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DE LÉCOLE MODERNE L'ENSEIGNEMENT ÉDITIONS DE L'ÉCOLE MODERNE FRANÇAISE
CANNES Dépôt légal 1962 |
NB : pour ne pas alourdir le documents, les graphiques
nont pas été inclus, ils sont disponibles sur le site.
Le calcul,
comme les sciences, est plus que jamais à l'ordre du jour.
Il l'est d'une part du fait de l'échec incontestable de
l'enseignement mathématique tel qu'il est donné jusqu'à ce jour.
Et il l'est
aussi parce que cet enseignement n'a pas pu suivre le rythme accéléré des progrès
techniques, qu'il est désaxé et dépassé pour n'avoir pas su en temps voulu, opérer
les modifications de méthodes qui s'imposaient.
I. - ÉCHEC DE LENSEIGNEMENT DES MATHEMATIQUES DE
LÉCOLE MATERNELLE AUX CLASSES PRÉPARATOIRES AUX GRANDES ÉCOLES.
Nous empruntons les observations qui
suivent à un mémoire rédigé par M. Ph. Rogerie.
« Au
premier Congrès de la psychologie scolaire tenu à Sèvres en décembre 1949,
administrateurs, professeurs et psychologues réunis adoptèrent comme thème de
recherches la psycho-pédagogie des mathématiques.
Ce choix
fut plus ou moins constamment déterminé par deux faits.
C'est,
tout d'abord, l'importance de l'apprentissage des mathématiques, importance due à la
matière enseignée elle-même. De l'école maternelle aux classes préparatoires aux
grandes ,écoles les élèves se trouvent soumis à un entraînement, à une formation
ayant pour but de leur inculquer le maniement et l'essence des mathématiques. Instrument
de pensée permettant d'appréhender et de comprendre le réel sous l'aspect quantitatif
en même temps que de communiquer cette connaissance à autrui, les mathématiques
constituent aussi bien que la langue maternelle, moyen d'analyse et de communication
qualitatif, un enseignement de base.
Malheureusement,
on constate dans cet enseignement de nombreux et graves échecs.
Beaucoup
d'élèves restent absolument imperméables à cet enseignement, n'en tirant aucun profit,
n'en conservant qu'un mauvais souvenir et un mépris définitif à l'égard de tout ce qui
est chiffré, mesuré, raisonné. Les conséquences de ces échecs sont graves; les
mathématiques, en effet, ont pris une place de plus en plus grande dans la civilisation
et la culture contemporaines; de plus, les ignorer, c'est se priver d'habitudes de
pensée, de procédés de compréhension et de raisonnement infiniment précieux ».
Nous nous
trouvons donc en présence de la constatation par des personnes autorisées d'un grave
échec de l'enseignement des mathématiques au 1er et au 2e degré.
Chez
beaucoup d'élèves apparaît un trouble du comportement affectif qui se traduit par un
mépris définitif pour tout ce qui est chiffré, mesuré, raisonné. Ce trouble finit par
s'accompagner du blocage de toute activité scientifique. Il mériterait une analyse
minutieuse afin de mettre en évidence les facteurs de sa naissance et de son
développement. Néanmoins, dans les limites de ce rapport, je m'en abstiendrai pour me
contenter de signaler qu'il se développe progressivement dès l'entrée des enfants au
cours préparatoire.
Sans doute,
il n'atteint pas dès l'Ecole primaire l'acuité sous laquelle il se présente dès la
classe de 3e, cependant on peut en observer des prodromes nettement accusés
chez certains élèves dès qu'ils entrent au cours moyen et même dès la 2e
année du cours élémentaire. Ces prodromes se manifestent à ce moment surtout dans
l'ordre intellectuel avant de déborder dans le champ de l'affectivité.
Beaucoup d'élèves ayant acquis la
technique des 4 opérations ne savent pas les utiliser. Ils ne sont pas mis en possession
d'une méthode à leur portée, leur permettant de trouver facilement la nature et la
suite des opérations qui donnent la solution numérique des problèmes qui leur sont
posés, dès que ces problèmes portent sur des événements nouveaux ou même lorsqu'ils
sont énoncés en termes inaccoutumés. Au surplus, la structure mentale qui a été
conférée aux élèves par l'Ecole traditionnelle, s'oppose à ce qu'ils aient recours
aux tâtonnements (expériences tâtonnées, calculs de tâtonnements) qui pourraient les
amener au but cherché.
Les
réflexes dont ils sont dotés ne leur ouvrent pas de voie capable de les mener au
succès. Enfermés dans des constructions verbales coupées des réalités sensibles, ils
tendent à chercher exclusivement la nature des opérations à faire, dans les textes des
problèmes. C'est ce qui explique qu'en usant habilement des termes « reste »
et « non plus », on parvient à leur faire poser une soustraction là où il
fallait une addition et vice-versa.
Quant à la
détermination de la suite des opérations à effectuer, l'Ecole traditionnelle ne donne
également aucun moyen pratique pour la grande majorité des enfants. Certains pédagogues
préconisent les méthodes progressives ou régressives. Toutes les deux sont basées sur
la connaissance préalable des relations numériques qui constituent le but à atteindre
et non un point de départ.
Il est
facile de s'en rendre compte en posant aux élèves, des problèmes dont les solutions
reposent sur des relations inconnues d'eux comme ceux par exemple où il faut fragmenter
un ensemble connu d'objets, de choses ou d'étalons de mesure en deux ou plus de deux
parts inégales entre lesquelles existent des relations données (différences ou rapport
connu). Dans ce cas, et dans tous les cas analogues, les méthodes progressives et
régressives s'avèrent complètement inefficaces. Le fait est bien connu et on a dû
avoir recours aux graphiques qui traduisent en figures géométriques linéaires simples
les relations données dans les énoncés des problèmes en langage courant.
En fait,
les élèves, dans leurs recherches de cette suite d'opérations, se basent encore sur les
textes des énoncés.
Aussi, en
donnant à ces énoncés des formes inaccoutumées, on les met dans le plus grand
embarras.
Ajoutons
que même si l'on parvenait, auprès de tous les élèves, à leur faire déduire
d'emblée de l'énoncé des problèmes, la suite et la nature des opérations
arithmétiques à effectuer, c'est-à-dire, à tirer, de prime abord de ces énoncés, les
formules numériques donnant les solutions, il faudrait rechercher une autre manière de
faire ; car, munis de cette méthode verbale, les élèves resteraient impuissants
devant les problèmes, nécessairement sans énoncés, posés par les circonstances
inconnues des faits de la vie.
L'échec
subi par l'Ecole traditionnelle en ce qui concerne la question de la suite et de la nature
des opérations nécessitées pour la solution numérique des problèmes, est reconnu par
certains centres d'examens pour le moins, où l'on évite l'insuccès des élèves en
posant des questions intermédiaires qui précisent le point de départ, et jalonnent la
route d'accès à la question finale ».
Ph. Rogerie
II. - LE DÉCALAGE DE L'ÉCOLE PAR RAPPORT AU
MILIEU TECHNIQUE DE NOTRE ÉPOQUE.
Il est
catastrophique.
Il y a
cinquante ans à peine, on pouvait vivre très normalement sa vie sans qu'intervienne,
sauf à de très rares circonstances, la manie calculatrice qui a aujourd'hui envahi le
monde.
C'était le
temps où la montre n'était pas encore un outil indispensable, pas plus que la
connaissance élémentaire des éléments du calcul : le chronomètre n'était encore
qu'un outil de laboratoire ; les services publics qui nécessitent rétribution ou
paiement de tickets n'étaient encore embryonnaires ; le troc restait d'un usage
courant pour l'acquisition de certains produits de première nécessité. L'espace et le
temps avaient encore une dimension humaine que les I.B.M. ont aujourd'hui domestiquée et
annihilée.
C'était
l'époque paisible où les gens comptaient encore, comme à l'Ecole, avec des barres ou
des cailloux. J'ai encore vu au début du siècle, les joueurs de boules marquer les
points en entaillant une baguette, tout comme le faisaient les boulangers avec leurs
clients. Rares étaient les adultes qui savaient faire multiplications et divisions,
opérations qu'ils effectuaient d'ailleurs lorsqu'ils en avaient besoin, par des
procédés ancestraux à base d'addition ou de partage, curieusement semblables parfois à
certaines techniques des calculatrices électroniques.
Or, depuis,
et plus particulièrement au cours des dix dernières années, une véritable révolution
s'est produite qui change totalement les données des problèmes qui nous sont posés et
dont la solution rend urgente la modernisation de cet enseignement, objet de la présente
étude.
Les nombres
et les calculs sont désormais partout, à chaque heure de notre journée, à chacun de
nos gestes sociaux : de la flûte de pain qu'on achète, du chewing-gum au journal
illustré jusqu'au prix de l'essence et des tickets d'autobus, à l'achat des livres, au
chronométrage des exploits sportifs, au minutage des stations radio et télévision, le
nombre nous domine et il serait vain de penser que nous pourrons encore nous dégager de
son emprise.
Savoir
estimer et calculer, comparer fiches et nombres vérifier des comptes et opérer des
paiements deviennent de ce fait une inéluctable nécessité au même titre qu'apprendre
à lire et à écrire. Mieux encore : avec la radio et la télévision avec les
journaux et les livres qu'envahit l'image, un e peut fort bien s'adapter à son milieu
même s'il ne sait pas s'exprimer oralement ou par écrit. Il sera un infirme s'il ne sait
ni compter, ni calculer.
III. - MÉCANISMES ET INTELLIGENCE.
Dissipons
d'abord un grave malentendu, hélas ! presque universel.
Il y a
compter et compter comme il y a lire et lire.
Nous
n'appelons pas lire le fait de déchiffrer, c'est-à- dire de reproduire un son
correspondant au signe indiqué Il s'agit là d'un vulgaire conditionnement, qui réussit
ave certains animaux et qui peut avoir ses avantages technique et sociaux, mais qui n'est
pas lui-même un élément de culture et de progrès, qui peut être au contraire à
l'origine d'un avilissement et d'un abêtissement de l'individu.
Lire, c'est
d'abord comprendre la signification des signes écrits, quels que soient les processus de
la reconnaissance. Il y a des enfants qui parviennent à une lecture à peu près parfaite
sans avoir cependant dominé tous les mécanismes des éléments syllabiques. Mais
l'inverse n'est pas vrai l'acquisition mécanique est insuffisante s'il n'y a pas
compréhension intelligente.
Il en est
exactement de même pour le calcul. L'enfant peut déchiffrer, c'est-à-dire traduire les
signes ou compter automatiquement. Il ne saura pas calculer s'il n'y a pas compréhension
intelligente de la notion calcul.
Contrairement
à ce que prétendent parfois certains théoriciens, l'acquisition des mécanismes ne
prédispose nullement à la maîtrise calculatrice ; elle contribuerait plutôt à la
détériorer et à la paralyser. La culture mathématique au contraire prédispose à
l'apprentissage des techniques dont elle fait sentir la nécessité.
Dans ce
domaine comme dans beaucoup d'autres sans doute, on ne monte pas des mécanismes à la
culture ; on descend de la culture aux mécanismes. La reconnaissance de ces circuits
est un élément majeur de notre nouvelle pédagogie.
Autrement
dit, partir de l'apprentissage des mécanismes est une grave erreur de méthode dont
l'échec mentionné plus haut n'est que la juste sanction.
Un autre
argument en faveur de la priorité de la culture c'est que les machines peuvent ou
pourront faire l'économie de, l'apprentissage technique, elles ne remplaceront pas
l'intelligence ou la compréhension subtile qui sont à la base de la culture
mathématique.
On nous
avait fait croire que connaître la table de multiplication, savoir résoudre les quatre
opérations ou les problèmes élémentaires c'était le b a ba de
l'enseignement du calcul. Que deviendra l'Ecole, à quelle méthode aura-t-elle recours
si, un jour prochain des machines à calculer individuelles rendent inutiles la table de
multiplication ou la pratique des opérations ? Et la chose est fort possible. Elle
est en train de se réaliser sous nos yeux : les balances sont déjà
automatiques ; l'essence se paie au compteur ; les relevés du gaz et de
l'électricité sont établis par cartes perforées et demain - cela se fait déjà dans
diverses entreprises, - les relevés de salaires seront établis électroniquement. Il
suffira bientôt de savoir, comme les singes, encaisser et rendre la monnaie,
Les
ingénieurs sur le terrain sortent de leur poche une petite machine qui leur évite les
calculs complexes qu'ils avaient eu tant de mal à apprendre ; et le mathématicien
fait faire ses comptes par les I.B.M.
L'acquisition des mécanismes n'est qu'un accident dans la compréhension intelligente du calcul. Ce qui importe, et ce qu'il faudra donc cultiver en premier lieu, c'est le sens mathématique, résultat d'un long apprentissage à base de tâtonnement expérimental et de vie.
Il résulte
de cette constatation qu'il nous faut renverser radicalement les facteurs de la culture
mathématique.
L'apprentissage
mécanique, qui remplit encore les manuels scolaires et qui fait l'objet presque exclusif
des leçons scolastiques n'est que secondaire et ira s'amenuisant au fur et à mesure que
se développe la technique des machines à calculer ; tout comme s'amenuise jusqu'à
disparaître un jour prochain l'apprentissage du pédalage dépassé par l'envahissement
des vélomoteurs.
Je sais
bien que, en attendant, il sera nécessaire d'apprendre le pédalage avec le moins de
peine possible, comme il sera nécessaire d'apprendre les mécaniques et nous nous en
préoccupons. Nous avons même la prétention d'affirmer qu'avec nos méthodes naturelles
cet apprentissage se fait, sinon aussi vite, du moins avec une profondeur et une sûreté
qui lui donnent une valeur supérieure.
C'est parce
que nous savons que nous touchons là à une question de bon sens mais qui, comme la
plupart des questions de bon sens, est trop simple pour être admise par ceux qui se
piquent de culture que nous revenons encore sur notre démonstration.
Il y a
trente ans, nous avions besoin de connaître les pièces de notre moteur automobile, et
nous avions avec nous des guides techniques pour réparer les pannes, même s'ils ne nous
étaient pas souvent d'un grand secours. En ai-je démonté des carburateurs dont les
gicleurs étaient bouchés, des delcos et des condensateurs grillés, et des pneus !
Je ne connais plus rien aujourd'hui de cette science de dépanneur et les titulaires
récents de permis de conduire en savent moins encore que moi.
Ces
connaissances, naguère élémentaires et indispensables sont devenues inutiles puisqu'il
n'y a pratiquement plus de panne et que, s'il y en a une, on a plus vite fait d'avoir
recours au mécanicien voisin ou à Police-Secours.
Cette
évolution est très caractéristique dans les bureaux de comptabilité.
La qualité
première d'un comptable était il y a dix ans à peine, qu'il sache compter vite et
juste, en jonglant avec les nombres et les signes, On ne demande plus aujourd'hui au
comptable s'il sait faire rapidement une opération sûre mais s'il manie avec dextérité
sa machine à calculer et s'il a une vision et une compréhension méthodique des
problèmes posés par les opérations intervenues.
Et il y a
aussi cette autre question de bon sens qui devrait être décisive si les adultes étaient
encore sensibles à l'expérience.
On dit en
médecine que les acides chassent le calcium.
On peut
dire également pour le calcul que la mécanique chasse la compréhension intelligente.
Le nombre,
servi par l'automatisme procure aux enfants une réussite relativement facile, et qui fait
illusion. Les parents ne s'inquiètent jamais auprès de leur enfant : « As-tu
compris ? Sais-tu exercer ton intelligence pour te tirer d'affaire dans telle
situation de la vie ?... », mais : « Sais-tu compter jusqu'à 50 ou
100 ? As-tu retenu ta table de multiplication ? Sais-tu faire les
soustractions ? ». Je m'informais auprès d'une fillette de cinq ans et demi
qui venait de quitter notre école si elle savait calculer et faire les opérations. Elle
me répond : « Non pas encore, nous sommes au nombre 29 ».
Évidemment,
l'enfant qui est victime d'une telle conception de calcul se persuade de ce fait que
l'élément majeur de cette discipline c'est la manipulation des nombres. Comment n'en
serait-il pas persuadé alors que les parents, par tradition n'ont pas d'autre perspective
et que l'instituteur consacre aux nombres la presque totalité de son temps. Et les
examens ne consacrent-ils pas avant tout cette « science » ? Pourquoi les
uns et les autres modifieraient-ils leurs pratiques au profit d'un enseignement délicat
dont on ne peut jamais mesurer le rendement et qui ne vous apporte aucune immédiate
certitude.
Le
résultat en est que les enfants sauront peut-être compter parfaitement, faire les
opérations, résoudre mécaniquement certains problèmes, mais sans qu'ils fassent la
moindre liaison entre ces acquisitions et la notion individuelle et sociale du calcul. Un
divorce s'établira qui risque d'être définitif. Les enfants ne retrouveront plus le
sens arithmétique. Ils en seront comme infirmes.
Qu'on ne se
méprenne pas : nous ne prétendons nullement que le calcul mécanique soit sans
importance. Il est l'expression du sens arithmétique, comme les notes sont l'expression
écrite du sens musical. Mais le calcul mécanique fonctionnera à vide ou à contresens
s'il n'est pas mû et motivé par la conception vivante et intelligente qui sera notre
base de départ et sans laquelle il ne saurait y avoir de culture arithmétique.
*
Le
problème se trouve dès lors logiquement posé et notre souci pédagogique
précisé :
1° - Si,
pour les raisons, à notre avis majeures, que nous avons données, l'essentiel dans
l'enseignement du calcul doit être avant tout la culture du sens mathématique à même
la vie, nous devrons étudier expérimentalement comment, par quelle méthode, sur la base
de quelles techniques, nous devons aborder et conduire cet enseignement.
Il s'agit
d'un aspect tout nouveau du problème, dont on s'est fort peu préoccupé jusqu'à ce jour
puisque l'accent était mis en permanence sur les acquisitions mécaniques. Le mouvement
de l'Ecole Moderne est peut-être le seul à pouvoir présenter, avec les résultats
éprouvés d'une longue expérience, une méthode naturelle de calcul efficiente.
2° - Nous
n'aborderons qu'ensuite le problème à notre avis secondaire de ces acquisitions
mécaniques. Nous n'avons rien de spécial ni d'original à apporter, sauf que nos enfants
sensibilisés et activés par la culture mathématique que nous avons abordée auront le
souci, le désir, le besoin de dominer bien vite ces mécanismes pour aller de l'avant.
Une
méthode, même insuffisante, devient bonne, et même excellente quand les enfants
l'abordent avec dynamisme et élan.
Vous
trouverez dans les centaines de livres et de manuels se rapportant à cet enseignement une
variété suffisante techniques et de procédés auxquels vous pourrez vous référer.
Nous dirons simplement dans un prochain chapitre comment les fichiers
auto-correctifs facilitent les acquisitions qui, dans les données actuelles de
l'Ecole restent indispensables.
Le mot a
fait fortune comme se sont imposées déjà à la pédagogie les notions de texte libre,
de journal scolaire de correspondance, de plans de travail, de conférences, de dessin
libre que nous avons mises à l'honneur.
Nous
introduisons de ce fait une donnée nouvelle un levain - dans le circuit de la
vieille pédagogie. Nous voulons, nous, que ce levain y joue pleinement son rôle pour
faire lever la pâte.
Mais il est
des pédagogues qui, sans contester les vertus de ce recours à la vie, voudraient bien
n'y faire appel que comme à un timide adjuvant, comme à un complément nouveau à
l'ancienne pédagogie.
C'est ainsi
que M. Ischer, directeur des Etudes Pédagogiques à l'Ecole Normale de Neuchâtel, en
Suisse nous écrivait :
« On
n'apprend pas l'arithmétique par les problèmes de vie mais dès qu'une notion est
assurée, on l'exerce et on la répète par des problèmes de vie ».
1
M. Ischer considère donc ici l'acquisition des mécanismes qui n'ont que faire en effet des problèmes de vie. Mais quelles sont ces notions assurées ou à assurer ? Et n'est-ce pas d'abord le milieu ambiant qui doit nous fournir les éléments de calcul, et donc poser les vrais problèmes, porteurs des seules notions qui méritent d'être étudiées ? Hors de cette expérience vivante, il n'y a que mécanismes et conditionnements et nous en avons dit les dangers.
C'est
toujours le même différend dont nous avons déjà débattu dans notre brochure sur
l'enseignement des sciences (B.E.M. n° 11 - 12). Il y a deux tendances :
- La
scolastique qui présente aux enfants des règles, des principes et des lois qui
sont comme préétablis, sûrs et définitifs et qu'on doit admettre en tous cas comme les
dogmes que l'Eglise place à l'origine de toute foi.
Tout ce
qu'on peut dire, c'est que le procédé n'est nullement scientifique mais plutôt
dogmatique et que nous nous méfions du dogme, ne serait-ce que pour la déplorable
habitude de servitude qu'il imprime aux esprits.
Les
scolastiques disent donc, en sciences comme en calcul : voici les lois à admettre et
à apprendre ; nous allons maintenant pourvoir aux exercices et aux expériences qui
vous permettront d'en saisir la portée.
La sanction
de cette erreur est immédiate : les enfants ne se plient que de très mauvaise
grâce à ces obligations ; ils n'entrent qu'à regret dans cette maison qui n'est
pas la leur puisque c'est vous qui en avez choisi l'emplacement et monté les murs.
