TEMOIGNAGES 

·        Facteurs stimulants et déclencheurs de la production des textes libres
-           Le journal (D. Carré)
-           Imprimer rapidement, c'est possible (D. Roycourt
-           Un quotidien audiovisuel (P. Varenne)

·          Mise au point du texte libre
-           Premier témoignage (S. Heurtaux)
-           Deuxième compte rendu (J. Terraza)
-           Schéma de fonctionnement du texte dans une classe
-           Troisième témoignage (D. Roycourt)
-           Texte libre et éveil linguistique (J.-M. Fouquer)

·        Le texte libre se prolonge par des activités d'expression
-           Expression corporelle
-           Peinture
-           Notre cinéma à nous
-           Nos histoires en photo  

·          Travaux collectifs autour des textes
-           A l'école maternelle
-           Au cours élémentaire
-           L'écriture poétique au CM2 (J.-C. Dumartin)
-           L'accueil du groupe-classe (J. Go)
-           Lier le lire-écrire et l'écrire-lire (P. Hétier et A.-M. Mislin)  

·          Genèse du texte libre à l'école maternelle
-           Comment naissent les BD collectives .
-           Le journal des moyens

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Facteurs stimulants et déclencheurs de la production des textes libres 

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Le journal 

Le journal scolaire a toujours été dans ma classe une motivation essentielle pour l'écriture. Selon les moyens matériels à notre disposition, selon les années, selon les modes, il a pris des aspects divers. 

Le tirage s'est fait au limographe, en partie à l'imprimerie, au duplicateur à alcool, au duplicateur à encre (grâce à un graveur de stencils électroniques). Maintenant, suivant en cela d'autres camarades, nous sommes passés au photocopieur. Cet outil qui par ailleurs devient indispensable dans une classe dès qu'on y a goûté, permet une pratique renouvelée et particulièrement intéressante du journal. 

Voici, à titre d'exemple, comment cela se passe en ce moment dans ma classe. 

Choix des textes 

Dès qu'un enfant a écrit quatre textes, il les présente et en propose un au groupe. Après accord de la majorité, ce texte passe dans le journal. Si c'est nécessaire, il est revu par l'auteur, un groupe ou éventuellement toute la classe. Ce moyen permet de solliciter l'écriture (il faut avoir quatre ou un multiple de quatre textes). On a aussi de cette façon, pour chaque enfant, son meilleur texte du moment. 

Frappe 

Le texte choisi est tapé à la machine par moi ou par l'auteur, Il est frappé en colonnes de 8 cm de large. 

Mise en pages

Nous réalisons une maquette sur feuilles 21 x 29,7, Il en faut quatre pour un journal. Un cadre de mise en pages permet de tracer rapidement les colonnes au crayon. 

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Carton évidé servant de cadre de mise en page

On joue ensuite de la colle et des ciseaux pour répartir textes et illustrations. 

La première page Comporte le titre et les nouvelles de l'école et de la classe. Dans les autres, on trouve textes, reportages, B.D. enquêtes, poèmes, enfin tout ce qui peut être dans un journal. 

Grâce au labo-photo de l'école, nous pouvons illustrer de temps en temps nos articles par des photos.

Cette phase de mise en page est un véritable travail esthétique, proche de celui des professionnels. Au début, j'en suis l'artisan mais les enfants y prennent peu à peu une part de plus en plus grande. 

Tirage 

Nous arrivons à la partie technique qui nécessite l'emploi d'un photocopieur permettant la réduction de documents. N'ayant pas à l'école ce matériel, j'utilise celui de l'O.C.C.E. ou du C. D. D. P. 

A partir de nos quatre pages de maquette nous allons obtenir un journal de format B4 (26 x 36 environ) plié en deux. Nous retrouverons nos quatre pages mais chacune réduite au format 26 x 18. 

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Voici comment j'opère. 

Les pages 1 et 4 sont placées côte à côte sur la vitre du photocopieur. J'affiche la réduction à 82 % et le tirage sur format B4. Ce tirage effectué, il reste à photocopier au verso les pages 2 et 3. 

Le même travail pourrait se faire sur format final 21 x 29,7, mais là, il faut travailler avec une réduction de 50 % ou 65 % selon les possibilités du photocopieur. 

Je suis pour l'instant très satisfait de cette pratique du journal. La présentation en est bien meilleure. La simplicité de fabrication permet des tirages rapprochés. Ainsi, un texte choisi paraît au plus tard dans les quinze jours qui suivent. 

Cette formule est ouverte à d'autres innovations. Ainsi, depuis que notre nano-réseau est installé, nous travaillons avec un logiciel de traitement de textes et une imprimante.

Daniel CARRÉ

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Imprimer rapidement c'est possible 

Une expérience personnelle et l'esquisse de quelques pistes. 

Je viens de reprendre une « classe d'application » à la périphérie d'Auxerre, après avoir longtemps enseigné dans une classe unique. Partager la classe avec une autre enseignante non formée aux techniques Freinet, recevoir des enfants sans autonomie d'un C.P. traditionnel et recevoir des normaliens dès les premiers mois de classe, créent une situation « d'urgence ». 

Je me retrouve débordé, acculé à une efficacité rapide. L'organisation de la classe est en place mais il faut une période de rodage où les enfants testent la validité des nouvelles structures et la réalité des projets mis en place. 

J'ai apporté des journaux réalisés dans la classe de copains et installé un coin imprimerie-reproduction. 

L'idée de réaliser notre journal accroche (les enfants n'en ont jamais fait, ce qui est parfois un avantage). Rapidement, on écrit beaucoup dans la classe (est-ce un hasard si les problèmes d'écriture c'est mon dada ?). Mais le travail à l'imprimerie est long, artisanat méticuleux, permettant des apprentissages aussi formateurs que celui de trouver une organisation de la classe adéquate, d'apprendre à travailler en équipe et d'acquérir des compétences pour imprimer proprement. 

Seulement, la liste des textes à imprimer en attente s'allonge. Il faut trouver une solution. 

On en discute en réunion de coop diront les initiés. Seulement, en début d'année, avec de nouveaux enfants, la réunion de coop ne vit que par la volonté de l'instit. Éternelle histoire de l'énigme des origines : est-ce la poule, est-ce l'œuf ? 

Est-ce l'apport des outils et techniques que l'instit met en place ou la structure coopérative et l'organisation de la classe qui est la genèse d'une classe Freinet ? 

Inséparablement les deux ! 

