Les trésors n'y manquaient pas : tentures
lumineuses, coussins chamarrés, couvre-lits patiemment brodés, tapisseries
si méticuleusement soignées, bric-à-brac charmant d'objets familiers,
lampadaires, lampes de chevet, vases et pots, vaisselle et céramique qui
attendaient la main secourable qui leur donnerait vie. Je regardais, sans
bien en deviner l'origine et la fonction, un étonnant assemblage de panneaux
sur lesquels étaient collés d'innombrables carreaux de céramique, très
lourds à manier et qui devaient, paraît-il, être mis à la verticale pour
jouer leur fonction... D'avance je frémissais de l'entreprise...
Un peu affolées, nous nous mettons au travail.
Peut-être faudrait-il boucher cette grande baie ! avec du papier
« kraft » ?
Aussitôt, les dévoués camarades du Calvados amènent
les 60 kg du dit papier, On roule, on déroule, on mesure, on coupe. Hissées
sur la pointe des pieds, en haut d'une chaise posée sur une table, courageusement,
nous exécutons des exercices de haute voltige pour arriver à boucher,
ce qui à première vue est un ennui : devant la baie rendue borgne,
nous paraissons plus rassurées.
Elaborons ! Cloisonnons ! Coin gauche
chambre ; coin droit : séjour, salle à manger ; centre :
salle de jeu.
De nouveau nous considérons les lieux. Un pas en
arrière nous permet une juste évaluation.
- Mon dieu que ce papier kraft est laid !
Il faut le faire disparaître !
Et c'est la valse de toutes les tentures pouvant
rendre inoffensif notre morne papier. Un instant il semblerait qu'on ait
atteint l'effet désiré. C'est ce moment que choisit, pour « visionner »
notre oeuvre un nouvel arrivant...
Un bref regard coulé vers lui nous renseigne une
moue peu enthousiaste mais toujours polie indique nettement que nous ne
sommes pas en pleine réussite.
‑-Allez, décrochons, recommençons !
« Ah ! cette baie vitrée ! il faudrait
la supprimer ! Tant pis. Laissons-la ! Organisons le coin de
feu ! »
Miracle ! ces carreaux de céramique qui devaient
tenir à la verticale, c'est une cheminée ! et quelle cheminée !
si jolie, si réelle qu'on s'y chaufferait volontiers. Et voici la table
de céramique, le petit coin de lecture, les tentures, les tapis, les marionnettes !
Là... « ça tourne rond » !
La chambre à coucher s'organise facilement elle
aussi... Reste la baie vitrée, et par-dessus, une accumulation de tentures,
de céramiques, toutes aussi jolies les unes que les autres dont le nombre
augmente avec l'arrivée des camarades et rend notre choix de plus en plus
difficile.
Courageusement nous faisons des essais. Le temps
passe. Voici l'heure d'assister au C.A.
Jamais cette maison ne sera prête pour demain.
Quand nous revenons, deux heures plus tard, la salle à manger a pris une
allure définitive, mais dans la salle de jeu, le papier kraft est toujours
là, imposant dans sa morne laideur...
Alors, résolument, tandis que les camarades assistent
à la première séance du samedi soir, nous recommençons - nous démolissons
- Bertrand armé de son auto-clouteur nous aide.
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