C'est comme
si vous disiez à votre enfant enthousiaste devant le bout de champ qui lui est
échu : « Voici ton jardin. Je vais le bêcher, y planter pommes de terre et
salades car tu ne saurais pas le faire selon les règles ; tu les soigneras et les
arroseras pour les faire pousser ». On ôte à l'enfant ce qui justement le
passionne comme étant à l'origine de la création et de la vie.
-
La méthode naturelle rétablit les
processus normaux. Aucune règle imposée d'avance, mais observations et expériences à
même la vie, problèmes posés dont nous chercherons ensemble les solutions et qui, à
travers l'inquiétude salutaire susciteront la recherche des principes et des lois.
Nous savons
que, pour convaincre les scolastiques au bien fondé de telles pratiques, il nous faudra
d'abord leur faire admettre la supériorité des processus de tâtonnement expérimental
sur une pseudo, science qui autorise, prépare et entretient des techniques scolaires
abêtissantes et mortes. C'est une question que nous continuerons à étudier dans notre
revue Techniques de Vie, au cours de nos colloques et de nos Congrès.
Les
pratiques sont suffisamment connues ; elles s'étalent dans des milliers de manuels
scolaires ; elles nous ont endormis et égarés. La démonstration est suffisante.
Il nous faut chercher mieux.
Nous
montrerons, dans la deuxième partie de cette étude, le cheminement et les techniques de
la méthode naturelle de calcul. C'est par l'expérience pratique que nous mesurerons la
valeur des théories.
D'une
précédente publication de l'Ecole Moderne, nous extrayons cette excellente présentation
par M.Beaugrand, de quelques principes de la méthode naturelle de calcul :
« La
pensée n'acquiert sa valeur que par sa lutte avec le réel ».
Quels buts
visons-- avec notre méthode de calcul ?
Quand
sommes-nous satisfaits ?
Il nous
semble que nous avons atteint notre but quand, face aux problèmes, dans la majorité des
cas, la majorité de nos élèves donnent une réponse aussi rapide que sûre, comme si
leur esprit était tout à coup illuminé d'une lueur fulgurante.
C'est ce
que nous appelons l'intuition mathématique.
Qu'est-ce
que l'intuition mathématique ?
Est-ce
essentiellement un phénomène mystérieux qui se situe en dehors de la nature ?
Ou bien au
contraire est-elle le couronnement du travail de chacun et aussi des générations
précédentes ?
Dans ce
cas, comment la cultiver ?
Quelle est
la part du maître ?
Quelle est
la part de l'élève ?
Si
l'intuition mathématique -l'intuition en général - présente des caractères
mystérieux, elle n'en est pas moins, nous disent les psychologues, et l'expérience
semble nous le prouver, le résultat de tout travail conscient et inconscient.
« Si
l'on trouve sans chercher, c'est qu'on avait cherché sans trouver ».
« Le
travail inconscient, écrit Poincaré, n'est possible et, en tous cas, n'est
fécond que s'il est d'une part précédé et d'autre part suivi d'une période de travail
conscient ». Ces inspirations subites - et les exemples que j'ai cités le
prouvent suffisamment - ne se produisent qu'après quelques jours d'efforts volontaires
qui ont paru absolument infructueux et où l'on a cru ne rien faire de bon, où il semble
qu'on a fait totalement fausse route.
Il me
semble que nous, instituteurs, nous avons trop tendance à attendre du travail conscient
des résultats immédiats et à ne pas miser suffisamment sur le travail inconscient. Les
témoignages des grands mathématiciens prouvent que les éclairs d'intuition se font
souvent longtemps après les recherches conscientes, alors qu'ils sont parfois
découragés par leur insuccès. C'est que, entre ce travail conscient et l'éclair
d'intuition, il s'est produit dans leur esprit un lent travail de décantation et de
maturation.
Mais il
semble bien que ce travail inconscient, davantage que le travail conscient, ne peut se
faire sans une adhésion de l'individu, avec renouvellement de cette adhésion aux moments
où la recherche quitte pendant quelques temps l'inconscient pour le conscient.
Comment
donc obtenir de l'enfant une participation, sinon totale du moins partielle, à ce travail
de recherche ?
- En
libérant son esprit des soucis et de la peur des notes, compositions, classements, de la
peur du maître et des camarades.
- En lui
faisant sentir plutôt qu'en lui expliquant que ce travail est indispensable parce qu'il
nous arme dans la lutte pour la vie. Le calcul tel que nous le concevons, qui consiste à
résoudre les problèmes que nous posent notre milieu et le monde en général, y concourt
autrement bien sûr, que les problèmes des manuels.
- En lui
faisant sentir que cette recherche est exaltante, qu'elle satisfait le besoin de
dépassement qui est, plus ou moins apparent, en chacun de nous.
C'est donc
un climat qu'il faut créer dans la classe, comme nous avons créé un climat d'expression
libre.
Si le
maître sait se décontracter, s'il est, sans l'afficher, un exemple de dépassement, s'il
sait utiliser l'enthousiasme de ses élèves les plus doués, la majorité de la classe
sera vite gagnée.
Mais il est
indispensable que notre école soit, là comme ailleurs, l'école de la réussite et non
l'école de l'échec, Pour que chaque enfant fasse son chemin, il faut d'abord l'aider à
trouver les pistes qui lui conviennent.
Aussi
évitons-nous les longues analyses systématiques qui imposent à tous la même piste et
attachons-nous une grande importance à l'abondance et à la variété des histoires
chiffrées et des brevets.
Entendons-nous
bien : nous ne rejetons pas les analyses un peu poussées qui sont les réponses aux
« pourquoi » et aux « comment » sans lesquels il n'y a pas de
véritable formation de l'esprit.
Les films
au ralenti nous permettent de mieux saisir le saut d'un cheval ou la foulée d'un coureur.
De même, les analyses méthodiques des problèmes mettent en lumière la démarche de la
pensée et par là aident les techniques. C'est indispensable. Mais ne soyons pas ces
cinéastes qui abuseraient des films au ralenti dans leurs programmes.
Il va sans
dire que nous nous élevons contre l'analyse par leçons dogmatiques du maître qui
aboutissent à des raisonnements types que tous les élèves doivent obligatoirement
employer.
Nous nous
étions rabattus, faute de mieux, sur le dialogue maître-élèves, le maître
interrogeant, les élèves répondant. Freinet a longuement montré, au cours de ses
ouvrages, combien cette méthode est nuisible au développement mental de l'enfant. En
face d'un adulte qui donne l'impression de tendre des pièges, l'enfant se sent diminué,
quelquefois humilié et, souvent il perd ses moyens.
C'est notre
ami Bersol qui, le premier, a eu l'idée d'une méthode vraiment dans l'esprit de l'Ecole
Moderne. Avec ses petits du Cours Préparatoire, il applique la méthode des exposés que
nous utilisions dans les autres enseignements mais que nous n'avions pas l'idée
d'appliquer au calcul. En face d'un problème, les élèves réfléchissent, puis les
volontaires viennent tour à tour au tableau, craie en main, exposer leurs procédés de
résolution. Questions des autres. Critiques.
Ainsi, jour
après jour, tout naturellement, le maître suit la formation de l'esprit chez ses
élèves.
Et c'est
une joie pour les enfants que de rechercher et d'offrir à leurs camarades tout un
éventail de techniques parmi lesquelles chacun peut choisir, ce qui facilite ses
tâtonnements, lui permet d'acquérir un style personnel.
Ainsi nos
élèves entrent dans le domaine de l'invention mathématique.
Notre
processus est le même que celui des adultes en face d'un problème scientifique ou
mathématique :
1° -
Recherches personnelles caractérisées par un souci d'économie et d'originalité.
2° -
Travail collectif de confrontation des différentes solutions avec exposés, critiques et
choix.
3° - Amélioration de la solution choisie :
- par le travail personnel d'abord,
- par le
travail collectif ensuite.
4° -
Généralisation.
Nous
insistons : éviter les généralisations hâtives et systématiques.
En calcul
comme en lecture, comme en sciences, faire des rapprochements et des analogies tant que
l'enfant n'a pas effectué un nombre suffisant d'expériences, c'est aller à rebours de
la formation de l'esprit.
Résolvons
donc beaucoup de problèmes vivants, observons les démarches de la pensée chez nos
élèves. Et ne soyons pas pressés. Le souci d'économie amènera vite les plus doués à
classer les faits mathématiques, à essayer de dégager des lois. Le maître aidant, les
autres prendront aussi le chemin des principes et des formules.
Nous ferons
alors par exemple des séances de synthèse au cours desquelles nous rechercherons, dans
la multitude de nos histoires chiffrées, celles qui renferment la même notion, nous
efforçant de dégager ce qu'elles ont de général et de particulier.
Nous
verrons que les brevets provoquent tout naturellement ces séances de synthèses
indispensables.
Plus de ces
conditionnements comme nous en voyons encore : chaque fois que tu vois « de
plus » tu additionnes, chaque fois que tu vois « de moins » tu
soustrais... Plus de formules apprises par cur.
Avec des
élèves à l'esprit ouvert, elles viendront en leur temps, et alors elles se graveront
dans la mémoire.
Nous allons
essayer de donner quelques exemples
Dans notre
classe, des enfants de 8-9 ans, formés suivant notre méthode de calcul, se trouvaient
pour la première fois en présence d'un champ en forme de trapèze. Ils ne connaissaient
pas la formule du trapèze. Ils n'ont pas eu recours au manuel. Ils se sont débrouillés,
transformant le trapèze en rectangle. Il a été facile, après plusieurs cas semblables,
de leur faire trouver la formule.
Tout
dernièrement, j'ai eu la surprise de voir ces mêmes enfants, âgés maintenant de 11-12
ans, découvrir seuls la fameuse règle de fausse supposition.
La part du
maître prend parfois un aspect bien particulier. Un jour, dans je ne sais plus quel
problème pratique, ils avaient à calculer un angle dans un triangle dont ils
connaissaient déjà les deux autres angles. Je les arrête :
-
Ne cherchez pas, c'est... tant.
Ils
mesurent. C'est exact.
-
Comment qu'vous faites ?
-
Tracez un autre triangle... etc...
Je leur explique que la somme des trois angles dun triangle est toujours de 180°. Ça leur paraissait bizarre.
-
Et si on fait deux tout petits angles
-
Et si on en fait un tout tout grand ?
Ils sont
restés longtemps après l'heure, traçant sur les tableaux les triangles les plus
invraisemblables, mesurant les angles, car ils voulaient à tout prix trouver des
exceptions pour faire crouler la règle. Ils se sont finalement inclinés, sportivement.
Inutile de dire qu'ils se rappellent et se rappelleront toute leur vie, on ne le leur
demande pourtant pas, que la somme des trois angles d'un triangle est 180°.
Qu'on ne
nous fasse surtout pas dire que nous voulons tout faire passer par la redécouverte. Quand
l'enfant généralise spontanément, nous ne le freinons pas, bien au contraire.
Et vers
douze ans, alors que les Instructions nous demandent d'aborder les problèmes
concrètement, nous allons plutôt au contraire vers l'abstraction parce qu'à ce
moment-là l'esprit de l'enfant est mûr pour cela. Et il nous arrive de temps en temps,
avec nos meilleurs élèves d'avoir recours à l'algèbre pour résoudre des problèmes
difficiles, ce qui les enthousiasme.
M. Beaugrand
VIII. - LES
ACQUISITIONS MATHÉMATIQUES SONT-ELLES TOUJOURS MESURABLES ?
Un scolastique qui se dit matérialiste nous écrit :
« N'est
scientifique que ce qui est mesurable ».
Nous dirons
ailleurs l'erreur d'une pareille conception. Ce que nous pouvons affirmer aujourd'hui
c'est que cette prétentieuse manie de la mesure compromet à tous les degrés, et pour
toutes les disciplines, le déroulement normal de nos efforts éducatifs.
Les
mécanismes se mesurent. Cette mesure est beaucoup plus difficile, souvent impossible
quand nous parlons compréhension, réflexion, invention et création, toutes vertus qui
donnent à l'esprit une envolée que ne suscitent jamais les exercices formels de l'Ecole.
Dans une
école où la mesure est reine, on n'en a pas moins tendance à considérer qu'est sans
valeur tout ce qui ne peut pas être matérialisé sur un cahier, assorti d'une note ou
d'un diplôme. Si on ne peut mesurer les progrès subtils en mathématiques, qui pourra
nous assurer qu'ils existent, que donc maîtres et élèves ont travaillé comme ils le
doivent et que surveillance, contrôle et examens ont dûment fonctionné conformément
aux règlements.
Certes,
pour que la conception mathématique que nous préconisons puisse se généraliser, il
faudra renouveler le sens même et l'esprit de notre éducation, trouver d'abord, pour
maîtres et élèves un travail nouveau qui les enthousiasme et qui nous procure donc de
ce fait l'assurance que les uns et les autres donneront leur maximum sans surveillance
soupçonneuse.
Il faudra
reconsidérer totalement les examens à tous les degrés car, évidemment, tant qu'ils
contrôleront seulement des acquisitions formelles et des mécanismes sans référence à
l'éveil de l'esprit, à la mobilisation de l'intelligence, à la subtilité d'une
culture, l'Ecole en sera réduite à contrôler ce qui se mesure, et l'Inspecteur assurer
à son tour ce qui est demandé par les examens.
Il y a
l'esprit à changer mais aussi d'abord les techniques. Si les psychologues - en
collaboration avec les enseignants combinaient leurs études ou leurs travaux pour mettre
sur pied un matériel nouveau d'examen à tous les degrés avec tests, travaux effectifs,
épreuves d'intelligence et de culture, ils aideraient à modifier du même coup les
techniques de travail et de contrôle dans les classes. On ne ferait plus passer alors
l'accessoire avant l'essentiel.
L'erreur
est peut-être plus manifeste encore pour le calcul que pour les autres disciplines à
cause de l'antithèse technique qui a cours entre les mécanismes qui est conditionnement
et l'esprit qui est culture.
Nul en
effet ne connaît encore, expérimentalement et scientifiquement, les processus du calcul
mathématique, et nous en parlerons nous-mêmes selon notre expérience et notre intuition
plus que par des références sûres à des travaux qui, à notre connaissance, n'ont pas
encore été amorcés.
On croit à
l'Ecole que l'enfant avance mètre après mètre, comme le géomètre qui mesure le
terrain. On l'accusera de perdre son temps ou même de tricher si, dédaignant les chemins
depuis longtemps tracés et obligatoires, il franchit d'un saut les murs qui contournent
les sentiers et s'il s'engage à une allure folle dans les raccourcis jugés
inaccessibles.
Nous en
revenons toujours à l'histoire de la bicyclette.
La
scolastique enseigne que l'on ne saurait enfourcher le vélo avant d'avoir acquis
méthodiquement et scientifiquement la maîtrise des éléments qui, selon les
professeurs, autorisent cette sûre marche à vélo. Il faut évidemment, selon eux,
savoir pédaler, et pour cela procéder à de multiples exercices qui sont d'autant plus
profitables, prétendent-ils, qu'ils sont ennuyeux et morts. Pour la rectitude des
exercices on procèdera, comme cela se doit, avec un vélo sur cale qui obéisse, sans
influence extérieure, aux règles scolastiques. Après quoi on enseignera par leçons
théoriques habilement étudiées les principes fondamentaux de l'équilibre et des gestes
qui assureront une direction sans faille.
Alors
seulement le professeur autorisera son élève à enfourcher un vélo véritable, et il
aura la satisfaction de voir l'apprenti partir avec une assurance plus que scientifique,
ce qui est, pensera-t-il, le résultat tangible de l'excellence de sa méthode. Si nous
osons lui dire que jamais un enfant ne parviendra à rouler à vélo avec une telle
méthode, il invoquera l'expérience concluante.
Illusion
aveugle du scoliastre qui ne veut rien voir hors des quatre murs de sa classe. Car, qu'y
aurait-il vu ?
Après la
leçon magistrale écoutée d'une oreille distraite, et répétée du bout des lèvres,
après un exercice inutile, l'enfant, a retrouvé la vie. Sur le bord du trottoir la
bicyclette d'un camarade attendait. L'enfant l'a enfourchée et a commencé son
apprentissage comme commencent tous les apprentissages, par tâtonnement
expérimental : il s'est placé prudemment face à une descente ; il est monté
en selle comme il a pu et s'est élancé vers le point de chute prévu d'avance au bord du
fossé.
Il a
recommencé pour aller tomber un peu plus loin. Au bout de quelques exercices vivants de
ce pur tâtonnement expérimental, sans explication ni leçons méthodiques, il a, en un
temps record, appris à rouler à bicyclette. Et comme il l'a appris par une méthode
naturelle, il ne l'oubliera plus jamais.
S'il est
suggestionnable, il pensera peut-être aux démonstrations logiques de son professeur, à
cet aspect théorique de l'équilibre dont il n'a pas compris les arguments, et son
apprentissage en sera gêné. Heureusement, Il trouvera sur sa route quelque camarade qui
lui dira prudemment :
- Ne pense
pas à ton équilibre, ne regarde ni ton guidon, ni ta roue... Laisse-toi aller ; ça
vient tout seul !
Le sens
mathématique, comme l'équilibre s'affirme lui aussi tout seul, sans leçon soit disant
méthodique, ou du moins, c'est le procédé habituel de cet apprentissage qui est faux et
qu'il nous faut dépasser.
Comme
l'art, comme la poésie, comme l'invention, le calcul procède non par paliers
méthodiques mais par bonds, non par croissance régulière mais par explosion et
éclatement ; non par une analyse des progrès acquis mais par une sorte
d'illumination qui, tout d'un coup, change l'atmosphère ambiante et le climat où sont
possibles alors de fulgurantes conquêtes.
Voyez
d'ailleurs l'enfant en train de calculer. S'il s'agit seulement de mécanique, il répète
automatiquement, l'être absent de l'opération. Mais s'il s'agit d'aborder la notion de
nombre, vous le voyez se concentrer, prêt à faire fonctionner en lui, des circuits dont
nous ne connaissons encore ni la genèse, ni le comportement. Et tout d'un coup surgit la
réponse, exacte ou approchée, selon qu'a plus ou moins bien fonctionné le circuit
secret.
Cette
différence de méthode sera plus particulièrement sensible avec des enfants qui ont à
résoudre un problème complexe. S'ils ont été formés selon les méthodes scolastiques,
ils déclencheront le mécanisme opérationnel et, selon l'entraînement qu'ils auront
subi, feront additions, règles de trois ou pourcentages, jusqu'à parvenir à des
résultats qui sont parfois hors de tout bon sens. Vous ne les verrez pas s'émouvoir si,
selon leur calcul, une auto vaut trente millions, Ce sont les chiffres seuls qui ont
parlé, sans intervention majeure des zones intelligentes de l'individu.
L'enfant
qui a travaillé selon une méthode naturelle fera fonctionner d'abord les subtils
circuits intelligents et sensibles. Vous le verrez se concentrer et réfléchir sans oser
s'aventurer à poser une opération tant qu'il n'a pas compris. Et cette compréhension
vient tout d'un coup, comme une lumière qui jaillit et qui éclaire la route. A partir de
cette illumination tout est simple, et, à une vitesse incomparable, l'enfant met au net,
avec sûreté, la solution du problème.
C'est cette
différence de processus, c'est l'usage de circuits tout à fait distincts, c'est ce
principe de l'illumination que les psychologues devraient s'appliquer à étudier afin de
normaliser un jour prochain les techniques d'enseignement du calcul.
Cette
mystérieuse question des processus électroniques de compréhension mathématique est
liée au problème tout aussi délicat de l'abstraction.
A l'Ecole,
l'enfant compte trois doigts, cinq feuilles ou huit bûchettes, le nombre étant toujours
lié à l'élément à compter.
Or, le calcul ne prend véritablement son envol que lorsqu'il est comme débarrassé de sa gangue matérielle, qu'il est abstrait de ce qui est pour devenir le nombre indépendant du milieu et des éléments, et qui va poursuivre comme une destinée autonome, propre à toutes les audaces et aux plus hardies combinaisons.
Qu'est-ce
donc que cette abstraction ? A quel moment apparaît-elle dans les processus
d'acquisition ? Quels en sont les avantages et les dangers ? Faut-il en hâter
le manifestation ou s'attarder au contraire au concret qui en serait l'antithèse ?
De la
réponse que nous pourrons faire à ces questions dépendra l'orientation même de notre
méthode pédagogique. Essayons donc d'y voir clair, avec un maximum de bon sens.
*
Bon gré,
mal gré, on s'est rendu compte de ce qu'avait de mécanique - donc de non éducatif -
l'apprentissage scolastique des nombres et des opérations. L'enfant pouvait fort bien
compter jusqu'à cent sans avoir seulement la notion du nombre trois - tout comme il
répéterait cinquante mots grecs étudiés selon le même procédé. Il fait une addition
difficile sans que l'effleure la pensée qu'il pourrait y avoir un rapport entre cette
opération et des réalités similaires de la vie.
Les éducateurs sentaient bien que c'est là une faiblesse de leur système difficile à dominer et ils y ont cherché un correctif.