Nous devons donc utiliser les outils les plus performants pour arriver à nos fins : Il faut nous débarrasser de notre verbiage pédagogique, de ce mot nouveau ou nouvelle qui nous fait tant de tort parce qu'il fait croire que nous cherchons la nouveauté avant tout, alors que ce qui nous préoccupe exclusivement c'est de rendre plus rationnel, plus intéressant et plus efficace notre travail scolaire... Nous employons les outils qui nous paraissent le mieux répondre à nos besoins.  

C. Freinet. 

J'ai donc introduit et utilisé le traitement de texte que Roger Beaumont m'avait envoyé pour être testé. 

J'ai été agréablement surpris par la facilité et la rapidité avec lesquelles les enfants se sont emparés de cet outil. 

Après une séance d'initiation, les enfants ont compris le fonctionnement de ce logiciel mis au point par le groupe du Rhône. Rapidement, un accès en autonomie est organisé. 

Qu'attend-on pour diffuser massivement de tels outils qui, loin d'être des gadgets modernistes, doivent redonner de l'oxygène à tous les camarades qui travaillent dans des conditions de travail d' « urgence ». Ce qui n'empêche d'ailleurs pas de condamner publiquement ces conditions. 

Il est également important de souligner pour les informatiphobes ou les inconditionnels du modernisme que l'imprimante ne remplace pas (?) ne rend pas inutile l'imprimerie, comme les feutres ne remplacent pas les crayons de couleurs. C'est faute de connaître leur véritable palette d'utilisations que l'on confond et réduit tout à des équations simplistes : imprimerie en 1925/imprimante en 1986. 

Coloriez des photos noir et blanc avec des feutres ou des crayons de couleurs, vous verrez la différence. Et puis, l'imprimerie et le limographe ont-ils été concurrents ? Utilisait-on exclusivement l'imprimerie pour certains, le limographe pour d'autres ? Certes non ! 

En fait, le traitement de texte plus imprimante (il faut ajouter le photocopieur) accroissent la palette des outils qui vont permettre la communication et la magnification des productions des enfants, principe moteur de la pédagogie Freinet. 

Si on accroît la palette des outils de reproduction, en rendant donc possible un choix de la part des enfants, on approfondit véritablement leur réflexion sur le support imprimé, sur la lisibilité, sur les délais d'impression, sur l'utilité ou non des couleurs, riche conscientisation au problème d'adéquation entre la forme et le fond. 

Et on ne restreint pas la réflexion et la gestion coopérative, bien au contraire. 

En définitive, loin de se gargariser de mots sur les technologies nouvelles, la modernité, le modernisme, l'important est de fournir aux enfants des outils facilitant la communication. 

Bien vite des habitudes institutionnelles et relationnelles de fonctionnement vont s'installer.

LA CHAISE ET LES LUNETTES MERVEILLEUSES 

Il était une fois, une chaise qui ne voyait pas clair.
Un jour qu'elle se promenait, dans la maison, elle vit une paire de lunettes qui n'était pas comme les autres.
C'était une paire de lunettes MERVEILLEUSES. Elle prit la paire de lunettes, la mit sur ses yeux et regarda autour d'elle.
Tout était clair.
Elle s'écria « Youpi ! Youpi ! Je vois clair ».
Elle s'en alla se remettre à sa place, Elle dit :
« Ah ! ça fait du bien de voir les fleurs, le jour levant, et la nuit noire qui promène la lune. »

Estelle FERRY
Hélène PAUS
 

La classe va se structurer autour de ses outils de production, d'échange de communication. 

C'est gagné !

La communication, l'expression ou la production personnelle, ou répondant à un projet coopératif, deviennent alors les motivations principales d'apprentissages d'autant plus efficaces qu'ils accroissent la capacité et l'efficacité de l'expression en autonomie. 

Denis ROYCOURT

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Un quotidien audiovisuel dans une classe rurale (G. S. - C. P. - C.E. 1) 

Afin de redonner tout son sens à l'écrit, j'ai institué la communication des textes produits dans la classe par la lecture de notre mini journal quotidien. 

Histoires, contes, poèmes sont écrits sur feuille mobile puis rangés près de la machine à écrire (à moins qu'ils aient été abandonnés par leur auteur insatisfait). Le soir, ils sont tapés par le maître. Les enfants jeunes sont encore incapables de le faire parfaitement. 

Le matin suivant, chaque enfant redécouvre son texte dont certains détails ont été oubliés. C'est alors une agréable surprise et une occasion de saisir le rôle de mise en machine del'écrit pour le conserver. Il arrive que le maître ait corrigé une erreur (de français) qui nuit à la compréhension. L'enfant remarque ces modifications (assez rares) et les commente. La feuille doit être ensuite illustrée.

Un soir du deuxième jour, les feuilles sont réunies par le maître qui les agrafe sous couverture. Chaque jour, un journal est enregistré sur cassette à l'intention de ceux qui ne sauraient le lire seul. C'est donc ainsi que les enfants peuvent prendre connaissance de ce qui a été écrit (écrit pour être lu !) deux jours avant. Ils peuvent lefaire seul, ou avec un copain, ou avec le magnétophone. Il arrive alors qu'un enfant s'adresse immédiatement à un auteur parce qu'il y a quelque chose qu'il n'a pas bien compris, ou parce qu'il a quelque chose à dire, sans attendre. Mais,habituellement, il doit attendre le temps réservé aux communications collectives, où tout ce qui a été créé individuellement est présenté et commenté. 

On peut alors « dire » un texte qui a particulièrement été apprécié. On peut aussi avoir envie de le reprendre pour le modifier, le compléter. 

Pierre VARENNE
Ecole de Champlay

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Mise au point du texte libre 

Premier témoignage 

Le riche et le pauvre 

Le riche a beaucoup d'argent, le pouver n'avait rien. Des jour le riche et le pauvre se battaient car il a pas d'argent. Le riche a beaucoup d'argent, il s'acheté des habits et le pauvre ses acheté rien car il n'a pas d'argent. Mais un jour, le pauvre jou au l'auto, il ganne un millions et le riche a vue faire comme le pauvre qui avait ganner à l'auto. Alors, le riche a tredu son argent à jeux à l'auto. Maintenant, ses le pauvre qu'é riche mais le riche est pauvre maintenant. 

Thierry m'apporte ce texte. Je le lis tout haut. Il dit : « J'ai répété toujours la même chose. » Comme je n'ai pas le temps de corriger « à chaud », je lui propose de se faire aider, s'il veut que ce soit corrigé vite de façon à le présenter à l'heure suivante ; il va trouver Isabelle. 

Remarques. - Thierry est en 5e P.A.* Il est de ceux qui ont le plus de difficultés pour s'exprimer, à l'écrit comme à l'oral. Mais il a un grand désir de le faire et de bien faire.

