrutement qui introduisait dans la vie professionnelle des
professeurs formés, s'est effectuée une arrivée massive de personnel,
non formé et non toujours motivé.
Cette situation inconfortable pour
les uns et les autres produit dans bien des cas une tension et crée une
inquiétude justifiée chez les enseignants plasticiens.
L'INTERVENTION EN MILIEU SCOLAIRE
Les interventions extérieures en
milieu scolaire, de plus en plus fréquentes, accentuent, cette fois psychologiquement,
l'inquiétude des enseignants.
Un exemple : situation de la
discipline à l'Académie de Lille :
Quelques éléments informatifs
nous ont été communiqués par notre section académique de Lille depuis
la rentrée 1979.
LA RÉGRESSION DES POSTES
- 1973-74 : 204 postes pour 196
collèges et 70 lycées (77%)
- 1978-79 : 170 postes pour 320
collèges et 75 lycées (43 %).
La rentrée scolaire 79 est marquée
par deux nouvelles suppressions de postes
La diminution des postes est surtout
sensible en lycées où le caractère facultatif de ces enseignements entraîne
leur disparition.
De 1973 à 1979, le nombre des lycées
n'assurant aucun enseignement d'arts plastiques est passé de 43 pour 1970
(61 %) à 57pour 1975 (76%).
Ce phénomène n'est pas particulier
à l'Académie de Lille puisqu'au plan national 37 % des lycées n'ont pas
de professeur d'arts plastiques. II connaît cependant une plus grande
ampleur et illustre le sous-développement des enseignements du second
degré dans notre discipline.
LA SITUATION EN COLLÈGES
Le nombre de postes d'arts plastiques
en collèges est de 135. 57 % des collèges n'ont pas de professeur d'arts
plastiques. En revanche, on constate une progression du nombre de postes
P.E.G.C. ayant une valence en arts plastiques
: il y en a 225 (contre 135 postes «certifiés»)
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