Puisque
l'enfant n'identifie pas le nombre et la réalité, faisons-le compter et calculer sur des
éléments de cette réalité, concrétisons notre enseignement. Au lieu d'ajouter 3 et 5,
ajoutons 3 bûchettes et 5 bûchettes. Au lieu de multiplier 350 par 4 calculons 4 fois
350 francs.
Cela fait
bien dans les livres où l'on a accumulé signes abstraits et concrets, séparés ou
réunis selon la fantaisie des leçons par des traits en couleur ou des accolades, ces
béquilles inutiles qui nous obsèdent comme des mutilations.
Conscient
de l'impuissance de l'enseignement mécanique, hésitant devant le recours à un subtil
circuit de vie, on a eu recours à une sorte de troisième force, qui n'est qu'un ersatz
de l'un et de l'autre, et qu'il nous faut aujourd'hui dépasser.
Qu'elle est
la part de l'abstrait et du concret dans un apprentissage naturel et normal du
calcul ?
Il serait
intéressant pour le savoir de considérer quelle serait la démarche d'un individu qui
n'aurait pas été influencé, ni déformé, par des pratiques scolastiques.
Cet
individu partirait naturellement du calcul vivant parce qu'il n'aurait encore aucun
exemple de nombres foncionnant indépendamment de ses besoins de vie. Il ne lui viendrait
pas à l'idée, pour mettre le couvert de compter 1, 2, 3, 4, 5. Il comparerait
intuitivement le nombre d'assiettes au nombre de couverts ; vous verrez ses yeux
aller des assiettes aux personnages à servir. Il n'aurait pas à définir le nombre 4
mais, par tâtonnement expérimental les rapports correspondants s'inscriraient dans son
esprit pour servir le cas échéant dans des données similaires. Ainsi le nombre prend
corps, comme prennent corps les couleurs correspondantes à certaines données de
l'expérience.
L'abstraction, c'est-à-dire l'utilisation indépendante de signes découlant de ces rapports sera une démarche naturelle du tâtonnement expérimental. Mais, ainsi « abstrait » le nombre restera cependant chargé des éléments vivants qui en ont assuré la genèse. L'abstraction sera non point une opération scolastique mais une réalité liée au comportement de l'être.
Dans tous
les domaines l'individu fabrique de l'abstrait, mais il ne me fabrique point à partir du
concret, et pas davantage en vertu d'un don particulier d'abstraction, mais par une
opération naturelle de déviation des rapports, fruit de l'expérience.
Et on
remarquera d'ailleurs que ce sont justement les enfants qui ne sont pas suffisamment
sensibles à l'expérience - qui ne sont donc pas suffisamment intelligents - ceux dont
l'expérience, trop longue à aboutir au premier degré, ne se hausse jamais à la
complexité du deuxième degré, qui sont les plus rebelles à l'abstraction, fruit normal
du tâtonnement expérimental.
S'il en est
ainsi - et la question vaudrait d'être longuement étudiée sous cet aspect - il nous
faudrait partir exclusivement du calcul vivant, mais d'un calcul qui ne soit pas seulement
le nombre et les mécaniques appliqués aux choses de la vie, mais qui susciterait
l'établissement de relations qui trouveront plus tard leur expression dans le nombre.
Il serait
donc illogique et antipédagogique de partir du comptage abstrait ou concret, tel qu'on le
pratique dans la plupart des écoles.
Mais le
comptage que nous pourrions dire vivant ne nous paraît pas davantage une solution
idéale. Compter les pages à imprimer, le nombre de poules du poulailler, mesurer les
dimensions de la classe ou du bassin est certes un progrès sur le comptage mécanique
parce qu'il est plus ou moins motivé. Mais je persiste à penser qu'il faudrait partir
davantage des éléments réels de la vie, selon les processus du tâtonnement
expérimental. Créer, ajuster, deviner, estimer, comparer, voilà les fondements
véritables du calcul, dont on ne voit pas tout de suite les effets il est vrai. L'enfant
regarde, réfléchit, ferme les yeux parfois et, par des processus encore mystérieux,
trouve une solution qui n'est peut-être qu'approchante mais qui ira se précisant à
mesure que se diversifient et s'entrecroisent les expériences.
Calculer en
fermant les yeux, c'est peut-être bien la première étape de cette abstraction.
Ne nous
pressons donc pas d'enseigner les nombres aux enfants mais habituons-les à comparer et à
estimer en fermant les yeux. Les nombres leur apparaîtront peu à peu comme dépouillés
certes, mais chargés cependant de signification vivante. L'abstrait ne sera pas
obligatoirement abstrait du milieu.
Peut-être
faudrait-il prévoir et réaliser un matériel d'expérimentation et d'étude du calcul
qui satisfasse tout à la fois aux exigences de l'abstrait et du concret ?
C'est ce
que prétend réussir le matériel Cuisenaire des nombres en couleurs.
Selon notre
raisonnement ci-dessus, il est exact que la matérialisation sous forme de réglettes
ajoute une première dimension aux comparaisons nécessitées par notre apprentissage ;
les couleurs sont une autre dimension et qui pourrait être d'une portée considérable,
parmi les dimensions complémentaires qu'une pédagogie vivante pourra mettre à la
disposition des enfants.
Mais à
notre avis, l'usage de ce matériel n'irait pas au-delà de cette étude subtile des
rapports dans des classes plus ou moins dépourvues d'expériences vivantes.
L'erreur
est de croire que l'usage mécanique de ce matériel peut préparer autrement les enfants
tout à la fois au comptage et à l'abstraction, dans un climat de questions et de
réponses tout chargé de scolastique.
Comment ne
serions-nous pas inquiets à ce sujet quand nous lisons sur les brochures d'emploi des
questions qui ne le cèdent en rien à celles des manuels. Mettez deux réglettes bout à
bout... Maintenant, prenez-en une plus petite et trouvez ce qu'il manque.
Pour cet
usage réduit - et qui n'est pas sans valeur nous avons édité nous-mêmes un Matériel
Camescasse composé de cubes systématiques de 1 cm d'arêtes et avec lesquels l'auteur
résolvait et matérialisait des problèmes très abstraits. Mais ce matériel, au degré
primaire du moins, nécessite la direction permanente du maître. Il peut être un
matériel scolaire de valeur, tout comme le matériel Cuisenaire. Il ne permet pas de
résoudre à notre satisfaction les problèmes de la compréhension arithmétique et de
l'abstraction.
Dans un
livre de Gattegno : « Le matériel pour l'enseignement des
mathématiques » (Ed. Delachaux et Niestlé), nous trouvons d'ailleurs une
mise au point excellente de ce souci de recherche de l'abstraction.
« Il
est vain de rechercher une première abstraction, que ce soit dans l'ordre logique, dans
l'ordre psychologique ou dans l'ordre historique. Quand se pose le problème de
l'abstraction, nous sommes déjà en possession d'abstractions nombreuses sans lesquelles
nous ne saurions formuler ce problème. La question est moins de savoir ce qui est
l'abstrait en soi que de saisir comment nous progressons dans l'abstraction ».
Ces
considérations vont nous être plus précieuses encore quand nous aborderons
l'enseignement du calcul avec nos élèves du CE au FEP.
Vivant, à
ce degré, ne signifie pas forcément le nombre encastré plus ou moins artificiellement
dans les éléments de vie du milieu - ce qui serait déjà un progrès - mais un
changement dans les processus d'acquisition. Il ne faut pas nous contenter d'une sorte de
matérialisation prématurée du calcul, mais d'une idéalisation de ce calcul,
idéalisation dont ne seront exclus ni l'imagination, ni le rêve.
Nous ne
réduirons pas davantage nos problèmes vivants à une froide copie des problèmes
scolastiques ou des examens. Ils seront - ils peuvent être - tout à la fois
littéraires, historiques, géographiques ou scientifiques, comme dans la vie vraie.
Il faut -
et nous sommes en cela sur la bonne voie - que nous prenions l'habitude de rédiger,
d'extérioriser, de souder aux autres disciplines les problèmes complexes tels qu'ils se
posent dans la vie.
On verra
dans la deuxième partie comment nous approchons des solutions souhaitables.
X. - UNE PROGRESSION RATIONNELLE EST-ELLE
INDISPENSABLE ?
Dans notre effort de rénovation, nous aurons contre nous tous les scolastiques qui préconisent, comme indispensable, une gradation soit disant scientifique dans les exercices, comme si nous devions mutiler et châtrer les problèmes de la vie pour les faire entrer dans les cadres prévus par une méthode désuète, avec des questions et des exercices fixés d'avance, et la possibilité, bien entendu, de mesurer les échelons de l'ascension.
Le
problème s'est posé exactement de la même façon - et se pose encore dans bien des cas
- pour le texte libre que nous avons mis à l'honneur.
Rien de
plus semblable aux manuels d'arithmétique que les manuels classiques de français. Dans
chacun des cas on part des notions supposées simples, de la phrase petit nègre ou de
l'assemblage des premiers nombres. Cela ne signifie absolument rien pour le lecteur, mais
c'est apparemment à la portée des enfants. Puis les notions vont se diversifiant avec
leur longue liste d'exercices gradués.
Si cette
graduation était vraiment indispensable, notre méthode naturelle ne saurait se justifier
puisqu'avec nos tests complexes comme la vie nous usons de mots et expressions, de
tournures de phrases qu'on ne saurait simplifier sans les mutiler.
Nous
mettons aujourd'hui au net et nous imprimons les textes les plus complexes sans jamais
nous soucier le moins du monde de gradations. Il nous suffit de modifier l'attitude du
maître face au travail de ses, élèves. A la fonction de contrôle qui est impartie à
l'instituteur dans l'éducation traditionnelle, nous substituons une fonction d'aide. Mais
ce changement lui-même suppose que nous avons modifié le climat de notre classe, où les
élèves, au lieu d'attendre passivement la ration dispensée par le maître pourvoient
eux-mêmes à leur propre culture.
Alors nous
pouvons affronter les difficultés. Il n'y a pas, dans la vie, une piste spéciale pour
les enfants qui partent en excursion avec leurs parents ou leur moniteur. Les débuts sont
fulgurants ; puis la marche s'assagit ; s'il y a des passages difficiles le
moniteur prend les hésitants sur ses épaules et, au détour des sentiers on attend un
instant pour que se ressoude la cordée.
Par nos
techniques, nous nous orientons vers un calcul vivant et libre qui sera le pendant de
notre texte libre.
L'enfant,
habitué à glaner autour de lui les éléments de calcul comme il recueille les idées,
les sensations et les faits, apporte en classe, dûment rédigés, une infinité de
problèmes que nous traiterons comme nous traitons les textes libres, avec références
aux techniques nécessaires et aux opérations qui en découlent.
Maurice
Beaugrand vous dira dans la partie pratique de cet ouvrage comment il exploite certains
problèmes libres jusqu'à en faire un important travail tout à la fois abstrait et
concret, et vivant.
Nous
indiquerons aussi une autre formule de fiches-guides complémentaires pour le libre
travail des enfants.
S'il est
recommandé avec les petits d'exploiter au maximum les centres d'intérêt nés de la vie
journalière, nous pouvons, avec les élèves plus âgés faire fonds sur les problèmes
complexes qui s'inscrivent en profondeur dans les occupations majeures de nos enfants.
Nous
préparons alors, sur ces thèmes les multiples incidences de calcul qui surviennent, non
point scolairement, mais naturellement. Pour certaines difficultés qui surgissent nous
renverrons à nos sources de documentation ou à l'aide du maître. Il est des points qui
nécessiteront des enquêtes. Là aussi nos B.T. nous seront un appoint
précieux.
C'est une
habitude à prendre. Dans le monde d'aujourd'hui, nous l'avons dit, le calcul tient une si
large place que le calcul vivant doit devenir aussi riche, aussi varié et aussi fertile
que le texte libre.
L'élan est
donné. Il nous suffira de pourvoir aux éditions indispensables pour que l'instituteur
puisse asseoir sa pratique sur des techniques éprouvées qui l'aideront à réussir.
L'exploitation
du texte libre était un tour de force il y a trente ans quand nous devions rechercher
nous-mêmes et adapter notre documentation, alors que nous n'avions encore ni la richesse
de nos B.T., ni l'appoint de nos Suppléments B.T.. Nous
avons, depuis ce temps mis au point tout un appareil technologique qui, peu à peu,
remplacera les manuels.
C'est ce
même travail qu'il nous faut mener à bien pour l'enseignement du calcul.
XI. - LES
ACQUISITIONS TECHNIQUES.
Nous ne
sommes pas gens, on le sait, à partir inconsidérément dans le rêve. Instituteurs
publics, nous devons tenir le plus grand compte des exigences administratives et sociales,
même si elles ne se produisent pas dans le sens de notre pédagogie.
Si même
nous pensons que les acquisitions techniques sont moins urgentes pour nous que la culture
du sens mathématique, nous ne nous en préoccupons pas moins de donner à nos élèves,
dans les meilleures conditions possibles la rapidité et la sûreté des calculs
mathématiques comme nous veillons à leur faire acquérir une écriture harmonieuse et
lisible et une orthographe correcte.
Nos
techniques d'ailleurs motivent ces acquisitions et en facilitent la maîtrise. La
connaissance des nombres et le comptage sont le résultat naturel du calcul vivant, tout
comme la pratique du texte libre dans les premières années de l'école permet
l'acquisition sûre et définitive d'un maximum de mots et expressions. Seulement, ces
nombres, comme ces mots ne sont pas appris seulement de mémoire, sans liaison
intellectuelle et affective avec les éléments vitaux du comportement. Il se peut que
notre élève ne connaisse pas à la perfection la suite des nombres jusqu'à 50 mais
qu'il n'en ait pas moins une connaissance tout intuitive de ces nombres que nous verrons
lentement sortir de l'ombre pour jouer leur rôle dans la, grande entreprise culturelle à
laquelle nous sommes attachés.
Les
procédés techniques d'acquisition ne manquent pas. Vous y aurez recours selon les
nécessités, sans négliger les traditions et les trucs que les élèves ingénieux se
transmettent mystérieusement de génération à génération.
Nous
facilitons cependant ces acquisitions techniques par la pratique des fichiers
auto-correctifs.
La
compréhension des éléments des opérations est indispensable. Nous nous appliquons à y
pourvoir par notre calcul vivant qui fait acquérir les notions élémentaires:
numération décimale, additions et soustractions, décimales et nombres complexes,
multiplications et divisions, etc...
Nous avons aidé l'enfant à se mettre debout et à faire ses premiers pas. Il sait marcher, mais il a besoin maintenant d'assurer sa marche par un incessant exercice.
L'enfant
sait faire les diverses opérations, mais il a besoin d'assurer sa marche par une
infinité d'exercices. La dactylo sait taper méthodiquement, mais il faut qu'elle
acquière sûreté et vitesse et elle ne peut y parvenir que par une longue série
d'exercices le plus possible motivés. Vous avez acquis le permis de conduire,
c'est-à-dire que vous connaissez manuvres et gestes nécessités par une heureuse
conduite. Mais vous savez bien que vous n'êtes pas chauffeur pour cela, et que ne sont
pas rassurés ceux qui s'embarquent avec vous. Il vous faut maintenant brûler de
l'essence. Quand vous aurez parcouru 20000, 50000, 100000 km, quand vous aurez affronté
un certain nombre d'obstacles fortuits et pourtant courants, alors, mais alors seulement,
vous saurez conduire l'auto.
Vous
expliquerez cela à vos élèves pour leur faire comprendre que vous pouvez leur offrir
votre généreuse part du maître dans la base de compréhension théorique ou technique
des problèmes d'enseignement du calcul. Mais à partir de là, tout comme l'examinateur
pour la conduite de l'auto, vous leur donnerez feu vert. A eux de faire suffisamment
d'exercices pour parvenir à la maîtrise souhaitable.
Nous
mettons à leur disposition alors un outil qui leur sera précieux : les
fichiers auto-correctifs qui comportent un grand nombre d'exercices gradués pour
que les élèves puissent rencontrer les difficultés majeures sans avoir recours au
maître.
Au point de
vue technologique, nous avons trouvé une formule, jamais encore utilisée dans
l'enseignement et qui est appelée à un grand avenir.
L'Ecole
traditionnelle ne néglige pas ces exercices. Les manuels d'arithmétique en comportent
des centaines de pages, en général d'ailleurs bien choisis et convenablement sériés.
Notre
innovation est d'un autre ordre, tout à la fois technique et subjectif.
Technique
d'abord : Si vous vous référez
aux indications du manuel, tous les élèves d'une classe, ou d'une division, doivent
faire en même temps les mêmes exercices.
Or, pour un
tiers de ces élèves, les exercices sont relativement faciles, ils les ont terminés en
un temps record et se trouveront sans travail, ce qui est toujours gênant.
Pour un
autre tiers, ces exercices sont trop difficiles et ralentissent injustement la marche de
l'ensemble.
Pour un
tiers seulement - et cette proportion n'est qu'approximative - les exercices sont
convenables et adaptés.
De sorte
que le rendement d'un tel travail sera d'un tiers de ce qu'il pourrait être normalement.
Imprimons
ou collons chacun de ces exercices sur une fiche 10,5 x 13,5 jaune ou blanche (on verra
tout à l'heure pourquoi nous mentionnons les couleurs). Nous plaçons toutes les fiches
dans une botte. Les enfants pourront prendre individuellement chacune de ces fiches au
rythme qui leur convient, Les rapides ou particulièrement doués feront vingt exercices
(ils pourront d'ailleurs sauter par la suite certains intermédiaires superflus) pendant
que les lents du dernier tiers feront trois ou quatre exercices. Chacun marchera ainsi à
son pas sans que les rapides et les biens doués doivent toujours perdre leur temps à
attendre les retardataires.
Pour un
excellent usage de ces fiches, il y aura lieu de reconsidérer par la suite la pratique
des leçons avec exercices d'application correspondants. Le travail complexe que nous
préconisons y pourvoira, ce qui n'empêche nullement le maître de donner collectivement
au fur et à mesure des besoins, les explications techniques dont les élèves, qui en
sentent la nécessité, feront bien mieux leur profit.
Et ce
système de fiches qui permet donc une individualisation précieuse du travail, pourra
encore être amélioré et adapté par le maître. Tandis que les élèves doués pourront
sauter des intermédiaires devenus inutiles, il se peut que, pour les élèves plus lents,
nous soyons amenés à intercaler des fiches supplémentaires qui seront comme autant de
marches intermédiaires permettant aux faibles de franchir les obstacles.
Mais
comment corriger ces exercices individuels ?
Nous
apportons là une innovation qui marquera le devenir actuel de l'éducation :
l'auto-correction qui nécessite une confiance nouvelle en l'enfant.
Pour
chacune des fiches de notre fichier nous avons réalisé une fiche réponse, écrite ou
imprimée sur carton rouge (défense) du même format.
Les enfants
prennent la fiche demande, font le travail, et vont contrôler ensuite sur la fiche
réponse. Un système de tests permet au maître de suivre l'avancement du travail.
Ces fiches
ont été doublées aujourd'hui de livrets autocorrectifs plus pratiques
pour les classes populeuses où l'usage du fichier est difficile du fait du manque de
place et se trouvent parfois les maîtres de laisser se délacer les élèves.
ASPECT SUBJECTIF DE L'INNOVATION.
Avec le
manuel l'enfant reçoit des ordres qu'il doit exécuter. Il n'a, à ce travail aucune
liberté de manuvre ni aucune responsabilité particulière. Il est, pour employer
un mot devenu à la mode : aliéné.
Nous lui
donnons la dignité et la responsabilité de l'homme :
- il peut
aller à son pas, et il s'efforcera d'aller le plus vite possible parce que c'est dans la
nature de l'enfant et de l'homme de se donner à plein à son oeuvre pourvu qu'il en sente
l'utilité et la nécessité.
- et
surtout, il est délivré de la surveillance et du contrôle direct du maître. C'est
lui-même qui se corrige. Cette latitude, et cette responsabilité sont d'une très grande
portée dans le comportement des enfants.
C'est pour
ces deux raisons que les fichiers et les cahiers auto-correctifs sont si appréciés des
élèves et des maîtres. Ils seront, un jour prochain, en usage dans toutes les classes.
On nous a
demandé : « Que pensez-vous de la théorie des ensembles qui
connaît actuellement une si grande vogue dans les milieux enseignants, surtout au second
degré ? »
J'ai entre
les mains le livre de Lucienne FELIX : « Mathématiques modernes -
Enseignement élémentaire » ainsi que divers articles de revues.
J'avoue que
certains de ces exposés sont trop techniques pour que je puisse en discuter à fond. Je
me contenterai seulement de donner mon point de vue.
Comme il
arrive souvent, cette théorie des ensembles présente aux professeurs et aux
spécialistes, sous une forme théorique qui leur semble indispensable, les questions de
bon sens dont nous avons débattu le plus simplement possible dans la présente étude.
L'enseignement
- tous les enseignements, et l'enseignement du calcul en particulier - partait trop
exclusivement jusqu'à ce jour de règles et de principes qui se juxtaposaient comme se
juxtaposent, sans s'interpénétrer les notions, les définitions et les fonctions dans
l'enseignement grammatical.
Essayer de
relier le tout dans des ensembles mieux conformes aux nécessités de la vie est, sans nul
doute, une excellente chose, quels que soient les processus qui y amènent.