Par rapport au début de l'année, je remarquequ'il va à la ligne, utilise les majuscules, barre lesET superflus et les remplace par des virgules, metdes points ;qu'il a un souci d'accord verbe-sujet (se battaiENT) 

·    Texte refait avec Isabelle : 

Il était une fois un riche et un pauvre, L'un avait beaucoup d'argent, et l'autre pas du touts. Le plus riche pouvait s'acheter des vêtements X que le pauvre ne pouvait pas. X

Mais un jour il jouerent au loto et puis le malheureux gagna un millions, tandis que l'autre perdit tout son argent. Alors se futs le contrerent. 

Thierry et Isabelle me demandent si ça va. Je leur signale qu'une phrase est incorrecte (X) et que la fin est un peu incomplète.         

Je remarque aussi que dans le premier texte, le riche et le pauvre se battaient.

Thierry répond : Oui, parce que le pauvre était jaloux du riche.

Je propose donc à Thierry de récrire son texte auprès de moi en tenant compte, quand cela lui convient, des corrections d'Isabelle, en complétant avec ce qu'il n'a pas dit et en me demandant l'orthographe des mots à chaque fois qu'il en a besoin. 

·    Texte définitif 

Le riche et le pauvre 

Il était une fois un riche et un pauvre. L'un avait beaucoup d'argent, et l'autre pas du tout.Le plus riche pouvait s'acheter des vêtements et des jouets ; le dimanche, il était servi comme un roi à table et à Noël il avait de très beaux cadeaux. Le pauvre était jaloux du riche et quand ils se rencontraient, ils se tapaient dessus.

Un jour, le pauvre joua au loto et il gagna un million. Le riche voulut faire comme lui et il perdit tout son argent,

Maintenant, c'est le contraire, ils ne sont plus jaloux car c'est chacun leur tour d'être pauvre. 

Au moment d'écrire : Le plus riche pouvait s’acheter des vêtements, Thierry me dit : Et des jouets ; à table le dimanche il était servi comme un roi et à Noël il avait de très beaux cadeaux. 

Je lui suggère d'écrire cela aussi. (C'était quelques jours après les vacances de Noël ; on le devine, Thierry est de famille très modeste.) 

Pour la suite, Thierry s'est débrouillé tout seul,sauf pour le temps des verbes : voulut et perdit, pour lesquels il voulait employer le plus-que-parfait, ce qui changeait le sens de laphrase. 

Sur quinze textes de Thierry, deux seulement ont été travaillés de cette façon. Les autres étaient mieux écrits. 

·    Sonia a beaucoup de difficultés d'expression écrite, elle est en 5e P.A. 

Avec Suzanne, élisabeth et moi on faisait le file. quand Sylvia faisait mettre le linge elle dit àRose : va chercher des épingles à linge et elle mettait les épingles a linge sur les affaires.  Sonia 

La classe est invitée à chercher comment elleaurait pu « mieux dire ». 

Suzanne, Elisabeth et moi, nous représentions le fil qui sevais à tendre le linge Ouand Silvia épinglait le linge, elle dit à Rose : « Va chercher d'autres épingles à linge. » Et après les avoir ramener, Rose les a posées sur les affaires encord mouillé.   Bruno 

suzanne, Moi, élisabette. Nous avons fait lefile, quand-t'a sylvia commencer à Mettre lelinge, et elle pronoca le nom de rose elle lui dit va Me chercher les épingles, à linge et elle accrocha le linge.   Yamina 

Nous écoulons toutes les versions.

Nous reprenons chaque membre de phrase de Sonia pour savoir où il y a «  incorrection », pour aboutir à une manière simple de dire son texte. 

Avec Suzanne et Elisabeth, nous représentions le fil.

Sylvia étendait le linge. Elle demanda à Rose :

« Va me chercher d'autres épingles » et elle attacha les draps sur le fil. 

Fréquence de ce travail : deux fois dans l'année. 

Simone HEURTAUX 

P.A. : programme allégé.

 

 

Deuxième compte rendu

1.       LE TEXTE 

Ecrit par un enfant à problèmes pour provoquer.

Choisi par l'enfant pour qu'il soit imprimé, ce qui entraîne obligatoirement une mise au point.

C'est la règle dans la classe. 

Transcription du texte : 

Je trouve que cette classe est nule, on devoirs se bargaré, et se disputé avec les filles pendant toute la journée. On devoirs reste enclasse pour faire le sport et caser les vitre et se seré le maître qui pailleré. Il fautrait faire les math comme ça : 1 + 1 = 2 2 + 2 = 4 puis après c'est fini. Les fiches il faudrait les découpé en petits carres pour joué au loto. il faudrai casse tout les bureau pour allumé la cheminé.Les filles il frodorait les mettre dans les cmaps des nudisme le Metre il fodrait le maitre chezles fous. Il fodrait entrait à 10 et sortir à10 h e 1 secondes. en français il fodrait crabouille le tableau et à la fin il frodra faire soté la classe. ex que c'est possible ? oui ou non 

FIN 

Travail de mise au point : 

Le texte est polycopié par l'enfant, tiré à la machine à alcool et distribué à la classe (un exemplaire à chacun des 28 élèves).

La classe, moins cinq qui refusent ce travail, se divise en 4 groupes et travaille pendant 20 mn sur un passage du texte pour une première phase de mise au point (orthographe surtout).

Ensuite, la classe se regroupe. Le texte est repris phrase par phrase, de la manière la plus

classique et copié sur une affiche par un secrétaire. 20 mn).

Un débat difficile est né quand nous avons abordé le problème de la mise à l'écart des filles dans un camp de nudistes. Je suis intervenu très souvent d'une part pour secouer les filles qui restaient passives devant cette agression, d'autre part pour signifier que je ne voulais pas que le texte imprimé contienne ce passage. L'auteur a été amené à choisir entre la censure ou l'abandon de son texte pour le journal. Il a choisi la censure. Des enfants ont proposé de supprimer aussi le passage du maître chez les fous. J'ai répondu que je me sentais concerné mais que j'acceptais cela de la part de l'auteur. Finalement le passage me concernant a quand même été enlevé.

Je reconnais que ces remaniements ôtent au texte la presque totalité de son sens symbolique mais le désir de se voir imprimé était très fort chez l'enfant. Ainsi, nous avons publié un autre texte que le texte initial, chaque texte ayant sa fonction, dans les deux cas gratifiant pour l'auteur. 

Texte imprimé : 

Je trouve que cette classe est nulle. On devrait se bagarrer et se disputer avec les filles pendant toute la journée. On devrait rester enclasse pour faire le sport. On briserait les vitres     et ce serait le maître qui payerait. Il faudrait faire les math comme ça : 1 + 1= 2, 2 + 2 = 4 puis ce serait fini. Les fiches, il faudrait les découper en petits morceaux pour jouer au loto. On casserait les bureaux pour allumer la cheminée. Il faudrait rentrer à 10 h et sortir à 10 h 1/2. En français, il faudrait gribouiller tout le tableau. Pour finir, il faudrait faire sauter la classe.

Est-ce que c'est possible oui ou non ?

Jacky

 

II. EXPLOITATION ET PROLONGEMENTS 

a) Je reconnais que la nature du texte peut susciter les plus grandes réserves quant à l'exploitation qui a suivi. Mais je n'hésite pas à prendre comme support de travail en français un texte d'enfant s'il se prête à ce que je veux enseigner aux enfants. C'était le cas. Pourquoi ne pas prendre un texte d'auteur ? Parce que ce texte a mobilisé la classe pendant une heure. Les enfants le connaissent, en sont imprégnés, donc ils n'ont aucun effort à faire pour le pénétrer. Ils sont donc disponibles pour exercer une observation sur la forme et les moyens mis en oeuvre pour l'écrire. Je le crois. 

b) Quelques jours plus tard : 

·          Utilisation du texte pour un travail d'observation et d'analyse sur le conditionnel. 

- Travail auditif.

- Travail visuel.

- Approche pour une prise de conscience que le conditionnel est l'outil qui permet d'exprimer les situations imaginaires, irréelles, désirées... 

Le travail a été oral. Je n'ai pas noté ce qui s'est passé car je n'ai pas pensé que je ferais ce compte rendu. Nous avons essayé de percevoir auditivement et visuellement les signes phonétiques et graphiques ainsi que leurs correspondances qui nous permettaient d'affirmer que nous étions dans l'imaginaire. 

Tout le monde savait déjà que nous étions dans l'imaginaire (c'est pour cette raison que j'avais choisi le texte). Nous cherchions ce qui permettait de l'exprimer (les moyens). Ici, nous travaillions au niveau du décodage : Comment quelqu'un (le lecteur du journal, les corres, etc.) qui ne connaît pas l'histoire parvient-il à admettre que ce texte est imaginaire ? Tout le monde dans la classe a pu répondre. De ces réponses, je tirais ce qui était pertinent à l'oral et à l'écrit. Par exemple : Ce serait le maître qui payerait en l'opposant à : Ce sera le maître qui payera ou à : C'est le maître qui paye. 

Par ces modifications, nous passions du réel à l'imaginaire, de l'imaginaire au réel et en même temps, nous manipulions consciemment les outils et les moyens qui nous permettaient de le faire. 

Passée cette phase d'observation et d'analyse du phénomène, j'ai provoqué une séquence directive, Obligeant les enfants (qui ne se sont d'ailleurs pas fait prier) à exprimer des faits ou des événements irréels, imaginaires en utilisant le conditionnel. 

Quelques exemples : 

On serait des Martiens qui attaqueraient la Terre et on détruirait tout le monde.

Nous tournerions un film, nous serions les héros et on sauverait la justicière. 

·          Ensuite, nous cherchons des textes d'auteurs parmi lesquels nous gardons celui-ci : 

Si le monde était à l'envers,
Je marcherais les pieds en l'air
J'irais à la plage en décembre,
Le jour, je garderais la chambre
Deux et un ne feraient plus trois...
Quel ennui, ce monde à l'endroit.

c) Le lendemain, je propose aux enfants de passer de l'irréel au réel. Ils doivent écrire des phrases ou des séquences se passant dans le réel puis par modification du verbe passer dans l'irréel. Deux exemples parmi la multitude proposée par les enfants : 

Réel : On écrira un roman d'aventures qui se passera loin, très loin. Trois personnages se poursuivront sans jamais se rattraper.

Irréel : On écrirait un roman d'aventures qui se passerait loin, très loin. Trois personnages se poursuivraient sans jamais se rattraper.

Réel : Tu entreras clans une grotte, tu découvriras trois squelettes, tu partiras en courant.

Irréel : Tu entrerais dans une grotte, tu découvrirais trois squelettes, tu partirais en courant. 

Ces deux exemples seront consignés dans le classeur de français. 

d) En fin de semaine, nous ferons une dictée dont le texte passe du réel à l'irréel. 

Classe C.M.1-C.M.2., 28 élèves, mai 1981

Jacques TERRAZA 

Quand un problème se pose, comme ici l'expression de l'agressivité, c'est une occasion qu'il faut saisir pour rechercher comment l'écriture peut « rendre » cette agressivité dans d'autres textes libres et si aucune production ne permet de présenter des solutions au problème posé, je recherche des textes d'auteurs que je propose aux enfants d'analyser dans le but de voir comment exprimer l'agressivité, comment la canaliser vers l'humour. Il n'y a pas antinomie entre expression spontanée de l'enfant et apprentissage de l'expression écrite. 

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Troisième témoignage 

Stratégie d'apprentissage : aider les enfants à s'approprier les règles d'écriture (techniques graphiques, maîtrise syntaxique, capacité discursive) tout en permettant que cet apprentissage reste celui d'une expression singulière. 

I. INTERACTION ADULTE ENFANT 

J'essaie de me rendre le plus disponible possible pour aider un enfant pendant l'écriture de son texte s'il le réclame, et plus généralement, pour relire, avec son auteur, le texte qui vient d'être écrit. Ce n'est malheureusement pas toujours possible, pour des raisons organisationnelles et temporelles, je veille alors à ce que tous les enfants bénéficient de ce feedback « correctif » à un moment ou à un autre. 

Pendant ce travail, je supprime devant l'enfant les plus grosses incorrections, je corrige certaines erreurs orthographiques et lui indique celles qu'il peut corriger (je n'hésite pas à utiliser et faire utiliser le dictionnaire). Je renvoie certaines erreurs dont je juge l'enfant mûr pour s’en débarrasser, à un travail individualisé. Mais j'essaie surtout que l'enfant arrive à produire l'effet qu'il désire en l'aidant à recentrer son énonciation sur l'effet désiré. Je n'hésite donc pas à lui donner des procédés pour débarrasser son texte d'éventuelles scories. 

Exemple : Marie-José présente ce texte simple à la « correction » du maître : 

Chanson 

Je cherche des poux dans la tête de Frimousse qui tombé d'une échelle de 1 m. Il a eu une bosse sur sa caboche son père l'a appelé pour jouer à se faire des bosses mais il n'a pas voulu.