« Une
histoire introduit des NOMS, noms communs, noms propres. Elle décrit donc des ensembles
et désigne les éléments de ces ensembles. Un mot isolé, comme « graine »
exprime une idée très générale, un ensemble difficile à concevoir, mais si un
jardinier nous dit qu'il va cette semaine de mars, semer ses graines, nous pourrons
discuter avec l'enfant : Quelles graines ? Ainsi on définira clairement
l'ensemble de référence : ou bien énumérer les étiquettes à utiliser (carotte,
chicorée ... ) ou bien utiliser une définition (Que sème-t-on en mars ?) »
D'ailleurs,
cette théorie s'accordera excellemment avec notre méthode naturelle qui lui apporte au
départ cet élément majeur : LA VIE. L'auteur est d'ailleurs d'accord sur la
nécessité à la base de cette expérience indispensable :
« De
même que lenseignement des mathématiques Suppose que l'enfant ait de nombreuses
connaissances fournies par l'expérience, l'enseignement de la grammaire suppose que
l'enfant sache manier la langue. Pour le professeur de mathématiques, l'acquisition des
moyens d'expression est plus un moyen qu'un but ».
« Il
est bien entendu qu'il s'agit vraiment, même en mathématiques, des
« choses » de la vie réelle ».
« ...
au lieu de les laisser sur un plan verbal, on les reconnaît dans l'activité réelle de
l'enfant ».
Nous notons
cependant, car je crois que nous devons en faire notre profit, les conseils que donne
l'auteur pour l'emploi correct des signes et définitions :
« Alors
apparaît bien l'immense responsabilité du maître chargé du premier enseignement; les
habitudes qu'il donne, le vocabulaire et le symbolisme écrit qu'il propose ou tolère
imprègnent l'enfant d'une façon définitive. Le maître est juge du moment où il doit
introduire une notion, la traduire par un mot, par un signe, mais nous le supplions de
n'employer les mots que dans un sens correct, d'utiliser les symboles suivant le codé
officiel et définitif que l'élève devra utiliser toute sa vie. Comme de lui-même,
l'enfant moderne qui écrit a besoin de signes rapides et qu'il invente des abréviations
personnelles confuses et dangereuses, c'est le rôle du maître de lui fournir au moment
propice le signe utile, adopté universellement et d'imposer son emploi légitime ».
Encore une
fois, nous nous rencontrons avec les théoriciens. Ce ne sont souvent que des subtilités
de langage qui nous en séparent.
XIII. -
VERS UN EXALTANT INFINI !
Le
développement accéléré des sciences ouvre à notre curiosité et à notre imagination
des horizons exaltants. Les rêves les plus osés deviennent aujourd'hui réalité et les
romans de Jules Verne ne sont plus de l'anticipation mais des plans de travail et des
guides pour les chercheurs contemporains.
Or, le
calcul ouvre davantage encore et comme automatiquement les voies de l'infini :
l'enfant qui écrit et qui lit un nombre de six ou sept chiffres a comme la satisfaction
surnaturelle d'avoir dominé le présent, le visible et le tangible pour se lancer dans
les grands espaces où le rêve devient réalité.
Calculer la
distance de la terre à la lune, et le temps que mettra un vaisseau cosmique navigant à
la vitesse de 6000 km à la minute, nous fait évader de notre monde limité pour suivre
en imagination les aventures les plus étourdissantes. Et c'est ce même étourdissement
qui nous gagne quand nous calculons les distances en années-lumière, affrontant les
limitations de notre pauvre vie à la splendeur des espaces.
Notre
pédagogie n'est pas une pédagogie des limitations mais bien une pédagogie de
l'ouverture aux données du grand monde. Nous ne nous traînons plus au niveau des textes
inconsistants et des problèmes simplistes qui nous restent indifférents. On croit trop,
parce que l'enfant est faible et sans expérience qu'il faut le laisser prudemment au bas
de l'échelle, en lui disant : demain... ou : quand tu seras grand !
C'est
maintenant qu'il veut monter sur l'arbre pour cueillir lui-même les fruits, même si on
les lui offre généreusement en bas, au niveau des êtres inertes. C'est maintenant qu'il
veut gravir la colline, s'élancer dans les airs, en rêve ou en réalité, se mesurer à
l'inconnu qui l'obsède.
Ce sont ces
intérêts majeurs que révèlent tous nos textes libres ou les questions d'enfants qui
les accompagnent et qui toutes touchent aux grands problèmes d'aujourd'hui et de demain,
ces problèmes que la science et la mécanique actuelle s'essayent à résoudre.
Nos textes
libres ne sont pas terre à terre. Nos calculs vivants ne le seront pas davantage. Laissez
les enfants considérer le monde autour d'eux avec des yeux neufs, et vous aurez la mesure
de ce que peut devenir demain un enseignement mathématique qui donnera des ailes aux
connaissances enfantines.
XIV.
- Y A-T-IL UN DON MATHÉMATIQUE ?
C'est le
problème qu'on s'est posé souvent en considérant les calculateurs prodiges qui, en tous
temps, et en tous lieux, ont toujours défrayé les chroniques.
Nous
comptons prudemment sur les doigts. Eux, mettent en action une sorte de machine
électronique qui, dépassant la limitation des chiffres et des nombres, mène à bien en
un temps record, les calculs les plus complexes.
Au niveau
des calculs élémentaires il peut y avoir des procédés mnémotechniques qui
accélèrent la technique. Quand il s'agit de multiplier 345025 par 7345 il n'y a plus de
petit jeu valable ; il faut que d'autres éléments entrent en action avec des
virtualités et une puissance incomparables.
Car cette
sorte de divination est en tous points comparable à celle d'un Roberto Benzi dans le
domaine musical. Roberto Benzi, comme tous les enfants prodiges dédaigne tous les
escaliers prudemment établis par la scolastique des hommes.
Il s'envole
au-dessus des sensations, au-dessus des sons pour atteindre à des sommets qu'on croirait
surnaturels.
Or, les
enfants, et les individus prodiges ne sont pas faits d'une autre pâte que nous. Ils ont
un même cur, une même matière sensible, avec les mêmes possibilités subtiles
des organes de sensation et d'action. Seulement, eux, pour des raisons qui nous restent
mystérieuses, ont cultivé merveilleusement ces possibilités, du moins dans certains
domaines, y compris les plus secrets et les plus énigmatiques ; ils ont pu faire
fonctionner ces mécanismes que nous possédons tous mais que nous avons laissé chez
nous, se gripper et et s'atrophier. Et ce sont évidemment les mécanismes les plus
subtils, ceux qui défient toute mesure, et qui constituent comme les sommets de notre
nature intelligente et sensible.
Ce sont ces
mécanismes subtils que nous mettons en branle et que nous activons. Nul ne sait encore
comment l'esprit se met en marche, ni de quelle flamme il brûle pour produire idées
originales, expressions poétiques, découvertes et inventions. On en révèlera un jour
les secrets. Pour l'instant, l'essentiel c'est que nous n'annihilions pas ces
possibilités mystérieuses sous le prétexte que nous ne les connaissons pas, que nous ne
savons encore ni comment elles naissent, ni comment elles fleurissent et éclatent. Ayons
du moins l'intelligence et la prudence de tout faire pour sauvegarder ces vertus
supérieures afin de permettre cette floraison et cet éclatement.
Et nous
rejoignons ici quelques-unes des vertus supérieures de notre pédagogie.
On trouvera
peut-être que nous risquons de compromettre parfois les progrès techniques et les
acquisitions de nos élèves parce que nous ne sommes pas suffisamment attentifs aux
explications élémentaires et aux progressions que les scolastiques disent rationnelles
parce qu'elles ont été artificiellement ordonnées en paliers dans les programmes et les
livres.
Oui, c'est
exact. Nous faisons une bien plus grande confiance à tout ce que l'individu porte en lui
d'exceptionnel et de supérieur. Il est exact que nous portons moins d'attention aux
difficultés techniques des mots dont nous usons avec nos tout petits qu'à la
possibilité que nous valent nos techniques de les faire s'envoler hors des quatre murs de
la classe, dans les zones où les enfants voient des choses qui nous sont inconnues, et
entendent des voix qui nous sont désormais inaudibles.
Il est
exact que nous les lançons dans des observations, des expériences et des calculs où ils
s'apparentent aux meilleurs chercheurs, à tel point que nous ne pouvons pas les suivre,
habitués que nous sommes à poser nos pieds l'un devant l'autre, à condition encore
qu'on ait déblayé au préalable les pierres du chemin. Comme il est exact que nous
laissons nos enfants s'exprimer sans aucune base technique par le dessin, la peinture et
la musique, ces expressions de tout ce que nous portons en nous de supérieur et de
prometteur.
Les bases
techniques viendront après. L'essentiel est que nous puissions monter hardiment vers
l'avenir.
La méthode
naturelle d'apprentissage du calcul s'inscrit dans cette ligne tout à la fois idéale et
matérielle, seule digne de l'homme qui crée des machines électroniques qui semblent
devancer parfois les plus merveilleuses des initiatives humaines, mais qui les dépasse et
les dépassera toujours par l'esprit, l'intelligence et le cur.
C. FREINET.
« D'abord
sans se sentir arrêté, sans apercevoir d'obstacle devant la considération du nombre qui
se dit ordinal ou cardinal, continu ou discontinu, l'enfant envisage les choses sous
l'angle de la place qu'elles occupent, de leur quantité, de leur grandeur suivant son
point de vue momentané et il accroche ces qualités aux choses.
C'est ce
qu'il traduit par des termes du langage : ici, là-bas, le premier, le dernier, un
peu, beaucoup ; grand, petit, trop petit, trop grand.
C'est le
premier contact : l'enfant sent le nombre.
Il a la
nécessité de rassembler, comparer, répartir, partager; la découverte d une
disparition, d'un excès l'orientent vers la précision. Il nous appartient de favoriser
ce besoin.
La vie
en commun, le travail collectif imposeront la quantité exacte qui se traduit par le
nombre. Dans une ambiance continuelle de travail collectif naturel, l'enfant va construire
les quantités et les nommer. Sans cesse, il sera amené à comparer, à compter, à
grouper pour découvrir une quantité qui correspond à une autre quantité et, plus tard,
à un mot (le nombre) afin d'organiser le travail, de réclamer sa part d'activité, de
défendre ce qui lui revient, de revendiquer la valeur de ce qu'il a produit.
Là, il
y a la vie agissante, pratiquement, affectivement, mentalement.
Il
faudra toujours penser plus vite parce que la vie veut que l'être se surpasse, aille de
l'avant,
Sans
cesse, l'enfant aura compté, comparé, nommé la quantité qui s'installe en lui par
expériences successives.
Puis il
raccourcit, il contracte son expérience ; il groupe, il automatise peu à peu parce que
joue en lui cette loi d'économie que l'être vivant applique si vite et si bien
Mais,
j'insiste sur ce point; l'enfant aura baigné dans une ambiance de travail et de
nécessité qui utilise, encourage, exerce et provoque les expériences, sans jamais
imposer de l'extérieur une représentation ou un vocable creux. Les expériences se sont
simplement étagées, organisées suivant l'impulsion, le rythme personnel favorisés par
le milieu vivant.
Lucienne BALESSE
« Initiation Vivante au Calcul »
C.E.L. Cannes
MADAME BERTELOOT DE L'ÉCOLE MATERNELLE
VIEUX-CALONNE
A LIÉVIN, NOUS ECRIT :
Comme les
autres activités, le calcul s'inscrit dans le cycle des activités journalières de
l'enfant, dans son rythme de vie.
Il est
d'abord chanson : bien souvent il m'arrive de les entendre répéter sur un air
monocorde : 1, 3, 5, 6, 4... ou 1-1-2, 1-1-2 en manipulant leurs objets familiers. Je
les vois souvent s'extasier à propos de « beaucoup ». Beaucoup, beaucoup,
beaucoup a pour eux valeur d'incantation magique, quand l'enfant grandit, devient des
millions, des millions !
On se pose
des questions avec dans les yeux déjà la présence du plaisir que causera la réponse
qu'on espère si fort qu'on ne peut résister à la joie de répondre avant toi :
- Y en a
combien, Madame ?
-
Beaucoup, beaucoup ?
- Des
millions, des millions ?
On vit
d'abord le calcul.
Sans danger
pour leur progression mathématique, leur suite rigoureuse, les nombres sortent de l'ombre
à la lumière d'un événement marquant la vie d'un enfant ou de la classe :
- les dessins sur les tabliers neufs ;
- les sept
tas de terre apportés dans le jardin : six d'argile noire, un d'argile jaune ;
- les trois
feuilles restées sur le peuplier ;
- les sept
couleurs de l'arc-en-ciel ;
- la petite
basse-cour de Sylvère : un coq, deux poules, trois poussins, etc...
C'est le
calendrier qui assure la trame des nombres. A partir de dix on écrit dizaine en rouge,
mais très vite on se libère de la couleur.
Le premier
matériel naturel de l'enfant ce sont ses doigts 5 et 5. Les enfants semblent posséder 10
très vite et cette année on m'a dit : « 9 c'est 10 moins 1 » avant de
dire : « c'est 5 et 4 ».
Il n'y a
chez nous et au CP, pas de leçon spéciale de la dizaine qui a l'air de causer tant
d'ennuis dans certaines classes. La suite, 10, 20, 30, 40 s'acquiert tout au long de
l'année.
VOICI
QUELQUES EXTRAITS DES COMPTES RENDUS JOURNALIERS DE Mme ANDRÈS DE L'ÉCOLE MATERNELLE DE
PONT-DE-CLAIX
Il s'agit
des élèves de la grande section (5 à 6 ans) 34 élèves.
Dès le
premier jour on a mis en train le calendrier, on a choisi ses camarades et sa place aux
tables (cinq groupes de six tables et un de quatre tables). Les « habitués »
entraînent les « nouveaux ».
15
septembre. - On remarque tout de
suite qu 'il y a dans la classe 3 Jocelyne et 3 Jacques.
On apprend
à dessiner 3.
Dominique
et Jean réalisent la première page illustrée de l'album :
Il y a 3 Jacques
et 3 Jocelyne
dans la classe.
16
septembre. - Jean-Bernard nous
annonce qu'il a trois poules. Son papa a coupé les ailes à la poule blanche qui allait
toujours pondre dans la cage des pigeons.
Jean : Mon papa en a une vingtaine de poules !
Louis : Une vingtaine c'est beaucoup !
La plupart
des enfants ne savent pas ce que signifie « une vingtaine ».
Dominique : C'est 20 !
Jean
: Pas juste ! Mon papa n'a pas compté
les poussins.
On écrit
20 au tableau, on le retrouvera bientôt au calendrier.
Page
d'album :
J'ai 3 poules
dit Jean-Bernard.
*
En
feuilletant cet album N° 1 des élèves de Mme Andrès, on constate qu'au cours de cette
première quinzaine de classe, c'est tout naturellement que les enfants ont :
- vu les
premiers nombres liés à des réalités vivantes, du chapeau de Philippe aux 4 lézards
qui se chauffaient au soleil. Situations affectives où percent les mathématiques;
- compté
les présents et les absents, constaté des différences,...
- par la
manipulation collective des feuillets de l'éphéméride, pris contact avec la succession
des jours, leur ordre dans la semaine...
EN
FEUILLETANT L'ALBUM N° 2 :
4
octobre. - Naissance du petit frère de
Fatma. Ils étaient 7 dans la famille, ils sont 8 maintenant. Le lendemain on cherche 8
dans la classe :
8 fenêtres côté couloir
8 carreaux aux fenêtres
8 bonshommes sur le rideau.
9
octobre. - Bernard apporte un bouquet de 9
beaux zinias.
10
octobre. - On se compte : 25.
Martine, Dominique et Jean-Bernard savent écrire le nombre.
12
octobre. - On a mesuré et pesé
(sans écrire les nombres) le héron qu'un chasseur nous a apporté.
13
octobre. - Dominique a compté 17 traînées
d'avions à réaction dans le ciel.
14
octobre. - Jean a découvert 10 seaux dans
le sable.
17
octobre. - Dans l'après-midi, au cours de
la sortie, une voiture nous double à grande vitesse et continue à rouler sur la
contr'allée.
Jean : Elle roule à 80 ou 90. Si la police de la route était là,
elle aurait deux contraventions. Là les voitures « doivent » pas rouler à
plus de 60 et c'est défendu sur la contr'allée. Ça lui coûterait cher.
- Sais-tu
combien ?
- Plus de
5000 francs.
(J'ignore
le montant des contraventions. J'ai accepté le plus de 5000 francs).
Dans
l'album :
Mon cousin René
a acheté 5 biberons
1 pour chacun.
20
octobre. - Au cours de la promenade
de la veille nous avons passé devant l'immeuble où habite Martine..
Elle
dessine au tableau et commente :
Mon immeuble a 6 étages
plus le rez-de-chaussée
ça fait 7.
Cela nous a
donné l'occasion d'écrire le signe + et l'addition : 6 + 1 = 7.
Ainsi nous
savons écrire et lire une addition.
Martine
nous a montré où elle habitait. Elle nous a appris à compter les étages de sa maison.
21
octobre. - A titre d'expérience, j'ai fait
un contrôle.
Dessine : une maison à 2 étages
1
0
7 seulement
ne se sont pas trompés, mais tous savent dire à quel étage ils habitent.
22 octobre. - Le papa de Guy a tué
3 grives
1 alouette
3 + 1 + 1
= 5 oiseaux en tout.
1 caille
23
octobre.- Confection du colis pour
les correspondants. On le pèse (équilibres, mais les poids ne leur disent encore rien).
On colle les timbres. La moitié savent lire les NF sur les timbres.
EXTRAIT DE L'ALBUM N° 3: MOIS DE NOVEMBRE :
6
novembre. - Le temps en octobre.
8 jours (dessin de soleil)
8 jours (soleil voilé par un nuage)
5 jours (pluie)
etc.
7
novembre. - La petite souris m'a
apporté :
10 + 10 + 10 = 30 F
3 fois 10 = 30
10 x 3 = 30
18
novembre. - 7 oiseaux dans la cour
2 s'envolent sur le platane
Il en reste 5 par terre.
Depuis la
rentrée de la Toussaint, on n'avait pas très chaud en classe. Il a fallu faire appel au
responsable des chaudières qui a dû se rendre à l'évidence : le thermomètre marquait
11° ! (dans la classe).
Depuis, on
regarde le thermomètre, le matin à l'entrée en classe et plusieurs fois au cours de la
journée au gré de ceux qui s'y intéressent, on fait des comparaisons.
J'ai noté
quelques réflexions :
Claire : Il fait sûrement 20 ce matin. Pas besoin de garder le gilet.
On vérifie : 19°.
Jean (le 15 après-midi) : Maîtresse, tu ne crois pas que
la chaudière est éteinte, j'ai froid dans le dos !
Jean « couvait » l'angine. On regarde le
thermomètre : 18°. Et nous voilà engagés sur la fièvre, le thermomètre médical
(qu'on ne peut pas lire : c'est tout de la même couleur !)
LA VIE DE LÉCOLE ET DU MILIEU EN GÉNÉRAL PROVOQUE DE NOMBREUSES OCCASIONS DE CALCUL.
OCCASIONS QUOTIDIENNES (l'exploitation de ces
occasions varie). Ainsi elle est :
- détaillée et collective au début de l'année ;
- plus rapide ensuite, mais toujours collective ;
- limitée enfin à une équipe ou à un élève qui en rendent
compte à tous (brevets de calcul) ;
- nombre
d'élèves : dans chaque rangée, chaque équipe, présents et absents ;
- feuilles
d'éphémérides : nombre de jours du mois, jours de classe, jours de congé ;
- feuilles
à imprimer : pour nous, pour les correspondants, pour les journaux mensuels ;
- craies
restantes dans la boîte ;
-
images de collections (étiquettes de
fromages, curs Rim, etc...).
SANS Y PENSER...
... Nous
comptons occasionnellement des quantités discontinues : pièces apportées
pour la Coopé, cônes de bonneterie, buvards, photos, pots de fleurs, timbres, etc...
... Nous
étudions les nombres ordinaux :
- en
désignant les éphémérides ;
- en
numérotant les pages de notre livre de vie et du livre des correspondants.
... Nous
évaluons ::
1) des
sommes :
-
cotisations pour la Coopé (chaque élève total) ;
- produit
d'une quête, de la vente de timbres ;
- frais d'envoi d'un paquet, d'une lettre, d'imprimés ;
- achat de
son, graines, paille (élevage) ; friandises pour colis, etc...
2) des
longueurs : graines qui lèvent ; envergure d'un oiseau, doigts, pattes ; les
dimensions de la classe (comparaison avec celle des correspondants), nos tailles, etc...
3) des
poids : qui est le plus lourd ? colis de lettres, imprimés, notre lapin
grossit, etc...
4) des
contenances : des gouttes (compte-gouttes), des cuillerées, des verres, bols,
bouteilles... un litre, etc...
5) le
temps : une minute, une heure, temps de la récréation, d'un travail, d'une
promenade...
Mme FORT.
Fontaine-les-Grès (Aube)
DES COPIEUX COMPTES RENDUS DE LUCIENNE BALESSE (CP), NOUS
EXTRAYONS :
Sans un
matériel spécial de calcul, la vie de la classe, l'aspect mathématique des choses du
milieu et les réalisations manuelles ont motivé le travail de calcul. Il consiste en une
chasse aux collections d'objets dont la représentation doit amener des images mentales et
encourager les combinaisons et les groupements.
12
sept. - 14 sept.
THÈME. -
Un accident d'auto.
EXPLOITATION :
- entretien
familier ;
- texte de
lecture ;
- trajet
des enfants pour arriver à l'école, prudence ;
- visite à
la chaussée pour observer la circulation ;
- dessin
objectif.
TRAVAIL DE CALCUL ORAL ET CONCRET NOTIONS
- beaucoup
d'autos stationnaient au moment de l'accident : 10, 20, 100...
- 10 autos,
c'est 2 collections de 5 comme les doigts de 2 mains ;
- 20
autos... comparaison et formation de nombres avec les doigts ;
- Chacun
dessine 1 auto stationnée sur la chaussée = 18 autos.
REPRÉSENTATION GRAPHIQUE POUR LES ENVELOPPES TÉMOINS.
THÈME.-Chez le garagiste.
EXPLOITATION
- le
nettoyage des caractères d'imprimerie se fait avec de l'essence ;
- notre
bidon est vide, où aller le remplir ? Quelle quantité demander ?
- visite
chez le garagiste ;
- texte
collectif.
TRAVAIL DE CALCUL ORAL ET CONCRET
NOTIONS
- les
enfants cherchent la capacité de différentes bouteilles, ils les remplissent d'eau,
transvasent et étiquettent les bouteille : 1 litre, 1/2 litre, 1/4 de litre, 1/10e
de litre ;
- ils
cherchent la capacité de notre bidon, 2 litres ;
- enquêtes
sur les bidons, les réservoirs d'autos.
DU
COMPTE RENDU D'UN TRIMESTRE DE TRAVAIL PAR Mme EDITH LALLEMAND (CE1) :
On nous
donne des billets 1/2 tarif pour la foire. On les compte par dizaines. Nous sommes 20.
Pour en avoir chacun 2 il en faut 40, pour en avoir chacun 3 il en faut 60, etc...
- Qu'est-ce
qu'un billet 1/2 tarif ?
J'explique :
« Ça veut dire que tu ne payes que la moitié du prix. Par exemple si le tour
coûte 10 francs, tu paies ? etc... »
Alors Frank
a dit : « Moi je donnerai 2 billets ensemble, comme ça je ne paierai
rien ».
Explications :
pourquoi on ne peut pas.
*
Poésie
« Hiver » de Charles d'Orléans.
- Qui
c'est ? Il est mort depuis longtemps ?
On calcule
depuis combien d'années. Ils comptent par 100 jusqu'en 1900. Discussion sur les âges des
grands-pères. Quelques personnes ont vécu jusqu'à 140 ans ! Le perroquet vit comme
les grands-pères : jusqu'à 70-80 ans (on avait observé un perroquet).
Mlle
GÉRARD (CLASSE DE PERFECTIONNEMENT DANS UN QUARTIER POPULAIRE) :
Les
histoires chiffrées partent, au début, surtout sur les commissions, Chaque matin, chaque
soir, dans ce monde où les mères travaillent, ce sont les enfants qui font les
commissions.
Ensuite apparaissent d'autres intérêts :
- entretien
de la maison ;
- les
heures de travail et les salaires ;
- les
maladies et la Sécurité sociale ;
- Comment
s'offrir un poste de télévision, une mobylette, une auto ?
- les
économies pour les vacances, les voyages, etc...
Mais c'est
surtout la pratique régulière de la cuisine, intégrée une fois par quinzaine à la
classe, qui nous a obligées à aborder des questions plus difficiles. En préparant ces
repas avec ces enfants handicapées mentales, en déjeunant avec elles, c'est tout un
monde nouveau qui se révélait à moi. C'est là que je voyais leur manque de jugement et
de raisonnement, leur maladresse, mais aussi leur débrouillardise et leur intuition qui
peu à peu ressurgissait.
- comment
lire et appliquer une recette ?
- comment
couper 50 g de beurre dans un paquet de 250 g ?
- comment
emplir une casserole à demi ?
- comment
évaluer une pincée de sel, 20 g de sucre ?
- comment
prendre 1 /4 de litre de lait, remplir un moule aux deux tiers ?
- comment
laisser cuire pendant 10 mn ou 3/4 d'heure ?
- comment
partager les radis quand 7, ou 8, ou 9 convives attendent ?
- comment
partager la tarte ?
-
« Comme tu fais de grosses épluchures à ta pomme » dit, Micheline, et de
là, Micheline pèse pomme non épluchée, puis épluchure pour établir le rapport ;
- comment
savoir la quantité de matières premières à acheter, à conserver ?
- comment
acheter, en gros, au détail ?
- Va-t-on
manger des fraises à Noël, des tomates en février, des haricots secs en juin ?
Toutes
sortes de questions nous sont posées, que nous résolvons sur le champ ou que nous
approfondissons les jours suivants.
J'ai
constaté que ces travaux concrets, utilitaires entraînaient ces enfants, pourtant
handicapés, beaucoup plus loin que je le prévoyais, sur le chemin de l'abstraction. Et
puis, c'est si bon de déjeuner d'un repas que l'on vient de préparer.
CHEZ Mme
MOUNIER (SAVOIE), LE CALCUL REFLÈTE LA VIE DU VILLAGE DE MONTAGNE :
Jeannot
: Ma maison a été construite en 1942. Je
l'ai vu écrit.
Yvonne :
Oh ! moi, mon écurie en 1871 et
l'autre en 1620.
Nous
cherchons l'âge de chacune de ces constructions nous comparons.
Mon papa a
acheté un cochon de 7 tours (il s'agit de la grosseur :un tour vaut 10 cm). Le tour
valait 1000 F. Abel se souvient que son papa en a acheté un aussi il y a déjà quelques
mois. Il se rappelle les chiffres : 8 t 1/2 à 2000 F le tour.
Nous
constatons que l'un a dépensé 10000 F de plus que l'autre pour avoir un cochon pas
tellement plus gros.
Florentine
nous vend pour les correspondants du Tarn 750 g de fromage à 300 F le kg. Combien doit-on
à Florentine ? Nous avons trouvé trois manières d'obtenir le résultat.
G
BÉRUTI (CM-FE) NOUS COMMUNIQUE DES OCCASIONS SPÉCIFIQUES AU MILIEU URBAIN DE SES
ÉLÈVES :
1°
- Le problème du logement et du garage dans la grande ville
Un
texte :
« J'ai
été chez Philippe, comme il est bien logé ! »
- Mon
déménagement.
- Papa
refait chambres et cuisines.
(Que de
calculs outre les problèmes classiques sur tapisserie et peinture).
- Pourquoi
le fait-il, lui ? A quel moment ? Son bénéfice ? Comparons avec le
plâtrier ? Son salaire ? Les économies pour faire ces réparations ? La
construction d'un appartement : vaut-il mieux louer aux HLM ou faire
construire ?
2°
- L'envoi en colonie de vacances :
- Prix
total. - Allocation vacances. - Bourses. - Part du salaire. - La location d'un logement à
la campagne, - La maison familiale.
3°
- L'automobile:
- Comment
l'acheter ? problème du garage. Vaut-il mieux la louer sans chauffeur ? Le
budget de l'automobiliste.
4°
- La maladie et les assurances.
- Pourquoi
faut-il s'assurer ? Avantages apportés par la Sécurité sociale (mutuelles,
etc...).
5°
- Les transports dans la ville.
- Prix
d'une carte de tram, d'un abonnement mensuel, part du salaire. - Choix de l'usine et du
logement. - Etude des transports : nombre de voyageurs transportés, heures de
pointe, km parcourus. - Vitesse maximum des transports.
ON SE
POSE DES QUESTIONS :
A ces
« problèmes » s'ajoutent des questions que l'on se pose, questions qui
développent le sens mathématique. En voici quelques-uns actuellement en chantier :
- Quelle
est la cour la plus grande, celle des filles ou la nôtre ?
- Nous
irons voir mes grands-parents en Allemagne, à Lubeck. J'aimerais savoir combien de km
nous ferons avec la Dauphine.
- Combien
de temps faut-il à mon papa pour descendre au fond de la mine ?
Combien de résidu y a-t-il au crassier de la
mine ?
- Papa a
commencé à bêcher le jardin. Je me demande combien de coups de bêche il faut pour
retourner le jardin ?
- On nous a
livré un fût de mazout. Quand sera-t-il vide ?
R. DANIEL (CE).
Nous
disons : « Des calculs !... J'ai un calcul !... »
Nous nous
servons moins des parents qui d'ailleurs s'y prêtaient mal, par réserve je crois. Nous
suivons plus directement les intérêts spécifiques des enfants et je crois que c'est
mieux.
- Combien
faudrait-il de temps pour faire le tour du monde en patins à glace ?
- Combien
d'heures le soleil nous éclaire toute une année ?
- J'ai vu
sur les projecteurs de télévision : 500 watts. Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Combien
peut-il y avoir d'arbres dans la forêt au-dessus du village ?
- Ma maman
a tricoté dix paires de chaussettes pour pouvoir acheter mes chaussures.
- Je me
demande combien il peut y avoir de feuilles dans ce colis de papier qui est si
lourd ?
- La
machine à imprimer les B.T. à Grasse tire 7000 feuilles à l'heure. Notre tirage serait
vite fait avec une machine comme ça.
- M.
Rolland a dit à maman qu'il laissait les skis à 20000 quand ils valaient 22000 F.
Il est gentil, M. Rolland.
Mme MOUNIER.
COMMENT DÉMARRER
LA
TECHNIQUE DU CALCUL LIBRE
Voilà
encore quelques années, il arrivait qu'on nous écrive :
- Mes
élèves n'apportent rien !
-
Moi-même, je ne sais pas voir les occasions de calculer, je n'ose pas.
- Mes
élèves construisent des histoires chiffrées sur le modèle des problèmes des livres,
sans « entrer dedans ».
Ces
difficultés ne sont pas spécifiques au calcul libre. Le T.L. les a connues lui
aussi : rappelons-nous le film L'Ecole Buissonnière, le
« nouveau maître » dit à ses élèves :
- Ecrivez ce que vous voudrez !
Mais les
enfants n'écrivent rien. Habitués à ce qu'on leur mâche la besogne, ils restent
désemparés.
Que
faire ?
« Mais
là-bas, autour de la table de Joseph, un groupe d'élèves s'est formé. Que se
passe-t-il ? Curieux, l'instituteur s'approche. Un spectacle inattendu s'offre à ses
yeux : une course d'escargots.
Déjà, il
est au tableau... Il écrit tout ce que disent les enfants : c'est le premier texte
libre ».
Cela aurait
pu être la première histoire chiffrée. Quelque chose comme :
- Joseph
apporte des escargots à l'école. Il leur fait faire la course.
- C'est le
gris-vert de Jeannot qui a gagné, il a parcouru 20 cm en .. minutes.
-
L'escargot tigré de Riri n'a parcouru que .. cm.
- Le marron
est le plus lent, il ne s'est déplacé que de.. centimètres.
Ou bien on
aurait pu calculer le temps mis par chaque escargot pour parcourir une distance de ..
C'est
peut-être ce que Freinet a fait.
En calcul
comme ailleurs, Elise Freinet a longuement insisté sur cette idée : il faut aider
l'enfant. Par exemple :
- noter au
tableau des histoires chiffrées prises sur le vif ;
- en
déceler au cours des entretiens familiers ;
- se mettre
en rapport avec des classes pratiquant le calcul libre et échanger des textes chiffrés
comme on échange des textes libres ;
- lire aux
enfants des histoires chiffrées parues dans des journaux scolaires ou les revues de
l'Ecole Moderne.
Notre
camarade C. PONS, alors jeune instituteur dans le Lot-et-Garonne nous donne un excellent
exemple de lancement de la Technique du Calcul Libre (Educateur n° 16 du 1 mars 1958.).
« Les
enfants ont connu jusque là les problèmes des livres et les leçons de calcul. Ils en
sont terriblement marqués.
Je demande
au début de l'année que le livre de calcul soit rangé définitivement au fond du
bureau. « Il ne servira pas d'ici Pâques » : les gosses sont perdus. Les
premiers jours, ils ont besoin d'oublier beaucoup de choses. Les trois premières semaines
sont consacrées à la mise en place du matériel des futurs ateliers...
Vers le 20
octobre, j'ai dit : « Vous pouvez dire en classe des problèmes que vous
connaissez des vrais ; sur ce que vous entendez et voyez chez vous quand vous faites
les commissions ».
Nous avons
eu une première série de problèmes. Des « vrais » et des inventés. Car
certains gosses ne savent plus d'autres problèmes que : « Sachant qu'un
ouvrier travaille... ». Mais ceux-là s'éliminent peu à peu. On finit par ne plus
vouloir les faire. Ils n'intéressent plus. Les autres, ils font partie d'une histoire, on
les « calcule » malgré soi, sans les opérations, comme ça, dans la tête,
Et puis, il faut aussi faire les opérations. Sans doute aussi, c'est devenu une mode dont
je suis responsable de n'apporter que des « vrais » problèmes.
Alors, tous
les jours, pendant l'heure classique du calcul (de 11 h à midi) ce sont des problèmes
libres.
Voici
quelques problèmes d'une journée ordinaire et ce qu'ils permettent. Les gosses sont
assis à leur bureau, en général ; chacun dit son problème. On a un bloc sténo
(le maître aussi) et on « calcule » :
1) A la
perceuse (notre perforeuse), je perce 2 trous à la seconde. Combien je pourrais faire de
trous en une heure ?
2) Je me
lève à 7 heures. Je mets une heure pour déjeuner et pour me laver. Je pars à 8 heures
à l'école. J'ai 7 km.
(- A quelle
heure t'arrive ? demande un gosse tout de suite. 5 minutes en retard, dit l'autre.
C'est vrai. Alors : j'arrive à 9 h 5 mn).
On calcule
la vitesse.
3)
J'achète un passe-montagne 1500 F. On me fait un rabais de 2 %. Combien je paye ?
4) Maman
achète un cochon de 19kg, 6500 F, à combien le kilo ?
5) Sur le
cahier 5 carreaux mesurent 4 cm (- C'est pas vrai, c'est des carreaux de 1 cm !)
Vérification :
c'est bien vrai. On calcule.
6) Une
vitre de 1,30 sur 1 mètre. Combien on peut faire de carreaux 25 x 25 ?
7) Un tube
de néon, 5 cm de diamètre et 65 cm de long. Le volume ?
8) Un long
problème avec les commissions. Il faut faire des opérations dans la tête, sur le bloc,
et ajouter.
9) J'ai 16
lapins. Ils pèsent à peu près 1,500 kg chacun maintenant. Ça vaut 230 F le kilo. J'ai
30 poules (mais dedans il y a 11 Poussins). Elles font 2 kg environ à 450 F le kg. Si je
vendais toutes mes bêtes maintenant, ça me ferait combien d'argent ?
J'ai noté
ces neuf problèmes. Il y en avait encore une dizaine. La sirène de midi a sonné et nous
n'avions pas tout à fait fini. Mais quelle heure de calcul !
D'abord, tous
les gosses en mettent un coup.
Certains ne
vont jamais jusqu'au bout, mais il se fait un drôle de travail dans leur tête, et ils
avancent.
- Les
progrès en calcul mental sont TRÈS RAPIDES
- Dans une
heure, nous avons résolu plus de dix problèmes et, collectivement, nous nous sommes
arrêtés sur plusieurs points :
Le
maître : Quel résultat est le plus juste ?
Alors nous
avons repris l'exemple. Les 2/3 ont trouvé : faut multiplier avant.
- Au
passage, dans le feu du travail, nous avons encore effleuré beaucoup de difficultés,
saisi beaucoup de subtilités. Et il s'est passé dans les têtes ce que je ne peux pas
contrôler. Le plus important.
Avec
l'expérience de six mois de problèmes libres en CM, l'an dernier, je n'ai aucune crainte
pour le Certificat d'Etudes. A Pâques, nous prendrons la brochure des examens et nous
aurons vite appris à écrire « opération ssolutions » à rédiger les fameux
« raisonnements » et à assimiler la « phraséologie » des
énoncés.
Je souligne
que c'était une journée de démarrage avec des gosses non habitués. Que les problèmes
de cette journée représentent de l'ordinaire.
Actuellement,
nous échangeons les problèmes avec quelques camarades du département. Ce sont
« les problèmes des autres ». Les enfants aiment bien.
Finie
l'heure fatigante et inutile du calcul avec ses leçons et le problème « au
propre » !
A
la même époque, R. BOURDONCLE donnait également un excellent exemple dont nous
retenons :
Le samedi
en général, nous ne faisons que des problèmes nés de la vie de l'école ou apportés
par les enfants.
1° - La
Coopérative scolaire nous en fournit de nombreux : dépenses collectives,
fournitures, dépenses pour voyages-enquêtes, recettes et dépenses de fêtes scolaires,
virements C.C.P., dépenses électricité (four à céramique).
2° -
Ensuite nous avons les problèmes apportés par les enfants. Ils sont encore assez rares.
J'en suis au même point qu'au début des textes libres. On y sent encore l'influence du
manuel. L'enfant ne peut pas se débarrasser de la scolastique que je continue d'enseigner
les autres jours de la semaine. il faudrait s'élancer plus avant comme quand on démarre
en français par le texte libre. Il faudrait supprimer toutes leçons. Je sens bien que la
vie et le besoin d'évaluer des enfants devraient suffire, et que mon rôle ne serait que
d'aider l'enfant à trouver la réponse des problèmes qu' il pose. C'est vers cette voie
que le voudrais tendre. Aussi j'aimerais connaître les expériences réalisées par
d'autres camarades.
Pour le
moment je tâtonne et constate que tes problèmes posés par la vie feraient parcourir une
bonne partie du programme et même le dépasser en certains points.
3° - Les
problèmes nés des enquêtes ou conférences. Ce sont ceux-là qui ont toujours été les
plus vivants peut-être parce qu'ils sont moins particuliers que les
précédents et qu'ils intéressent davantage toute la classe.
Ils sont
variés : construction d'une cuve en ciment (mesure, volume intérieur, valeur du vin
tiré de la vendange), la laiterie à la suite de la visite d'une coopérative laitière
(quantité de lait apporté, kilométrage des ramasseurs, transformation en beurre,
fromages, marche de l'usine, salaires, capital social, graphiques, amortissement), etc...
Extrait de
la conférence sur les explosifs agricoles :
« Pour que papa ait le temps de partir, il place une mèche
assez longue, 70 cm environ ».
Un
élève :
- Quel
temps ça met pour brûler ?
- Je ne
sais pas.
J'interviens : « Avec le morceau que tu veux nous faire brûler, ne
pourrait-on pas savoir combien de temps il faut ? »
Ils
expliquent : « On mesure le morceau de mèche, on calcule le temps qu'il faut
pour qu'il brûle ».
Les
FE : « C'est facile ».
Voici notre
problème résolu dans l'odeur de poudre. L'énoncé est ainsi rédigé : Gérard a
fait brûler 13 cm de mèche en 28 secondes. Quel temps a son papa pour se mettre à
l'abri de l'explosion ?
Ici
le problème fut fait sur-le-champ.
DE Mme
DAUPHIN (CP-CE) : CALCUL ORAL ET CALCUL ÉCRIT
Afin de me
ménager dans la matinée, un certain temps pour m'occuper du CP et aussi pour ne pas
aller à « l'aveuglette », je copiais, la veille au soir, quelques-uns des
problèmes que les enfants m'avaient apportés au cours de la journée. Je leur demandais
alors de chercher là-dessus tout ce qu'ils pouvaient et d'écrire toutes les questions
qu'ils aimeraient poser sur ces sujets. Le travail était recopié sur le cahier du
jour et nous l'examinions collectivement au cours de l'après-midi.
Je me suis
vite aperçue que ce procédé présentait des inconvénients.
Exemple : Le papa de Jean-Marie a tué un lièvre, un lapin et
un écureuil.
- Le lapin
pesait 1 kg.
- Le
lièvre 7 livres.
- L'écureuil 200 g.
Dépouillé
et vidé, le lièvre pesait 3 kg.
Par écrit,
les enfants ont cherché : le poids de 2, 3, 4. 5 lapins, celui de 2, 3, 4, 5...
lièvres et de même pour les écureuils.
Aucune
comparaison.
Aucune
différence.
En un mot,
aucune idée de rapports de ces différents poids entre eux.
Aucune
question.
A
l'exploitation collective de l'après-midi, voilà
que fusent les réflexions :
- Il est
lourd le lièvre !
- C'est lui
le plus gros !
- 7 livres,
ça fait combien de kg !
- Et la
peau et les entrailles, ça pèse combien ? On pourrait chercher leur poids !
- Il pèse
combien de plus que l'écureuil, le lièvre ? et le lapin ?
- Combien
il faut d'écureuils pour faire le poids d'un lapin ?
...et nous avons calculé...
Pourquoi
cette différence entre ces deux façons de procéder ?
Dans le
premier cas, livré à lui-même, l'enfant se replie et il ne sait que répéter ce qu'il
sait faire...
- Au
contraire, dans le travail oral collectif, il est continuellement stimulé, sollicité.