Marie-José

 Après relecture, Marie-José justifie son titre par le jeu de répétitions du phonème [u] (poux, frimousse, jouer, voulu) et de l'écho des syllabes bos et boch dans son texte. 

Le maître lui indique à titre d'exemple une « scorie » à la ligne 3 : « l m », sur laquelle d'ailleurs Marie-José semble avoir hésité, et lui propose d'y appliquer sa première règle d'écriture (répétition du phonème ([u]). Rapidement « douze » est trouvé. Ensuite, Marie-José est invitée à retravailler la fin de son texte avec sa deuxième règle d'écriture. 

Voici le texte final proposé à la classe par Marie-José qui s'est adjointe Valérie pour retravailler sa chanson : 

Chanson 

Je cherche des poux dans la tête de Frimousse qui est (correction du maître) tombé d'une échelle de douze mètres.

Il pousse une bosse sur sa caboche.

Son père s'approche et hôche la tête.

Frimousse n'a plus de bosse. 

Réécriture (Marie-José et Valérie) 

Remarque : Je ne réduis pas la création poétique à ce travail minutieux du tissage de « rimes », un travail de créativité verbale, de recherches de métaphores étant également favorisé dans ma classe, mais il me semble important que les enfants découvrent, dans leurs propres recherches poétiques des lois, une cohérence interne, spécifiques de l'activité littéraire. 

L'important est de respecter le texte d'un enfant pour aider celui-ci à obtenir l'effet qu'il désire, et d'adapter finement son intervention. 

II RENVOI A UN TRAVAIL « INDIVIDUALISÉ » 

a) Techniques graphiques (segmentation des mots, orthographe d'usage). Je sélectionne dans chaque texte, pour chaque enfant, quelques mots ou expressions parmi les erreurs orthographiques (en raison de leur fréquence). Ils sont recopiés dans l'ordre chronologique de leur rencontre sur un cahier d'orthographe, dans une phrase inventée par l'enfant. 

Chaque enfant dispose ainsi d'un répertoire où sont numérotées ses phrases. 

Chaque soir, les enfants notent sur un petit carnet (pense-bête) une série de phrases, plus ou moins nombreuses selon les niveaux, à voir pour le lendemain. Et tous les matins, dès le C.E.1 chaque enfant s'autodicte sa série, puis s'autocorrige, ça dure 5 mn. 

b) Maîtrise syntaxique (ortho-grammaticale, syntaxe des verbes, utilisation des prépositions, ponctuation...). 

Je renvoie parfois à une fiche de nos fichiers d'orthographe ou livrets de français (si elle ou il existe, sinon j'en écris un(e) nouveau(elle) aussitôt inscrit(e) par l'enfant sur son plan de travail (fiche à faire en priorité). Ce travail programmé, lié aux productions de l'enfant me paraît important, car non seulement l'enfant peut ainsi prendre en charge son travail (ici, même « scolaire ») grâce à son plan de travail, mais surtout il peut en saisir le sens, la raison utilitaire : accroître ses capacités langagières et parvenir à l'autonomie de son écriture. 

Le fouilleur de poubelle 

Un jour, un clochard qui se promène dans une rue, voit une poubelle, il saute dessus. Mais ! un chat lui saute à la figure ! Le clochard horrifié s'en va en courant. Il voit cette fois une grosse poubelle, il saute dessus. Il plonge la main dans la poubelle, AH ! un rat lui mord la main ! Alors, il s'en va le ventre creux. Plus loin, tout à coup il voit une dame qui avait un panier rempli de commissions : il lui saute dessus, mais elle prend des pêches bien mûres. Et hop ! tout ça dans la figure ! Tout barbouillé, le clochard s'en va très peureux ! Le soir, il voit les gens bien manger, il est très triste, il meurt de faim ! Il va dormir dans une poubelle mais il saute en l'air une bande de souris est dans sa culotte. Il court partout et les souris tombent. Il dit : « ce coup là je dors dans le métro. Le lendemain, il voit une drôle de dame barbue, elle transporte des commissions, il saute dessus ! Mais ! manque de chance c'est l'inspecteur de police !! il braque son pistolet sur le clochard. Et là, il l'emmène en prison, le clochard n'est pas content mais là au moins il a quelque chose à se mettre sous la dent. 

FIN
Guillaume
 

Dans le texte de Guillaume, le fouilleur de poubelle, je lui signale, « il mord, rempli, des commissions, des fruits bien mûrs, la faim », où il avait fait des fautes, à prendre sur son répertoire. Un peu plus tard, Guillaume me présente les phrases suivantes qu'il inscrit dans son répertoire : 

47. Souvent le chien de Karine mord le facteur.
48. J'ai rempli ma poche de bonbons.
49. Tous les mercredis, je vais faire des commissions au super marché.
50. Maman a acheté des fruits bien mûrs.
51. Beaucoup d'enfants meurent de faim dans le monde.

Parallèlement, je le renvoie à trois fiches d'orthographe qu'il inscrit sur son plan de travail :
mais ! (fiche 112) que Guillaume a utilisé correctement, mais avec une petite erreur de ponctuation facilement rectifiable.

Des pêches bien mûr. (fiche 118 et 155) accord de l'adjectif que Guillaume a besoin de consolider mais qu'il commence déjà à maîtriser (une dame barbue, il a bien accordé l'adjectif).

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III. ATELIER COLLECTIF 

Tous les lundis, un texte choisi pour être imprimé est polycopié et distribué à chaque enfant de l'atelier. 

Principe : Dans la mesure où les enfants écrivent un texte dont ils ont prévu en gros l'effet général, on peut examiner ces textes une fois écrits pour, en les lisant, chercher comment telle ou telle difficulté narrative a été résolue. Le but de cette séance est donc plus un démontage, une mise à nu des ressorts textuels et dramatiques du texte qu'une réelle mise au point corrective.

Cette fois-là, le texte polycopié était le texte de Guillaume, élève de C.M.1. « Le fouilleur de poubelle ». Il est accompagné des deux directives rituelles : 

1. Qu'est-ce qui t'a plu dans ce texte ? Pourquoi ?

2. Fais les changements que tu juges nécessaires. 

Après un long moment de travail individuel, vient le moment de la confrontation collective. 

Marc : Moi, ça m'a plu parce qu'il lui arrive plein de choses.

Isabelle : Et pi, c'est drôle...

Sylvie : Moi, ce qui me fait rire c'est quand il attaque la dame et pi il prend des pêches bien mûres dans la figure.

Isabelle : Et la souris dans la culotte. (Mimes dans la classe...)

Laurence : Moi, ça m'a plu parce que c'est rigolo tout le temps... Et à la fin le clochard, il a quand même à manger.

Benoît : On dirait une « histoire sans paroles » (cf. télévision).

Séverine : C'est pour ça que ça va vite, il y a beaucoup de gags, sauf quand il voit les gens manger et qu'il est triste.

L'auteur : C'est parce que c'est un peu la réalité, c'est dur quand on a faim de voir manger les gens !

Benoît : Dans les films de Charlot, il y a aussi des passages tristes.

David : A la fin aussi ça pourrait être triste.

L'auteur : Oui mais c'est pas triste car il a enfin ce qu'il veut.

David : Ouais, mais la prison ça peut être triste...

Claude : Au début, à chaque fois qu'il fait quelque chose, on s'attend à la catastrophe qui va lui arriver...

Valérie : Non, on se demande ce qui va encore lui arriver, c'est ça qu'est drôle.

Le maître : C'est une histoire drôle avec beaucoup de gags. Le clochard finit par obtenir ce qu'il voulait, c'est-à-dire à manger, quand on ne s'y attend plus.

Séverine nous a dit que le rythme était rapide, on relèvera tout à l'heure les verbes de cette histoire. 

Maintenant, on va voir plus en détails, voyons vos changements phrase par phrase. Alors la numéro 1.

Séverine : Un jour, un clochard qui se promenait dans la...

L'auteur : Je préfère « promène », on le voit comme dit Benoît comme dans un film.

Séverine : Alors, il faut mettre aujourd'hui.

L'auteur : C'est pas aujourd'hui, le jour exact est pas important...

Séverine : « Un jour », c'est passé

David : Ah non ! C'est comme dans « Le meneur de loup » (Collection « J'aime lire » présente dans la bibliothèque) ça se passe autrefois et bien c'est raconté comme si c'était aujourd'hui...

Séverine va vérifier à la bibliothèque ; très bonne élève elle est très suprise d'avoir tort...

Le maître : C'est un présent de narration, Guillaume l'a utilisé pour rendre son récit plus proche... 

On en profite pour refixer rapidement les introducteurs temporels au tableau : 

PRÉSENT                                                                                           PASSÉ

 

                                                        un jour

maintenant                                   aujourd'hui                                         autrefois

en ce moment                                                                                      hier

à cet instant                                                                                         l'autre jour

                                                                                                          il était une fois

                                                                                                          il y a bien longtemps

                                                     ce matin

 

Benoît nous ramène à cette première phrase : 

Un jour, un clochard qui se promène dans une rue, cherche de la nourriture. il voit une poubelle et saute dessus. Parce que sinon on sait pas pourquoi il saute dessus.

L'auteur : Mais c'est pas gênant... au contraire

David :De toute facon, on peut s'en douter.

Marc : Il peut chercher des habits !

Le maître : Benoît propose d'apporter un renseignement supplémentaire, Guillaume préfère un peu d'imprécision. 

2e phrase 

Karine : Il a mis un point d'exclamation après « mais » Ça ne va pas.

L'auteur : J'ai voulu couper pour la suprise.

David : Pour le suspense...

J'introduis les points de suspension et insiste sur l'effet d'opposition/de surprise produit par le « mais ». 

3e phrase

Rien, je demande qu'on me précise « horrifié » : on me propose, il a très peur, il est épouvanté, terrorisé.

4e phrase 

Valérie : Après, il voit une grosse poubelle, il saute dessus.

David : Oui, mais il a déjà vu une grosse poubelle.

Claude : Ça se répète, et à chaque fois on se doute qu'il va arriver quelque chose.

Marc : C'est comme dans le conte « Le petit pêcheur ».

L'auteur : Ouais, ça doit être pour ça que j'ai utilisé « cette fois »... 

Analyses et conclusions 

L'habitude de ces discussions qui suivent une lecture très précise d'un texte choisi, rendent les enfants très sensibles aux « trouvailles » d'un texte. (Ici : développement de l'action, effets comiques, structures à répétitions typiques des contes). 

Je vois un double intérêt à cette façon de faire :

·          Cette relecture active permet à chacun de « digérer » le texte et ainsi de s'approprier, selon ses compétences et ses besoins du moment, les « savoir-faire » que chaque texte contient. Cette appropriation n'est évidemment jamais une simple réception d'un modèle proposé. Elle se fait par des cheminements personnels, chaque enfant, aussi jeune soit-il, ayant son histoire propre. Cette histoire personnelle fait que son contact avec les « savoirs » est empreint de sa « subjectivité ». Ainsi, pour Benoît, la prise de conscience du rythme de ce texte, passe par une comparaison subjective avec une « histoire sans paroles ». Dans cette démarche d'appropriation, chaque membre du groupe classe grandit, même l'auteur du texte qui, le plus souvent, a écrit sans avoir conscience des règles d'écriture qu'il a utilisées, mais avec une connaissance intuitive qui lui vient de son histoire et de son expérience culturelle personnelle. 

·          L'auteur découvre l'effet que produit son texte sur ses camarades. Il doit tenir compte des choses auxquelles les autres n'ont rien compris ou qu'ils interprètent différemment. Cette confrontation avec les autres, pour lesquels il avait écrit, lui permet de prendre conscience de la démarche qui a été la sienne, il a apporté aux autres un « objet observable », un déclencheur, les « autres » le forçant à sortir de sa subjectivité en clarifiant les mécanismes de sa pensée.

Remarques : 

J'ai évacué presque totalement de ces séances ce que Freinet appelait la « toilette du texte » pour la bonne et simple raison que la séance devenait démesurément longue. Ici, c'est la capacité discursive qui est en jeu. Des recherches collectives ou individuelles ayant une visée plus orthographique sont réservées à un autre moment, ce qui ne veut pas dire qu'elles ne sont pas liées aux productions des enfants. 

Néanmoins, afin d'éviter l'enlisement dans des discussions interminables (inévitables au départ) la part du maître est importante pour résumer les interventions principales, faire passer à la suite. Toute la difficulté est de savoir déceler dans les remarques des enfants les premières approches d'une prise de conscience d'une règle d'écriture découverte dans le texte, et de leur offrir des apports stimulants et adaptés qui les aident à structurer, à clarifier leur intuition. 

Ainsi, à l'époque je n'ai pas profité des remarques « dissidentes » de David : « A la fin aussi ça pourrait être triste », « ouais, mais la prison ça peut être triste » pour proposer aux volontaires comme piste de recherche la réécriture de cette histoire pour qu'elle devienne triste, en utilisant les mêmes personnages, les mêmes décors. 