Lui aussi, veut montrer qu'il sait faire quelque chose, encore plus, et même beaucoup
plus. Les questions d'un camarade, les suggestions d'un autre, une précision, une mise en
garde du maître et voilà le plus fermé, le plus rebelle qui pose lui-même des
questions que seul, il n'aurait jamais formulées.
Désir de
surpasser les autres ? Peut-être
Désir de
se surpasser lui-même ? Sans doute, mais tout cela le plus souvent inconscient et
amené par tous les phénomènes psychologiques intérieurs que l'on ne saurait
différencier.
L'enfant,
même plus âgé, a besoin de se sentir aidé, soutenu, guidé et encouragé pour oser
s'aventurer dans des chemins inconnus. Il lui faut, pour cela, la sécurité que lui
procure la présence du maître et je pense que cette présence est indispensable pour
assurer ses progrès.
*
Madame
Dauphin aborde là un point important :
la pensée s'enrichit en se socialisant. Le souci exagéré de mise en forme limite
considérablement la pensée.
Aussi, avec
les petits, tant que nous n'aurons pas trouvé de nouvelles formes de travail écrit,
mieux vaut se contenter pour le travail écrit :
des cahiers auto-correctifs d'opérations
des fiches auto-correctives d'exercices
des fiches-guides.
Nous
verrons plus loin que pour les grands nous avons trouvé une présentation schématique
qui n'entrave pas le jaillissement de la pensée.
VIVIFIER
LE CALCUL PAR DES ÉCHANGES INTERSCOLAIRES
- soit sous forme d'enquêtes (souvent
présentées en albums) ;
- soit, plus simplement, sous forme de
problèmes personnels relevés dans la vie et exploités suivant une technique semblable
à celle du texte libre : le calcul libre.
QUELQUES
ENQUÊTES DES ÉLÈVES DE Mme RICHARD (CM2) DANS LE DOUBS.
Nous
parlons à nos correspondantes des origines de notre village (Beaulieu).
- Un
atelier au bord du Doubs où Peugeot fabriquait des cercles en acier pour les crinolines
des dames du Second Empire.
La mode
passa ; celle des bicyclettes arriva. Peugeot se mit à en fabriquer, puis des tricycles
et même le quadricycle à moteur qui franchit en 1891, la distance Beaulieu-Brest à la
vitesse de 13 km à l'heure.
Exclamations : Quel teuf-teuf ! Il a dû en mettre, du temps !
La
maîtresse : On pourrait peut-être
trouver le temps qu'il a mis ?
Josette : Oui. Mais on ne sait pas combien il y a d'ici à Brest.
Simone : Sur une carte routière, on le trouvera.
La
maîtresse : Je n'en ai pas ici.
Marie-Claude : Regardons sur une carte de France.
Nous
repérons Beaulieu-Brest : toute la France à traverser !
Josette
mesure : 79 cm environ.
Josiane
: Ça ne nous donne rien !
La
maîtresse : Que faudrait-il savoir ?
Plusieurs: Comment c'est sur la carte ?
Nous
traduisons : Combien de fois c'est plus
court ?
Nicole
(une ancienne) : Il y a l'échelle : 1
/1 100 000e,
Ses
camarades :Qu'est-ce que c'est que
ça ?
Nicole
explique simplement que les distances sont 1 100 000 fois plus petites sur la carte que
sur la route.
Ses
camarades : Ah ! bon, alors, sur
la route, c'est 1 100 000 fois plus grand.
Et l'on
calcule la vraie distance : 869 km environ.
La
maîtresse : Maintenant que nous
connaissons la route à parcourir, combien de temps a mis le quadricycle pour faire le
voyage à la vitesse de 13 km à l'heure ?
Voici
ce que nous disent nos correspondantes de Niserey-Satines (Ces renseignements constituent une excellente fiche pour
accompagner la B.T. n° 455 sur le sel.) :
- Dans
notre sol, à 150 mètres environ, se trouve une couche de sel gemme, mais ce sel est
dissous par les eaux d'infiltration.
L'eau
saturée de sel (298 g par litre) est remontée à l'aide de pompes. Cette eau est
incolore. Elle est déversée dans de grandes chaudières, appelées poêles, de 25 m de
long, 7 m de large sur une hauteur de 50 cm.
L'eau est
chauffée à 96°. A cette température, la cristallisation du sel se fait à la surface,
les cristaux s'alourdissent et tombent au fond. Les sauniers, ouvriers qui travaillent le
sel, le retirent, le mettent sur les manteaux de bois qui recouvrent les poêles, 24 h
pour l'épurer. Ce sel est blanc comme neige, pas besoin de le raffiner. Des wagonnets
l'emportent dans les magasins de l'usine. C'est le sel de cuisine.
Le sel fin
est obtenu dans des poêles circulaires où l'eau est brassée sans arrêt.
Séché,
carbonaté, le sel est mis en paquets par une machine sortant 60 paquets de 1 kg à la
minute.
Voici l'histoire de calcul que nous en avons tiré
- Combien
de kg de sel sont-ils fournis par jour (les Salines travaillent 24 h sur 24).
- Combien
une chaudière contient-elle de litres d'eau salée ? (première notion de volume de
l'année).
- Combien
de kg de sel cette eau contient-elle ?
- Combien
de chaudières fait-on chauffer pour la production d'une journée ?
-
Production de sel par an (220 jours de travail).
- Sachant
que l'ensemble des Salines de Franche-Comté produisent au total 80 000 tonnes de sel par
an, quel pourcentage représente la production de Niserey-Salines ?
Autres
enquêtes : A la fromagerie. - Le.
chauffage au mazout.
EXEMPLES D'ÉCHANGES ENTRE LES ÉLÈVES DE Mme DAUPHIN ET CEUX DE
Mme LEGRAND :
· J'ai 8 ans, nous dit Jean-Luc. Quel âge j'aurai en l'an
2000 ? Jaurai 33 ans en.... 77 ans, 24 ans, 50 ans, 40 ans...
G. BÉRUTI (CLASSE DE VILLE) NOUS
ÉCRIT :
CALCUL
LIBRE ET JOURNAUX SCOLAIRES.
De nombreux
instituteurs de l'Ecole Moderne font lire les histoires chiffrées comme on lit les textes
libres, choisir la meilleure qui est tirée au limographe et insérée dans les journaux
scolaires avec quelquefois une enquête chiffrée..
Repas pris à la Cité : Janvier 22, février 20, mars 21.
(Extrait du Journal de Mlle Henriot - CE).
Les garçons sont les coureurs. Les filles donnent le départ et chronomètrent. Tout de suite, Roger prend la tête du peloton.
1er tour
2e
tour
3e
tour
Roger
36 s
1 mn 20 s 1 mn
53 s
Pierre
39 s
1 mn 30 s
Jacky
39 s
1 mn 27 s
Michel
49 s
1 mn 47 s
Marie
50 s
Pouvez-vous accomplir une course
semblable et nous dire votre temps ?
Nous
saurons alors si vous courez plus vite ou moins vite que nous.
Ainsi, au
fil des jours, ce contact permanent et profond avec les choses, cette pénétration des
situations fortifient en l'enfant ses possibilités d'action sur le réel.
D'abord, ses
moyens sont réduits. Puis, à force de recherches individuelles et collectives, de
discussions insérées dans l'action, arbitrées par les faits, ils s'amplifient : le
besoin d'économie impose des raccourcis, des rapprochements, des généralisations...
L'enfant
acquiert ainsi des notions qui sont pour lui des outils de vie. D'instinct, il sent que,
pour s'en assurer une définitive maîtrise, attendre les occasions ne suffit plus ;
il les provoque et si elles ne lui conviennent pas, il en invente.
Déjà,
petit, il a marché pour apprendre à marcher, parlé pour apprendre à parler.
Maintenant,
aussi confiant en ses possibilités, mais plus expérimenté peut-être, plus conscient,
il se pose lui-même les obstacles.
Qu'il trouve l'aide que lui a apportée sa mère lors de ses premiers pas, une atmosphère de compréhension, et ce sera le départ pour d'exaltantes conquêtes.
Sa précipitation a cela de bon qu'elle le porte à l'essentiel écartant délibérément tout ce qui l'alourdit, il réduit l'exercice au minimum,
Ces idées
ont été souvent développées par C. Freinet et Elise Freinet qui écrit notamment (E.
Freinet et C, Pons : « Classes de neige », B.E.M. n° 2, page 38 -
C.E.L) :
« Au
lieu de mesurer, vérifier, expérimenter, l'enfant a repris le maniement des formules et
symboles qu'il avait déjà acquis et les a fait simplement servir à la notion neige,
sous l'effet de ce que l'on pourrait appeler l'imagination mathématique.
Nous
avons pris beaucoup d'égards de cette imagination mathématique, car qui imagine pense,
et qui imagine mathématique, pense fatalement mathématique.
Nous
nous sommes aperçus bien vite que l'imagination dans ce domaine allait beaucoup plus vite
que ne le permettait l'expression de la pensée consciente. C'est ainsi que l'enfant avait
toujours des difficultés à poser l'énoncé de son problème et à en traduire la
solution. Ces instants explicatifs n'avaient pas l'aisance, la rapidité,
l'infaillibilité, pourrait-on dire du sens mathématique tout intuitif. Ces
constatations, nous les avions faites déjà maintes fois à l'Ecole, mais ici, la
répétition quotidienne de la prééminence de l'imagination mathématique, nous a
obligés à en tenir compte.
Un
enfant qui s'obstine à poser son problème perd très souvent la bonne veine et ceci,
pour plusieurs raisons :
Tout
d'abord, la pensée formulée est limitative. Elle n'est qu'un aspect, qu'un morceau de la
réalité mathématique et qui plus est, elle est narrative, ambiguë, usent du
vocabulaire là où le symbole et la formule suffisent. L'énoncé formulé donne une
impression de poisson noyé et entraîne perte de temps inévitable, ne cadrant plus avec
la sûreté et la vitesse qui sont les marques du sens mathématique ».
Voici
quelques exemples :
Les
déplacements et les voyages.
Une dizaine
d'élèves de notre classe unique ont choisi ce thème de travail en calcul. Chacun s'est
posé des exercices sous forme de tableaux ou de graphiques.
Quand il y
a compte rendu, il est, on le constatera, extrêmement réduit.
(Il va de
soi que ces constructions de l'esprit s'enracinent dans le réel. Les divagations, les
excentricités sont remises à leur place).
1°
- Problème imaginé par Toni, 10 ans 1/2 (peu
doué en calcul).
Il a fait
son croquis au tableau
5 km/h
10 km/h
St-Lye 15 km ..
Troyes
10 h
10 h
et il
explique :
Toni: Y a un homme en vélo, à 10 h il part de Troyes pour
aller à St-Lyé. Y en a un autre qui marche à pied, il part de St-Lyé à 10 h pour
aller à Troyes.
Alors, de
St-Lyé à Troyes il y a 15 km.
L'homme qui
marche à pied, y fait 5 km en 1 h. Et l'homme qui roule à vélo, 10 km en, 1 h,
Alors, je
voudrais savoir à quelle heure ils vont se croiser.
Au bout
d'une heure, l'homme qui roule en vélo, il a fait 10 km, et l'homme qui marche il a fait
5 km. Alors ça fait 15 km en tout. Alors 10 h et 2 h ça fait qu'ils vont se croiser à
12 h.
Le
maître : Qui est-ce qui a une
question ?... Je vois des mains qui se lèvent... Marlyse !
Marlyse (11 ans et demi) : C'est faux.
Le
maître: C'est faux, pourquoi ?
Marlyse
: Ils n'ont pas mis 2 h pour faire
ça !
Le
maître: Toni, pourquoi dis-tu qu'ils ont
mis 2 h ?
Toni: Lui, l'homme qui roule à vélo, y met 1 h pour faire 10 km.
Le
maître : Oui.
Toni: Et celui-là, y met 1 h pour faire 5 km.
Le
maître : Et alors ?
Toni: Ben, 10 et 5 ça fait 15 !
Le maître: Je comprends que 10 et 5 ça fait 15. Toi tu dis 1 h pour l'un et
1 h pour l'autre ça fait 2 h. C'est bien ça que tu dis, toi ?
Toni: Oui.
Le
maître: Bon... et toi tu réponds,
Marlyse...
Marlyse: Ce n'est pas cela... Ils partent en même temps, alors ça
ne fait pas 2 h, puisqu'ils partent en même temps. Il y en a un qui fait 5 km, et pendant
ce temps-là, l'autre, il en fait 10. Mais c'est en même temps !
Le
maître à Toni : Tu comprends ?
Michel : Au bout d'une heure ils se croisent.
Toni: Ah oui, ils vont se croiser à 11 h.
Le
maître: Tu as compris, c'est très
bien, (Durée de cette conversation : 2 mn. Enregistré sur bande magnétique -
Janvier 1961).
2°
- Jocelyne (11 ans) présente son graphique.
Jocelyne
commente: Ce sont 4 autos qui ont
rendez-vous dans la même ville. Elles ne partent pas toutes du même point... La verte et
la rouge partent à 0 h, c'est-à-dire à minuit ; la noire et la blanche à 1 h.
Elles ont
chacune leur vitesse.
Michel: Elles roulent toujours à la même vitesse ?
Jocelyne: Oui, tu vois bien, les lignes ont toujours la même
pente. La verte double la rouge à 1 h et la blanche double la bleue à 2 h.
Le
maître : Que voit-on encore sur ton
croquis ?
Jocelyne : Qu'elles s'arrêtent (elle explique).
Le
maître : Qui a des questions à lui
poser ?
René : Elles sont arrivées à la même heure ?
Jocelyne : Ah non ! La verte est arrivée à 6 h, la rouge à 8 h,
etc...
Michel
proteste : Les voitures ne sont pas
toutes arrivées au même point,
Pascal : Si, à 500 km. Mais elles ne sont pas toutes
arrivées à la même heure.
Discussion : Jocelyne aurait dû prendre une feuille plus grande, ou
alors qu'elle colle une feuille à côté et qu'elle prolonge des deux lignes du bas.
(Durée de
l'exposé et de la discussion : 3 mn 15 s - Contrôle au magnétophone).
3°
- Pierre, 13 ans.
Il
présente rapidement le graphique ci-contre.
Discussion :
- Il avait dit : elles roulent toutes
deux à la même vitesse. Il rectifie : la vitesse de la bleue est double.
(total : 1 mn 15 s).
LA LIBRE RECHERCHE EN GÉOMÉTRIE
(10 élèves de 7 à 9 ans auxquels
s'ajoutent 3 élèves de 11 ans et une de 10 ans pour stimuler les petits).
Le maître: Nous allons
faire de la géométrie aujourd'hui. Prenons nos outils.
-
Le rapporteur ! Ah non !
l'équerre !
-
Le rapporteur !
-
La règle !
-
Le... le compas !
-
Qui veut tracer quelque chose ?
Gilbert (poulbot de 8
ans) : J'en ai un sacré dur de problème !
Il va au tableau où il trace un grand
Z à la règle.
Yves (8 ans) :
C'est un Z ? Il n'est pas bien !
Le maître: Pourquoi ?
Toni : Ben, les
deux lignes là...
Le maître : Lesquelles ?
Toni : Y a qu'à mettre
des lettres !
(Pour
l'instant je les laisse nommer les lignes
ainsi. Ils découvriront eux-mêmes les inconvénients),
Les lignes a
et c ne sont pas parallèles.
Le
maître : Explique-leur ce que cela
veut dire : parallèles.
Toni
au tableau: Ben, vous voyez, si on les
continue elles ne se touchent jamais, même si on allait jusqu'au bout du monde!
Les
petits : Oh !
Discussion
: Elles sont écartées
« pareil ».
Yves : Moi, Monsieur, je saurais tracer les 2 lignes du Z bien
parallèles.
(Il va au
tableau où il exécute sans mesure).
Tenez,
maintenant on va mesurer : juste 71,5 cm des deux côtés !
Le
maître : C'est bien, et tu as eu de la
chance ! Mais moi, je m'y prendrais autrement.
Gilbert :
Moi aussi ! (il va au tableau et se
trompe).
Didier : Même chose.
Yves efface a et b et ne laisse que
la ligne c où en piquant en 3 endroits différents, il trace avec la même
ouverture 3 arcs, puis la ligne a (tangente aux 3 arcs). Tout le monde reconnaît que les
lignes sont parallèles.
Le
maître : Qui saurait tracer 2 autres
lignes parallèles ?
Ginette y parvient facilement.
Bernadette trace :
Plusieurs : Ah ! non ! Ça ne va pas ! Il ne faut pas la
faire passer par là ! C'est là qu'elle doit passer !
Le
maître : Oui, elle doit passer en tangente !
Qui saurait
passer en tangente à la table.
-Ah
oui ! Je comprends !1 Il faut juste la frôler !
Un petit
essaie. Oh la là ! Il se trompe ! Il coupe le fromage !
Le
maître : Oui, il coupait comme on
coupe...
-...avec
des ciseaux !
-
ou
avec un sécateur. Alors, une ligne comme celle-ci qui coupe comme un sécateur, comment
l'appelleriez-vous ?
- Je
sais : une sécatrice !
- Ah
non ! Pas tout à fait : une sécante !
On écrit
sécante le long de cette ligne et tangente le long de l'autre.
Sur un
autre tableau, je trace un cercle et je demande qu'on trace une sécante - ils en font
beaucoup - et une tangente.
- M'sieu,
j'sais en tracer une autre tangente qui part du même point !
Toni dit
qu'il peut en tracer une troisième, mais il n'y parvient pas. Les autres disent qu'il
aura beau faire tout ce qu'il voudra, il n'y parviendra pas. Mais lui, en bon Napolitain,
s'entête.
Le
maître : Moi, du même point, je
saurais tracer autre chose, qui ne serait pas une droite, et qui serait sécant au cercle.
Ils
trouvent vite que c'est un cercle et qu'on peut en tracer beaucoup, autant qu'on veut...
... qu'on
peut même aussi du même point tracer un cercle tangent à l'autre... et un
deuxième ! (Toni essaie d'en tracer un troisième).
On discute.
L'un dit :
- deux
cercles tangents ne se touchent pas beaucoup hein !
Yves : Ben moi, je peux tracer 2 cercles tangents tout du long, sur
tout le tour.
Et il trace deux cercles concentriques
de rayons très peu différents.
Le
maître : Il est plus de midi, il faut partir !
-
Déjà !
On a tellement discuté de
parallèles, de tangentes, de sécantes... que tout le monde sait ce que c'est maintenant
et parfois ils viennent me voir :
-
M'sieu, regardez, ce que j'ai trouvé !
Pour nous, c'est pareil que de faire
des poèmes ou des chansons.
M. B. - février 1962.
Marlyse et
Jocelyne qui tirent des plans de travail, viennent m'avertir : à la
suite d'une fausse manuvre, le tirage est défectueux. Les plans de travail sont-ils
en nombre suffisant ? Doivent-elles cesser ?
- Combien
en avez-vous tiré ?
Elles ne
savent pas et commencent à les compter 1 à 1.
- Ne vous
inquiétez pas, dans quelques instants, au moment du calcul nous chercherons ensemble un
procédé pour les compter rapidement.
Nous
commençons par estimer.
Un petit
dit 20. Exclamation de ses camarades. Plusieurs enfants, comparant (sans les avoir sous
les yeux) aux paquets de 125 feuilles que nous imprimons habituellement, évaluent ce tas
à 300. Nous sommes plusieurs à estimer : minimum 300, maximum 500.
Cherchons
des procédés de calcul du nombre de
feuilles sans les dénombrer :
Marlyse: En comparant à des paquets de 100.
Jocelyne: En pesant.
- Combien
en pesons-nous ?
- 1
feuille, suggère Claudine.
- 20,
- 50,
- 100.
Certains prévoient que l'erreur sera plus forte avec 1 feuille.
Une équipe
de trois est désignée pour peser successivement 1, 5, 10, 40, 100 feuilles. Pendant
qu'elle opère, nous travaillons à autre chose.
Avec les
chiffres rapportés par l'équipe, nous dressons le tableau suivant (je dois
aider notamment pour l'établissement des 3e et 4e colonnes en
partant de la gauche)
Comptage :
455 feuilles. - Poids total : 698 grammes.
Au cours de
l'établissement de ce tableau nous avons revu les notions :
A chaque
ligne, je laissais d'abord effectuer individuellement la pose et le calcul des 3e
et 4e colonnes.
Le tableau
à colonnes n'est pas terminé que déjà les plus intelligents voient dans quel sens va
l'erreur.
- Pour
avoir encore moins d'erreur, dit René, on devrait en peser 200.
- 400, dit
Jocelyne.
- Tout, dit
Marlyse en souriant.
Je demande
pourquoi c'est en pesant une seule feuille qu'on commet la plus forte erreur.
- Si on
avait une balance très sensible, dit Anne-Marie, on ne ferait presque pas d'erreur.
Nous
passons maintenant au graphique que je
réalise rapidement au tableau (nous trouvons ensemble les coordonnées, l'échelle). Ils
sont habitués aux graphiques. Quelques-uns avaient déjà pressenti une parabole. Seul le
point 3 échappe à notre parabole (A). Nous vérifions les pesées pour ce cas.
- Qui
saurait tracer la parabole obtenue avec une balance moins sensible que la nôtre ?
(parab. B). Avec une balance plus sensible (parab. C).