Aurais-je dû le faire ? Qu'en pensez-vous ? Est-ce que cela aurait débouché sur une fructueuse comparaison entre la construction d'un texte drôle et la construction d'un texte triste ? Est-ce que l'étrange proximité de ces deux trames narratives dévoilerait un peu l'importance du narrateur (qui n'est pas l'auteur) dans le texte ; car finalement seul le regard porté par le narrateur puis par le lecteur sur les actions qui se déroulent dans l'histoire justifie le jugement de triste ou de comique. 

Tout cela, je n'en avais moi-même jamais pris conscience si nettement. Alors à quand la pratique du texte libre dans les E.N., afin que les instits en formation, rencontrant des problèmes de productions, réfléchissent à la structuration du récit et s'approprient les recherches modernes en « linguistique du texte ». 

Denis ROYCOURT

Texte libre et éveil linguistique 

Freinet proposait une « Grammaire en quatre pages ». Il allait même jusqu'à écrire : « Et si la grammaire était inutile ? » Si l'on réduit, en effet, la grammaire à la grammaire scolaire ainsi que cela se fait presque toujours, il est vrai, et nombre de collègues le constatent tous les jours, qu'elle semble pour le moins peu efficace en ce qui concerne l'amélioration du français écrit. 

Faut-il pour autant abandonner toute activité d'observation de la langue ? Je ne le pense pas. 

Confronté au même problème, après bien des essais, des recherches et des tâtonnements, je suis arrivé à une pratique qui me paraît plus satisfaisante théoriquement et qui a, de plus, le mérite de provoquer l'intérêt, la réflexion et la participation des enfants. De plus, travaillant en équipe, nous avons décidé d'adopter la même démarche dès le C.E.1 voire de C.P. C'est de cette démarche que je vais tenter de rendre compte ici. 

1. Une démarche fondée sur une pratique relationnelle et fonctionnelle de l'écrit.

Il faut, en préambule, préciser que le préalable à notre démarche est que les enfants soient plongés dans des situations relationnelles et fonctionnelles d'écriture et que ces situations soient les plus nombreuses, fréquentes et variées possibles. Il s'agit là d'un impératif incontournable sous peine de retomber dans la scolastique et le formalisme. 

Sans faire un inventaire exhaustif de ces situations, on peut citer :

- les albums d'éveil historique, géographique ou scientifique ;
- les questionnaires et comptes rendus de visite, enquêtes... ;
- la tenue du cahier « notre vie » (recueil des événements importants de la classe destinés au journal) ;
- les textes destinés à la publication dans le journal scolaire
- les poésies
- la correspondance tant individuelle que collective, toutes situations véritables de communication.

Seul, le besoin de parvenir à un écrit satisfaisant, motivé par un véritable désir de communiquer pour de vrai permettra à l'enfant, confronté à une difficulté, à un problème linguistique, de ressentir le désir de mobiliser ses connaissances antérieures et de faire acte de réflexion afin de dépasser cette difficulté. 

2. Une démarche qui repose sur l'écoute 

Si j’ai insisté un peu longuement sur les étapes préalables c'est aussi pour montrer que cette démarche n'est possible que dans la mesure où on accepte d'être à l'écoute des enfants. 

En effet, c'est au cours de ces multiples confrontations à l'écrit, tantôt individuelles, tantôt collectives, que vont se faire jour des situations qui poseront problème aux enfants. La part du maître consistera alors à relever ces points d'achoppement, à faire préciser la difficulté, expliciter le problème et en prendre note pour un travail ultérieur. 

Afin de préciser les idées, quelques exemples de situations - problèmes rencontrées cette année (C.E.2-C.M.) :

- A quels noms met-on des majuscules ?
- Comment choisir ce ou se ?
- Pourquoi dans « chante ! » il n'y a pas de « s » ?
- Est-ce que « devra » correspond à « devrait » ?
- Au passé simple « a » ou « t » ?
- Les compléments de verbe ne se remplacent pas tous par le, la, les, l' ; pourquoi ?
- Pourquoi « anse » mais « lasse » ?

Ce qui est remarquable c'est le nombre de questions que se posent les enfants dès lors qu'ils sont habitués à une attitude de curiosité, d'éveil par rapport à l'écrit. C'est là une attitude de distanciation qui peut être extrêmement profitable à leur réflexion sur leurs productions écrites. 

3. Une démarche de tâtonnement expérimental 

Je vais me permettre de détailler quelque peu le déroulement d'une séquence afin de concrétiser mes propos. 

Lors de la réunion de coopérative, nous programmons une ou deux séances de ce que les enfants appellent « recherches de français » et que je désignais dans le titre, sous le terme « d'éveil linguistique ». Je pense à ce sujet que l'utilisation du mot « recherche » par les enfants n'est pas du tout innocent mais rend parfaitement compte de cette activité et de leur attitude.

La séance se déroule en plusieurs temps : 

A. L'enfant, auteur de la remarque, aidé par le maître qui l'a notée, rappelle quel est le problème soulevé, ce qui l'interroge.

B. Ici, le rôle du groupe et de l'adulte va être de faire expliciter la remarque.

Il s'agit là d'une étape fondamentale car l'explicitation de la situation va :

- amener l'enfant et le groupe à mobiliser leurs connaissances antérieures (réelles ou supposées, véritables ou erronées) ;

- amener le groupe à faire des hypothèses. 

Ce sont deux phases extrêmement importantes car fondements d'une véritable démarche scientifique, de ce que nous désignons par tâtonnement expérimental. C'est à cette occasion que vont pouvoir apparaître les représentations que se font les enfants du fonctionnement de la langue. Il y aurait d'ailleurs matière à une observation fine de ces représentations. Ceci dit, il est fondamental que les enfants puissent les exprimer et les expliciter. Il faut noter que, sans cesse, durant la séance, il y aura réflexion, discussions, échanges à l'intérieur du groupe. 

C. L'hypothèse ayant été explicitée, précisée et comprise de tous, va se poser alors le problème de sa validation. Pour cela, il va nous falloir la confronter à un corpus de phrases. La différence, c'est que ce corpus va être constitué au départ d'énoncés d'enfants ce qui leur donne un statut et une valeur bien différente de l'habitude. 

Commence donc une phase de recherches très active dans nos textes. Au fur et à mesure des découvertes, les enfants proposent des exemples relevés dans leurs textes. Chacun est examiné et nous vérifions qu'il correspond bien au thème de notre recherche. Si oui, il est inscrit au tableau. Dès que nous en possédons une quantité suffisante, nous passons à une phase d'observation du corpus réuni. 