Conclusion
pratique : utiliser une balance très
sensible peser le plus de feuilles possible, mais pas trop car alors on a plus vite fait
de tout compter.
NOUS TENONS COMPTE DE LA THÉORIE DES ENSEMBLES
Dans la
partie théorique de cette brochure (Voir page 43), C. Freinet a montré que nous
appliquons la Théorie des Ensembles sans le savoir et que notre Méthode Naturelle de
Calcul s'y prête merveilleusement. Voyons cela pratiquement.
Premier
exemple : Les tailles.
Plusieurs
des élèves de notre groupe du CE (10 enfants) viennent de recevoir une lettre de leur
correspondant régulier qui leur demande : « Combien mesures-tu ? »
Dès qu'ils
ont un moment de liberté ; les voilà à mesurer leur taille (hauteur).
Le jour
même ou les jours suivants, nous donnons à ces initiatives un caractère
officiel : rapidement, on se remesure sous mon contrôle, ce qui est l'occasion
d'apprendre à bien se placer contre le mur, à utiliser une équerre...
Nous notons
au tableau la taille de chacun (1 m 37 cm s'écrit aussi 1,37 m).
- Tiens, c'est Marie-France la plus grande ! Et Roger le
plus petit !
Je suggère
que nous adressions à nos correspondants un graphique des tailles. Nous décidons de le
réaliser au tableau.
Martine
dit qu'elle sait, puis elle se ravise :
« Ah non le tableau est trop petit, 1,35 m ça ne tient pas dedans ».
Yves: Moi j'sais, y a qu'à faire la moitié. Alors, la moitié de
1 m, ça fait 50 cm plus les 35 cm.
Gilbert
: Ah non ! 50 cm plus la moitié
de 35 cm. Il faut prendre la moitié de tout ! (notion d'ensemble et de parenté
entre les deux ensembles : les tailles, leur représentation graphique).
Réponses
chuchotées à l'oreille du maître.
Je note au
tableau :
Martine
sa taille
au tableau
1,35 m
67,5 cm
A tour de
rôle, ceux qui savent vont se présenter au tableau. Ceux qui ne savent pas s'apprennent
en regardant faire leurs camarades.
Marie-France:
Erreur.
Yves a
l'idée de tracer une ligne x y.
Ah oui, dit
Didier, c'est le plancher parce que s'il y en a qui montent sur une table, alors, on n'y
comprend plus rien !
Je suggère
qu'on pourrait tous monter sur l'établi ou sur le toit !
- Ah
oui ! si on a tous les pieds à la même hauteur !
- Ils
sentent que nous avons à faire à plusieurs ensembles :
l° -
Élèves de la classe ayant un correspondant (celui qui n'aurait pas de correspondant
serait surajouté à l'Ensemble puisque personne ne lui aurait demandé sa taille).
2° -
Elèves de la classe ayant les pieds sur le plancher (Ensembles identiques ou égaux
puisqu'ils ont les mêmes éléments).
3° -
Ensemble des « tailles » à l'échelle 1/2... etc...
Comme
Françoise constate qu'elle a beaucoup grandi, nous arrivons au tableau suivant que
j'exécute le soir pour ne pas abuser de leur attention, et que nous observons le
lendemain :
Donc, de
nouveaux ensembles :
- ensemble
des tailles réelles en juin 1961
- ensemble
des tailles à l'échelle 1/2 en juin 1961.
D'autres
encore :
- ensemble
des tailles de chaque élève dans le temps (lecture horizontale du tableau) ;
- ensemble
des représentations de ces tailles à l'échelle 1/2, etc...
Nous
n'écrirons pas les relations qui découlent, relations d'équivalence par exemple, nous
pensons qu'à cet âge, cela ne présente aucun intérêt et constitue peut-être un
danger, Il suffit, pensons-nous, de rester au niveau de l'intuition.
*
Nous
répétons que la Théorie des Ensembles n'est pour nous qu'une Technique Mathématique,
un outil, non un point de départ à enseigner magistralement. Pour nous, le point de
départ, c'est l'intérêt de l'enfant.
*
Cet
élargissement des mathématiques, peut d'ailleurs être envisagé beaucoup plus tôt.
Ainsi,
lorsque, avec des petits de 6-7 ans, nous comptons les présents, nous présentons la
classe suivant des schémas de ce genre :
tables dans l'ordre d'avant en arrière
[(2+1+2+2+1+1) + (2X 6)] + [(2+2+1 +1 +1)] = 28
les grands
les petits
- Tu sais
où tu es, Roger ?
- Oui, ici
(il montre 2) avec Anne-Marie, dans la 3e rangée, chez les petits... Pierrot,
lui, il est tout seul, là !
On trouve
dans les travaux des grands élèves de nombreux exemples qui confirment l'idée que
Méthode Naturelle de Calcul et Théorie des Ensembles ne font que se compléter.
*
La Théorie des Ensembles recommande l'emploi de symboles nouveaux, des présentations modernes que les Circulaires Ministérielles ne manqueront certainement pas, dans un avenir très proche de recommander aux maîtres. Mais dès à présent nous pourrions en établir une liste.
LE BREVET DE CALCULATEUR EST UN PONT ENTRE LE CALCUL LIBRE ET LES
EXIGENCES DES PROGRAMMES ET DES EXAMENS
COMMENT
FAIRE LE POINT ?
Pendant
deux ans, dans ma classe unique, j'ai enseigné le calcul suivant la technique présentée
précédemment : le fond de notre travail était l'exploitation immédiate ou
différée des occasions que nous offraient nos textes libres, nos conférences, nos
enquêtes, nos recherches diverses, la vie familiale, l'actualité... Certes, nous
complétions l'acquisition des mécanismes des opérations par les fichiers
auto-correctifs - les cahiers n'existaient pas encore - et, au cours de la dernière
année de scolarité, nous nous préparions plus directement aux examens par les épreuves
habituelles, mais l'essentiel de notre travail n'en restait pas moins le Calcul Libre.
J'étais
émerveillé par l'enthousiasme des enfants, leurs progrès en calcul mental et surtout le
développement de leur intuition mathématique.
Les
collègues qui menaient des expériences semblables faisaient les mêmes remarques. Tous
ceux qui suivaient nos travaux confirmaient notre opinion : nous étions sur la bonne
voie.
La pratique
vérifiait la justesse d'une idée capitale les notions de calcul ne sont, tous comptes
faits, pas plus nombreuses que les notions de Français et notre technique du Calcul Libre
nous permet de les voir et de les revoir dans des contextes toujours différents, avec une
ambiance aussi favorable que celle du Texte Libre.
Cependant
une ombre subsistait : le visiteur non informé qui nous regardait calculer ne voyait
pas notre fil conducteur, se demandait où nous en étions et où nous allions. Il nous
fallait donc, pour l'inspecteur, pour les parents surtout, trouver une technique de
contrôle qui, remplaçant les notes et les classements, fasse mieux apparaître tant dans
le domaine des mécanismes que dans le domaine de l'intelligence, les progrès de chaque
élève.
C'est alors
que nous eûmes l'idée d'appliquer au Calcul la Technique des Brevets (Brochure
d'Education Nouvelle Populaire, n° 42). Nous inspirant de l'Ecole Freinet avec laquelle
nous correspondions, nous avions déjà mis en chantier des brevets d'écrivain de
lecteur, de conférencier, de dessinateur... Pourquoi n'aurions-nous pas un Brevet de
calculateur ?
Chacun de
nous a expérimenté dans sa classe. Nous avons confronté nos recherches au cours des
réunions, des congrès. Essayons de dégager quelques manières de faire.
LES
BREVETS PEUVENT ÊTRE INTRODUITS FIN CP(Mme FORT) :
Tous les
mercredis -16 h 15 à 17 h -les élèves du C P s'entraînent aux divers ateliers de
calcul, ils préparent un « brevet » !
distribution du matériel
20 mn à 25 mn
je précise le point à travailler
(fiches-guides)
travail
15
mn : contrôle collectif et critique
5 mn :
rangement du matériel.
BREVET
DE LA BALANCE (coin avec
balance et poids divers)
Michel soupèse sa trousse d'écolier et cherche quels poids
marqués sont à peu près aussi lourds. La balance lui dira si son approximation est
juste... Il soupèse de même le casseau, le pot de colle, etc...
Philippe
lit la valeur des poids de fonte et ceux en
laiton. Il essaiera de les bien connaître.
Francis prépare 200 g de sable dans un petit sac...
BREVET
DE LEAU (bac à eau et diverses
mesures : compte-gouttes, cuillers,
verres, petits flacons, boîtes, litres, etc...)
Gérald compte les gouttes dont il veut emplir un couvercle.
Alain
les cuillerées d'eau dans un verre.
Philippe cherche à emplir une bouteille avec des verres d'eau bien
pleins.
Chacun
écrit sur la tablette les nombres dont il veut se souvenir.
BREVET
DES LONGUEURS (l'atelier est
partout : classe, couloir, sous les tables).
Anne-Marie construit sa « mesure » graduée avec des petits
carrés de 1 cm de côté collés sur une bande de carton.
Colette « arpente » la classe : elle cherche combien
elle fait de pas dans la longueur, la largeur, etc... Chantal l'imite et ne
trouve pas les mêmes nombres, Dominique et Patrick mesurent avec le mètre.
BREVET
DE L'HORLOGE (à sa place).
Jean-Philippe fabrique un cadran en carton et deux aiguilles. Il mettra
« sa montre » à l'heure.
Il nous
dira aussi combien de minutes se sont écoulées depuis qu'il a commencé son travail.
BREVET
DES PIECES (à une table plate, boîte
renfermant les cotisations pour la Coopérative Scolaire).
Denis tire et aligne par 5 les pièces de chaque sorte il les compte.
Olivier aligne les pièces de 2 F, prépare diverses sommes dont il
cherche la valeur... etc...
D'autres
travaillent aux brevets des timbres, des feuilles, du thermomètre, des élèves présents
et absents, etc...
*
Pour le contrôle, accompagné des élèves disponibles, je passe parmi les enfants qui présentent leur travail, Nous discutons, nous posons des questions et nous décidons si on peut attribuer le Brevet.
AU C.E.
LA PLANNIFICATION APPARAIT
P.
DELBASTY (L'Educateur n° 9 du 1er février 1961) :
« Les
brevets vont s'inscrire sur une feuille haute d'un demi-mètre agrafée au mur. La liste
des enfants est en colonne verticale le long de la feuille ; chacun possède une
bande horizontale.
Nous
distinguons les brevets facultatifs et les brevets obligatoires.
Nous
hachurons tout ce qui est « passé ».
Nous
cernons d'un trait fort tout ce que l'enfant a inscrit sur son plan de travail
hebdomadaire.
Sans connaître encore le détail, vous constatez tout de suite que Claude est un mathématicien.
PROBLEMES. - 1, 2, 3
et 4 correspondent aux numéros des quatre fichiers séparés (1 : problèmes avec
n'importe quelle ou quelles opérations, entre 0 et 10 ; 2: identique entre 0 et 20; 3:
identique entre 0 et 50 ; 4 : identique entre 0 et 100 ; plus un cinquième
fichier au-dessus, avec aussi des problèmes particulièrement difficiles).
Ces problèmes sont ceux que portent les enfants et que nous
tapons à la machine sur des demi-fiches 13,5 x 21. Nous leur adjoignons les problèmes
pour Cours Elémentaire édités par notre Coopérative de Cannes. Chaque fiche problème
porte le
numéro du fichier et un numéro d'ordre dans ce fichier qui est rappelé sur une feuille
collée derrière chaque fichier, de façon à savoir, quand une nouvelle fiche est à
verser là, quel est le numéro de la dernière fiche versée, et donc le numéro de la
nouvelle.
Claude a d'abord inscrit sur son plan de travail : Fichier
1. Je lui ai remis une page 13 x 21 sur laquelle il a tamponné le tampon des 100
cases. Il a numéroté ces cases. Quand il réussissait un problème il coloriait la case
portant le même numéro.
De même il indiquait le problème qu'il avait porté lui-même dans les dernières
cases. Il a porté obligatoirement cinq problèmes
nouveaux et résolu vingt problèmes « en place ». Ainsi pour chaque
fichier. Claude a inscrit le troisième fichier ce matin
à son plan. Il a pris et tamponné une feuille 13 x 21, j'ai encadré fortement
son projet sur le plan mural.
OPÉRATIONS.
- Réussir les opérations des cahiers
auto-correctifs 1, 2, 3, 4, 5 et 6 (fin du Cours Élémentaire 1re année) ou seulement les tests de ces cahiers
(l'entraînement aux opérations pouvant fort bien s'effectuer par les problèmes vivants
et même les exercices que les enfants se choisissent eux-mêmes).
NOMBRES.
- Lire les tests 1 de 0 à 3; 2 de 0 à 5, etc...
Tout
cela étant le résultat des travaux vivants :
- Nous
avons avant-hier prévu les commandes au Père Noël et les enfants ont lu les grands
nombres, les ont comparés. Je vois inscrits beaucoup de projets de brevets des nombres.
Certains,
comme Claude, savent d'ailleurs chercher eux-mêmes, posant de grands nombres,
réfléchissant à la numération.
Quand
nous parlons de calcul vivant, nous entendons calcul comme les enfants calculent, ni
concret, ni abstrait, ni pratique, ni imaginatif, mais tout cela à la fois et selon les
enfants,
Vous
voyez toujours à côté de chaque titre de brevet une place blanche pour le
chef-duvre : ce sera par exemple pour les nombres cette question de
Michel :
- Et si
je regarde les oreilles de la « Vache qui rit », ça ne finit jamais ?...
Non, ça ne finit jamais.
C'est
pour nous la preuve que l'enfant a pensé, qu'il a été le mathématicien curieux, en
prise parfois aux mêmes vertiges que le poète. Il nous faut toujours donner à côté de
l'épreuve normalisée, même si elle est acceptée avec entrain par l'enfant une
empreinte personnelle.
Il faut
un moment en début d'année pour établir cette grille dont l'ensemble paraît effarant
mais qui est d'un emploi très aisé et qui intéresse les enfants ».
LES
FICHES-GUIDES PERMETTENT AU MAITRE DE DÉMARRER LES BREVETS, A L'ÉLÈVE DE LES POURSUIVRE
SEUL (Des fiches-guides de ce genre ont été publiées dans L'Educateur au
cours de l'année scolaire 1961-62. D'autres viendront. Elles seront probablement par la
suite résumées en cahiers qui permettront le travail individuel.).
EXEMPLE:
Calcul
(CE). - TEMPS.
Il y a une
fiche, mais on ne la fait pas tout de suite. D'abord on travaille ensemble pendant
quelque temps:
- On
s'apprend à lire l'heure: on regarde souvent l'horloge, le matin et aussi
l'après-midi.
- On
chronomètre un camarade qui court 100 m, un autre qui compte vite une opération
au tableau, encore un autre...
- On s'habitue à calculer la durée des travaux. On
se dit : « Pour écrire mon texte qui aura une page à peu près, il me faut
environ un quart d'heure. Comme il est 9 h 10, je dois avoir terminé à 9 h 25, J'écris
au haut de ma feuille :
commencé à
- terminé à
- On
s'entraîne à deviner l'heure sans regarder les horloges et les montres. Oh !ce
n'est pas difficile ! Nous, nous avons remarqué qu'à 9 h, du perron on voit le
soleil juste derrière la cheminée de Madame Gardavot ; à 10 h on le voit... Et
vous ?
- Nous
avons aussi regardé les ombres. Et tout
le monde a bien vu qu'à midi l'ombre du tilleul arrive juste au coin du mur. Et si on est
en classe, on voit l'ombre du coin de la fenêtre un tout petit peu à gauche du tuyau de
poêle.
- Nous
avons planté un bâton dans la cour, au coin d'une dalle de ciment. L'ombre du
bâton tourne sur la dalle. Alors nous y avons écrit les heures. Ça nous fait un cadran
solaire. Nous avons vu d'autres cadrans solaires dans la B. T. n° 49.
- Nous
avons aussi fabriqué des pendules: une ficelle avec quelque chose de lourd au
bout. Essayez avec une grande ficelle, avec une petite ; vous compterez les mouvements du
pendule et vous verrez... Nous avons réussi à fabriquer un pendule qui bat juste au
rythme des secondes.
- Nous
essaierons de fabriquer des sabliers (on en voit 2 à la page 21 de la B.T. n°
49).
- On
s'exerce aussi à faire des croquis un peu comme celui-ci :
Je ne sais
Je vais à
je vais à
pas marcher
l'école matern.
l'école prim.
0 1
an 2 3 4 5 6 7 8
Il faut
chercher d'autres idées : on interroge le papa, la maman, le grand-père. Et dès
qu'on sait travailler, hop, la fiche !
FICHE
POUR CHACUN.
contrôle
1)
J'apporte un vieux réveil en classe
ou je
fabrique: un pendule ou un sablier ou une
horloge à
eau ou un cadran solaire (voir B.T. 49).
2) Je chronomètre
:
Pour lire 5
lignes, il me faut
........ secondes
Pour courir .... -
Pour .............
-
Pour .............
-
Pour, ............ -
3) Je
m'entraîne à fermer les yeux pendant une mn.
1er
essai ... secondes
4e essai ... secondes
2e essai
... secondes
5e essai ... secondes
3e essai
secondes
6e essai ... secondes
4) Je donne la preuve que je sais lire l'heure:
- le matin ou l'après-midi
- avec des 1/2 ou des 1/4 en + ou en -
- avec des minutes en + ou en
5) Je calcule le temps qu'il faut
temps
Travail
début
fin
mis
Je rédige
mon texte libre
9 h 10
9h25
10mn
Je compose
une ligne...............................................
6) Je sais qu'il faut environ :
Pour venir à
l'école ............. mn
Pour cuire un oeuf à
la coque
mn
Pour .............
mn
7)
Si je et
que je je
dors
me couche
à me lève à
pendant
.................
.
.................
.................
.
8) Je
calcule la durée du jour (voir calendrier ou éphéméride) :
lever
durée
date du soleil coucher
du jour
.................
.
.................
.
9) Je
sais écrire les 12 mois de l'année en les classant en trimestres :
10) Je
calcule l'âge ou la date de naissance :
Année de
Nous sommes
la naissance
en
Age
moi
...........
.............. .............
papa
.........
.............. .............
grand-père
..............
.............
.................
.............
11) Je fais
les problèmes du fichier de calcul C.E.
41 42
43
44
45
46
47
48
Signature des parents
Signature du maître
AU CM ET A LA CFE LA PLANNIFICATION EST PLUS POUSSÉE.
Nous avons
établi une vingtaine de fiches-guides (12 de ces fiches du genre de la précédente mais
adaptées au niveau ont été groupées dans le Supplément B.T. n° 96. C'est
un cahier individuel de calcul (longueurs, poids, capacités, temps, surfaces)) que nous
recommandons d'utiliser de la façon suivante (sans toutefois systématiser)
Le samedi
soir, en assemblée coopérative, on décide de la fiche qui sera travaillée au cours de
la (ou des) semaine suivante. Le lundi matin, au moment de calcul, on discute rapidement
de l'organisation du travail : ce qu'on fait à l'école, ce qu'on fait à la maison,
comment on circule au coin de calcul. Chacun fera le maximum en fonction de ses
possibilités.
Déjà un
élève au moins est capable de répondre à l'un des 10 points de la fiche - estimer par
exemple. Il en donne la preuve sur-le-champ. Ses camarades écoutent, apprécient,
critiquent. C'est pour eux, mieux qu'une leçon.
Puis on se
met au travail.
Le maître
et les élèves les plus vifs dépannent ceux qui sont en difficultés.
En fin de
séance, on fait subir quelques épreuves orales ou écrites aux volontaires. Les enfants
exposent des procédés divers ; on discute ; le maître apporte des précisions
techniques, procédé plus fécond que la leçon traditionnelle.
Le samedi,
contrôle général et pointage. Nous recommandons de matérialiser dans la colonne
« contrôle » de chaque fiche la progression de chaque enfant par des signes
conventionnels qui peuvent être :
- travail amorcé
+ acquisition douteuse
* acquisition indélébile.
On peut
reporter ces signes sur le tableau récapitulatif de la couverture et même sur un
planning mural. Ainsi, n'importe qui peut, à tout moment, faire le point des conquêtes
de chacun.
Il faut
varier les procédés de contrôle : de temps à autre on peut faire comme dans les
jeux radiophoniques. On prépare des enveloppes, le candidat en tire une. Le meneur de jeu
(pas obligatoirement le maître) lit les questions et le candidat répond ou exécute.
C'est la classe qui décide si on attribue le « brevet ».
Ce travail
par fiche sera d'autant plus formatif que, parallèlement, on pratiquera le « calcul
libre ».
LA RÉALISATION DE CHEFS-D'OEUVRE PASSIONNE LES ENFANTS.
On trouve
dans les fiches-guides de nombreuses idées pour préparer des
chefs-duvre : fabriquer une balance, un pendule, une équerre
d'arpenteur, dresser des plans, préparer des albums...
Certains
sont obligatoires : il est bon que chaque enfant ait fabriqué une balance ou un
peson. D'autres facultatifs : une ou deux équerres d'arpenteur (simples, bien sûr)
suffisent pour une classe.
Ne croyez
pas d'ailleurs que ces travaux prennent beaucoup de temps : l'enfant s'y passionne et
les exécute en partie à la maison.
L'ATELIER DE CALCUL PERMET D'ASSOCIER TRAVAIL MANUEL ET TRAVAIL INTELLECTUEL.
Nous y
voyons notamment :
INSTRUMENTS
DE MESURE:
- mètre
rigide, mètre à ruban, mètre à rouleau
- pied à coulisse
- chaîne d'arpenteur
- balances avec série de poids en cuivre, poids en fonte
- pèse-lettres
- si possible, bascule au 1/10e mesures de capacités,
récipients gradués
- vieux
réveil, horloge de la classe avec trotteuse centrale si possible
- équerre, compas, rapporteur pour travailler au tableau.
DOCUMENTS:
- cartes à
l'échelle (surtout routières, Etat-Major et Michelin)
- catalogue
Manufrance
-
collection de prospectus dans un dossier
- dossiers
de renseignements numériques divers rassemblés par enquêtes
- Chaix
- papier
graphique
- S.B.T.
« Balances et pesées »
- affiches
de vente de propriétés
-
timbres-ristourne divers
- Matériel
« Camescasse ».
DANS
LA CLASSE, PAS FORCEMENT DANS L'ATELIER.
- plantes
dont on peut mesurer la croissance -
- boîtes
vides
- argent
(caisse de la Coopé)
- verres,
bols, casseroles, seau, bouteilles, cuillers...
- entonnoir
- cartes murales
- outils
pour fabriquer les chefs-duvre de calcul.
CE
QU'ON PEUT FABRIQUER (voir les Brevets).
L'EMPLOI DU TEMPS EST FONCTION DE L'AGE DES ENFANTS ET DES POSSIBILITÉS DE TRAVAIL.
A
lEcole Maternelle, c'est à tout
moment que l'on fait du calcul avec tout de même en principe une séance au cours de
laquelle on voit un fait de plus près. Distinguer les occasions qui se répètent, les
occasions nouvelles.
Au
CP et au CE on continue à exploiter
rapidement les nombreuses occasions du milieu : problèmes vrais et problèmes
inventés - libre recherche.
Déjà et
surtout au CE :
- séances
collectives de préférence le matin
- travaux
aux cahiers et fichiers auto-correctifs d'opérations notamment (au cours de séances de
travail libre)
- travaux
à l'atelier de calcul (de préférence l'après-midi pendant que les autres enfants sont
occupés aux ateliers d'imprimerie, de peinture, etc...
Mise en
route des plans de travail le lundi matin. Contrôle en commun le samedi après-midi.
Au
CM-FE, Par exemple :
-
Lundi : mise en route du brevet de la semaine.
- Mardi et
mercredi : problèmes pour les correspondants.
-
Vendredi : suite du brevet.
-
Samedi : contrôle du brevet ou épreuve d'examen.
La
préparation du brevet se fait aussi tout au long de la semaine pendant les temps libres.
Ateliers comme pour le CE. A l'Ecole Freinet : brevets mensuels (L'Educateur, n° 4
du 15 novembre 1960).
LA PRÉPARATION DE LA CLASSE.
On nous
objecte parfois que notre Méthode Naturelle de Calcul réclame « du métier »
puisqu'elle met le maître aux prises avec des situations toujours nouvelles.
A la
lecture de cette brochure, vous vous êtes aperçu que notre calcul n'est pas uniquement
occasionnel, qu'il l'est même de moins en moins au fur et à mesure qu'on s'élève dans
l'échelle des âges car interviennent de plus en plus les techniques des plans de
travail, des fiches-guides, des brevets, techniques pour lesquelles le maître n'a pas à
improviser, mais seulement à s'adapter. Voilà donc une large plate-forme de sécurité
pour les départs prudents.
Reste
l'aspect « aérien » du calcul : le travail « sur le vif ». On
nous dira que le débutant s'en tire mal. C'est normal : l'habileté s'acquiert par
l'expérience.
Voici la
méthode de travail personnel employée par la plupart des instituteurs de l'Ecole
Moderne :
Au cours de
la classe, nous nous efforçons d'oublier que nous sommes des maîtres d'école lourds de
soucis de programmes et d'examens. Nous essayons tout simplement d'être des hommes
ordinaires, avec une voix comme tout le monde. Nous travaillons - homme et enfants - à
informer d'autres enfants, nos correspondants.
Pour cela,
pas besoin de fiches de préparation.
Après la
classe, les derniers élèves partis, nous reconstituons sur un cahier spécial le film de
la journée. Si nous sommes pressés, notre compte rendu tient en une page. Si nous
disposons d'un certain temps, nous faisons plus copieux. L'habitude aidant, ce travail
devient de plus en plus facile.
Ainsi, à
tête reposée, nous voyons mieux où peuvent nous conduire les différentes pistes
entrevues au cours de la journée. Il nous est alors aisé de choisir celle que nous
explorerons le lendemain.
Peu à peu,
notre cahier se remplit. Nous pouvons toucher ce que nous avons fait : nous avons, pour
nous-même, pour nos collègues, pour l'inspecteur, pour les parents, des preuves de notre
bonne volonté.
Cette
auto-analyse qui nous fait prendre clairement conscience de nos erreurs, de nos oublis, de
nos réussites, est rentable à brève échéance. Bientôt nous ne pourrons plus nous en
passer.
Si nous
disposons d'un magnétophone, nous branchons l'appareil pendant la séance de travail et
le soir nous écoutons. Surprise ! nous intervenons trop et mal à propos, nous
n'entendons pas les réponses justes, ce sont toujours les mêmes qui parlent. Mais quelle
vie...
C'est avant
tout par les échanges d'idées sur la base de ces documents authentiques au cours de nos
réunions et de nos congrès que nous devenons de meilleurs ouvriers et aussi des
éducateurs plus lucides, plus conscients de leur rôle dans l'édification du monde de
demain.
POUR FACILITER LA PRATIQUE DU CALCUL VIVANT : LES
FICHES-GUIDES COMPLEXES
Nous ne
nous désintéressons cependant pas du fait que la technique indiquée ci-dessus,
relativement facile avec les tout petits et au CP et CE, se complique dès que doivent
être considérés les problèmes plus difficiles imposés par les programmes et par la
vie.
Il nous
faut d'une part, insister alors sur l'acquisition des techniques, et d'autre part
entraîner les enfants à la compréhension et à la réalisation des problèmes de plus
en plus complexes dont la pratique aiguise l'intelligence, ajuste les relations, précise
une infinité de notions et de processus dont la connaissance est un élément important
de culture.
Et quand
nous disons problèmes, nous voudrions bien dépouiller ce mot de tout ce qu'il
comporte d'artificiel et de mécanique du fait de l'emploi trop scolaire qu'on en a fait.
Nous
tâcherons alors de revenir à la réalité que les problèmes scolaires ont marquée et
paralysée. Tout est problème dans la vie, c'est-à-dire conjonction de faits qui
s'interfèrent et qu'il nous faut essayer de démêler avec un minimum d'erreur. Problème
de l'habillement dès le matin, du chauffage, du déjeuner à l'Ecole, à l'heure voulue,
à pied ou en auto, du travail aux champs ou aux ateliers, du magasin où on
s'approvisionne, du voyage qu'on fait ou qu'on prépare, de l'accident qui survient, des
projets qu'on imagine.
Il n'y a
qu'à chiffrer tout cela et nous aurons la variété la plus riche et la plus éducative
de problèmes liés à la vie et donc intéressants et formatifs.
Telle est
la réalité que nous voudrions exploiter. Mais il nous faut pour cela, comme en tant de
domaines d'ailleurs, nous désenvoûter de la scolastique et de ses formules mécaniques.
Dans ce
domaine aussi ce sont des formules de travail qu'il nous faut réintroduire dans nos
classes. Nous y parviendrons avec nos fiches-guides complexes.
Voici, pour
donner une idée du progrès que nous voudrions réaliser, un problème classique, auquel
nos enfants n'ont rien compris parce qu'il se pose pour eux comme une devinette, et la
fiche-guide complexe qui a été soumise aux enfants.
Problème d'examen
La
Coopérative scolaire de l'Ecole organise dans la forêt de Fontainebleau une promenade en
car pour 50 élèves. Le chauffeur demande 3 NF de l'heure et 1,20 NF le km. Sur la carte
au 1 /200 000e , le trajet total aller-retour mesure 80 cm. Les élèves
partiront de l'école à 8 h 30 et rentreront à 18 h.
1° Quelle
somme faudra-t-il débourser ?
2° La
Coopérative de l'Ecole versera 100 NF. Combien faudra-t-il demander à chaque
élève ?
L'institutrice,
Mlle Bonsignore (Ecole Freinet) dit : « Tout a l'air très simple dans ce
problème, et pourtant un seul élève a su le faire entièrement (sur les 21 enfants de
ma classe, échelonnés de 9 à 14 ans et, il est vrai, difficiles). C'est que jamais dans
la vie le problème ne se pose sous cette forme et qu'il faut être très entraîné à ce
genre d'exercices gratuits pour résoudre ce problème scolastique ».
Traduction
d'une fiche-guide complexe (nous avons
adapté le problème à un élément de notre vie).
Pour aller
à la neige, il nous faut louer un car de 33 places (enfants), plus 2 adultes
accompagnateurs, Pour la journée, là compagnie demande 150 NF.
Nous
devrons donner le pourboire au chauffeur, soit 10 % c'est-à-dire : 150 : 10 =
15 NF.
La dépense
totale sera de : 150 + 15 = 165 NF.
Nous louons
4 luges à 3,5 NF pour la journée, soit au total : 3,5 x 4 =14 NF.
8 paires de
skis à 3,5 NF la journée, soit : 3,5 x 8= 28 NF
Comme nous
montons en semaine, le restaurant accepte de nous faire un plat chaud et une soupe pour
2,5 NF par personne. Et il nous faut faire dîner le chauffeur, soit au total 36
personnes.
La dépense
sera de 2,5 x 36 = 90 NF.
La dépense
totale sera de :165 + 14 + 28+ 90= 297 NF
La
Coopérative scolaire verse 100 NF.
Il reste
donc à payer : 297 - 100 = 197 NF que devront acquitter les élèves, soit 33.
Chaque
élève devra donc payer : 197 : 33=
Nous ne pouvons pas calculer la distance sur une carte car il n'y a chez nous que tournants. La vitesse horaire en montagne est de même difficile à calculer.
Mais nous
pouvons compléter par le prix des équipements : pantalons, anoraks, souliers, skis,
etc... Tous calculs qui sont parfaitement à la portée des enfants et leur permettent de
décortiquer et de comprendre les problèmes complexes. Ils pourront ainsi développer le
sens mathématique et seront mieux à même qu'avec les autres méthodes de comprendre les
problèmes classiques d'examens en attendant qu'on les modifie et qu'on cesse de les
rédiger en rébus.
L'Ecole
Moderne va publier incessamment, outre les fiches-guides pour brevets, des fiches-guides
complexes, et des fiches-guides se rapportant aux éléments des B.T. de façon à offrir
un exemple riche et varié que les éducateurs pourront adapter aux besoins de leur
milieu.
A ce
moment-là, notre but sera atteint : en partant de la vie, et par la vie, nous
préparerons nos enfants à faire face là tous les problèmes exigés par les incidences
du milieu, par les programmes et les examens.
Avec nos
fichiers auto-correctifs pour l'acquisition des mécanismes nous aurons mis sur pied une
nouvelle méthode de calcul qui détrônera la méthode scolastique à base de leçons et
de manuels, parce qu'elle sera plus facile, plus vivante, plus intelligente, plus
efficiente et. plus éducative.
Le calcul
vivant et libre est la solution pédagogique d'aujourdhui et de demain.
DIASONOR
LE CALCUL LIBRE (2 tomes)
Pour
illustrer l'expérience menée dans sa classe, Maurice Beaugrand a préparé un montage
audio-visuel qu'il a présenté ensuite au Congrès de l'Ecole Moderne de St-Etienne
(1961).
Tous les
assistants ont alors été enthousiasmés.
La C.E.L.
vient d'éditer ce montage sous la forme maintenant consacrée des B.T. Sonores :
un disque 45 tours longue durée, douze vues diapositives 5 x 5 et un abondant livret de
commentaires.
DIASONOR
vous offre ainsi deux documents essentiels vous permettant d'entrer de plain-pied dans
l'ambiance d'une classe moderne au travail.
Deux tomes
vous offrent un horizon concret du problème qui vous a déjà passionné :
DIASONOR 2001 et 2002 Le Calcul libre I et Il
Chaque DIASONOR. 17 NF
Commandez à C.E.L., B.P. 282 - Cannes (A.-M.).
Franco de
port si votre règlement (3 volets de chèque C.C.P.) est joint à la commande.
LES FICHIERS
AUTO CORRECTIFS C.E.L.
Les
Fichiers auto-correctifs représentent une des réalisations maîtresses des Techniques
FREINET. Ils mettent à la disposition de l'enfant des exercices destinés à
l'acquisition des mécanismes en calcul (opérations, problèmes, exercices sur les
nombres complexes et géométrie), orthographe et conjugaison, dans les différents cours.
Leur originalité réside dans le fait qu'ils permettent à chaque enfant de travailler à
son propre rythme, sans être bousculé ni freiné par le niveau de ses camarades.
Ils se
présentent sous la forme
1° - De
fiches-demandes dans lesquelles sont posées les opérations à effectuer, ou les
problèmes à résoudre, ou les accords orthographiques à appliquer.
2° - De
fiches-réponses à ces demandes, permettant à l'enfant de corriger lui-même les
exercices proposés.
3° - De
fiches-tests conservées parle maître, qui donnent à celui-ci le moyen de contrôler les
acquisitions des élèves au fur et à mesure que ceux-ci avancent dans les difficultés.
4° - De
fiches-corrections donnant un travail supplémentaires aux élèves qui auraient oublié
une notion lorsqu'ils font une fiche-test.
Toutes
explications sont données sur l'emploi des fichiers dans les notices jointes à chacun
d'eux.
Un plan
général du fichier permet de voir à quelle notion correspond chaque fiche et
vice-versa, en même temps que la graduation des exercices.
Si bien
qu'il est possible de voir « où en est l'élève », et aussi de
« placer » à son niveau, un élève retardataire ou nouvellement arrivé.
Des plans
individuels (1 par élève) permettent de suivre le travail déjà fait par chaque
élève.
Ces fiches
sont imprimées sur carton léger, de couleurs différentes, suivant qu'il s'agit de
fiches-demandes, réponses, tests ou corrections.
Dans la
plupart des cas, ces fiches sont de format 10,5 x 12,5 cm, sauf pour les fichiers
d'orthographe d'accord C.M. et F.E. et de Géométrie pour lesquels, étant donnée la
longueur des textes, il a fallu adopter le format double 12,5 x 21.
Il faut en
général un fichier par 10 élèves, ce nombre étant toutefois fonction de
l'organisation de la classe.
Ajoutons
que nous pouvons fournir également des classeurs en bois verni pour le rangement de ces
fichiers :
- au format
de 140 x 130x 115 pour les fiches ordinaires,
- au format
de 220 x 100 x 140 pour les fiches grand format.
Voir
d'autre part la liste des fichiers livrables.
LISTE DES FICHIERS DE CALCUL(1)
(CLASSES PRIMAIRES)
Additions- Soustractions (580 fiches).
Multiplications-Divisions 1re Série (218 D - 218 R).
Multiplications-Divisions 2e Série (182 D - 182 R).
Nombres Complexes (56 D - 56 R). Grand format.
Géométrie (86 D - 86 R - 6 Tests). Grand format.
Problèmes Cours Elémentaire en NF (129 D - 129 R).
Problèmes Cours Moyen 1re Année, en NF (168 D - 168
R).
Problèmes Cours Moyen 2e Année, en NF (196 D - 196
R).
Problèmes Classe Fin d'Etudes, en NF (210 D - 210 R).
(1) Il
existe aussi des Fichiers auto-correctifs pour le français :
- Fichier
Orthographe d'accord C.E.
- Fichier
Orthographe d'accord C.M. - C.F.E.
- Fichier
de Conjugaison.
*
UN AVIS AUTORISE
Durant cinq
années consécutives, le Laboratoire de Pédagogie expérimentale de l'Université de
Lyon a procédé à des vérifications sur la valeur pédagogique des fichiers
auto-correctifs et plus spécialement des fichiers auto-correctifs utilisés pour
l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe.
Nos
observations et les résultats recueillis au cours des contrôles scientifiques auxquels
nous nous sommes livrés témoignent d'une supériorité marquée de ces instruments sur
les techniques courantes proposées par les manuels.
Non
seulement le fichier auto-correctif est un outil pédagogiquement rentable, mais son
emploi a, pour l'enfant, des conséquences psychologiques trop souvent méconnues. En
répondant aux besoins de l'élève, à l'exercice de sa propre expérience et en
favorisant une prise de conscience objective de ses lacunes, il devient un facteur
d'émulation et dé progrès. L'individualisation de l'enseignement, ainsi comprise,
respecte ,les rythmes particuliers du travail scolaire. Rares sont les techniques
d'apprentissage qui permettent de mener de front instruction et éducation avec fruit. Le
fichier auto-correctif, soigneusement dosé, permet de résoudre ce problème pédagogique
difficile. Il est donc, pour nos classes, un instrument de progrès fondé sur les
principes essentiels de la psychologie de l'enfant et sûr ceux de son affectivité. C'est
une technique humaine qui ne peut que rapprocher maître et élèves par la confiance
réciproque.
L'auto-correction
individuelle, par le fichier est un moyen d'avenir qui procède d'un esprit pédagogique
nouveau. Il présente un avantage précieux rarement atteint par le manuel classique,
celui de faire naître l'enthousiasme chez l'enfant dans son travail scolaire et, en lui
redonnant confiance, de l'acheminer progressivement vers la pratique des tâches
personnelles précises.
N'est-ce pas là l'un des buts principaux de notre action ?
R. DELCHET,
Directeur du Laboratoire
de Pédagogie expérimentale
de l'Université de Lyon
LISTE DES CAHIERS AUTO-CORRECTIFS
INDIVIDUELS DE CALCUL
(CLASSES PRIMAIRES)
N° 1 - Table d'addition C.P.
N° 2 - Table de soustraction C.P.
N° 3 - Additions-Soustractions (0-100) C.P.-C.E.1.
N° 4 - Table de multiplication-division C.P.-C.E.1,
N° 5 - Additions-Soustractions (100 à 1 000) C.E.
N° 6 - Multiplications-Divisions par 1 chiffre C.E.
N° 7 - Multiplications-Divisions par 2 chif C.E.2.-C.M.1.
N° 8 - Additions-Soustractions C.E.2-C.M.1.
N° 9 - Divisions par 1 et 2 chiffres C.M.
N° 10 - Longues multiplications et divisions C.M.
LYCÉES et COLLÈGES !!!
LES CAHIERS AUTO-CORRECTIFS
INDIVIDUELS D'ARITHMÉTIQUE
ET D'ALGÈBRE
Un livret
de 32 pages, sous forte couverture, avec fiches de travail, livret des résultats et tests
de contrôle. Pour chaque élève et pour chaque cours suivant la liste ci-dessous :
N° 1 - CLASSE DE 5e : Arithmétique
littérale et préparation à l'Algèbre.
N° 2 - CLASSE DE 4e ET 3e :
Arithmétique (Rapports et proportions. Nombres premiers. Racine carrée. Radicaux).
N° 3 -
CLASSE DE 4e : Algèbre (Calcul algébrique).
N° 4 - CLASSE DE 4e ET 3e : Algèbre
(Décomposition en produits de facteurs. Fractions rationnelles. Equation du 1er
degré à une inconnue).
N° 5 -
CLASSE DE 3e : (Equation du 1er degré à deux inconnues.
Inéquations. Fonctions. Equation du 2e degré).
L'enseignement
de l'Arithmétique et de l'Algèbre comporte d'une part la compréhension du sens des
calculs et d'autre part l'acquisition de leur mécanisme. Le rôle du professeur est de
donner le sens des calculs.
Le rôle
des cahiers auto-correctifs est de faire acquérir les mécanismes.
Comment
sont conçus ces cahiers ?
Toutes les
difficultés ont été groupées et chaque paragraphe en étudie une seule. Un exemple
résolu est donné en tête de chacun. Des exercices nombreux, progressifs et
judicieusement choisis sont ensuite proposés. lis sont destinés à faire acquérir
définitivement la notion étudiée.
Comment
employer ces cahiers auto-correctifs ?
Ces cahiers
peuvent être utilisés comme des manuels. Tous les élèves de la classe font alors, en
même temps, le même exercice. Ainsi professeur et élèves se familiarisent avec l'outil
nouveau.
Mais on ne
tardera pas à s'apercevoir que certains élèves voudraient avancer plus vite, alors que
d'autres ont du mal à suivre. On accordera aux premiers, comme une récompense, le droit
d'avancer seuls. On laissera les derniers accomplir seuls, leur lente progression. Le
professeur suivra attentivement le groupe des moyens qui continuera à travailler au
rythme collectif.
Dans les
classes modernisées, pendant les heures de travail rédigé, chaque élève avance à son
rythme personnel en sollicitant, s'il y a lieu, l'aide du professeur.
Pour tous
renseignements, écrire à :
C.E.L. B.P.
282 - Cannes (A.-M).