D. Lorsque la phase d'observation est terminée (elle ne dure que quelques minutes) chaque enfant fait part de ses remarques. Il y a alors confrontation de la remarque avec le corpus observé et validation éventuelle. Celles qui semblent valides sont alors notées au tableau à partir du moment où elles sont acceptées par le groupe. 

E. Enfin, ces observations accompagnées de quelques exemples significatifs sont copiées sur une feuille de classeur. Ces feuilles grossièrement classées en groupe verbal : rouge, groupe nominal : jaune, « pronoms » : bleu, syntaxe : vert, orthographe : blanc vont ainsi constituer progressivement un « classeur de français », outil de travail que l'enfant aura constitué peu à peu, qu'il aura pu s'approprier et que, pour cela, il saura facilement utiliser. 

Bien sûr, nos observations sont souvent imparfaites, presque toujours incomplètes, parfois inexactes. Ceci n'invalide pourtant pas la démarche présentée. N'en est-il pas de même dans toute démarche scientifique ? 

« Toute position sommairement juste, tout raisonnement sommairement efficace peuvent servir de point de départ pourvu qu'ils ne soient pas posés comme intangibles, pourvu qu'ils soient considérés comme révisables ». F. Gonseth (cité dans Pratiques n°33). Au contraire, ces inexactitudes, ces manques alimenteront de nouvelles réflexions, fourniront de nouvelles pistes de recherche lorsque de nouvelles observations invalideront nos observations ou lorsqu'un problème du même ordre resurgira. Alors nous serons amenés à reprendre, compléter, corriger nos observations. 

C'est ainsi que, petit à petit, avec les enfants, nous construirons une démarche active d'observation des phénomènes linguistiques, une authentique démarche d'éveil scientifique à la langue écrite. 

4. Une démarche cohérente par rapport aux autres activités de la classe. 

Si j'ai dit plus haut que la démarche dont je rends compte ici me satisfaisait théoriquement c'est que, alors que jusqu'à présent les séquences ou leçons de grammaire étaient complètement coupées du reste des activités de la classe, il y a là unité. Il y a en effet d'une part, un lien réel et nécessaire avec les besoins des enfants. D'autre part, et c'est sans doute là une des raisons qui fait que les enfants s'impliquent incomparablement plus depuis que nous travaillons ainsi, c'est qu'ils retrouvent par rapport à la langue, la même méthode de travail qu'en mathématique, éveil scientifique, historique ou autre. 

C'est-à-dire que, plutôt que de transmettre des mécanismes, nous privilégions toujours la mise en situation de recherche.

Jean-Marie FOUQUER


Le texte libre se prolonge par des activités d'expression 

Expression corporelle 

Ce matin-là, suite à un texte d'enfant qui avait intéressé la classe, les enfants avaient trouvé au tableau Le Premier saut de Léo Valentin : 

Texte d'auteur : 

- Partez !

J'entendis l'ordre en même temps qu'une grande tape me faisait BASCULER. Je FERMAI les bras, les yeux, les jambes, tout. Je SERRAI les mâchoires à m'en faire mal. La tête dans les épaules, je tombai comme une boule, RECROOUEVILLE. Comme un arrachement des épaules, un ÉCARTEMENT qui fait que tout s'ouvre : les bras, les jambes, la bouche, les oreilles. La vie, L éo ! Tu vis, vieux gars ! 

Prolongements : 

Après une lecture des yeux, nous avons fait une lecture de gestes sur le contraste ouvert/fermé : recherches individuelles, recherches en groupe, dans le préau. 

Puis séance collective de travail corporel autour de quelques mots inducteurs : contracter-décontracter, resserrer-relâcher, raccourcir-ralonger, raidir-assouplir, dur-fluide, rétrécir-agrandir, se ramasser-rayonner, se rentrer-sortir, se tasser-se dérouler, tendu-détendu, raide-mou, foncer-étirer, crisper-desserrer, bloquer-libérer. Jeu de mots en deux classes : ouvert/fermé : larme, explosion, boule, petit, large, rivière, fleur, feuillage, maison, triste, rire, épanoui, feu, ami, guerre... 

Relecture du texte, à voix haute, debout. Chacun lit la phrase qu'il veut, ou un mot, ou tout le texte. 

Patrick 

Peinture 

Texte créé collectivement et écrit par deux enfants à partir des idées recueillies ensemble. 

Sij'étais le ciel, je serais soleil.
Si jétais le ciel, je couvrirais la terre d'une nuit argentée.
Si j'étais le ciel, je serais le coucher du soleil.
Si j'étais le ciel, je serais le paradis des enfants et des grandes personnes.

Parallèlement, les enfants peignaient en projetant la peinture, en faisant couler, en pliant. Ils tendaient même à s'enfermer dans ce procédé facile et spectaculaire et commençaient à tourner en rond. L'arrivée de ce texte permit de faire une jonction entre l'expression écrite et l'expression par la peinture. En effet, toutes les taches pouvaient être traduites en ciel, en univers dans lesquels les enfants laissaient libre leur imagination et emmagasinaient de nouvelles possibilités de textes... 

Jacques, C.M.1-C.M.2 

Notre cinéma à nous ou...
Le texte libre en mouvement...
une idée... lumineuse

Tout a commencé par une aventure martienne alors qu'un O.V.N.I. descendait inexorablement vers la surface de la Terre... 

Tout a commencé, disais-je, sur des diapos dessinées et d'ambiance quand, encore frais mais non miscibles entre eux, les produits qui les couvraient s'énervèrent à la surface de l'écran. Puis ce brin d'herbe perpétuellement agité par le ventilateur du projecteur déclencha le processus : Eurêka ! ... ça bougeait

TILT

Ici, intervient la « part du maître ».

Ainsi naquit Bande dessinée, notre premier film, « réservoir » de techniques d'animation. L'inconnu surgissait et emplissait de joie et d'enthousiasme notre aventure cinématographique... Enfin ses premiers tâtonnements.

Depuis six ans, nous n'avons cessé d'écrire en images émouvantes et mouvantes quelquesuns de nos textes libres : 

·          poétiques :

La semaine bizarre, Le nuage, L'imprudent, Oh ! le vilain brouillard, Drôle de temps, Le petit oiseau, Drôle d'histoire, Le bateau-soleil ; 

·          d'animaux :

Sylvain le lapin, Les deux ours, Au zoo, Le petit canard ; 

·          fantastiques

Le poisson-motard, La gyrn des charlots, Les cailloux crieurs, La maison fragile, Le gros et le maigre, Les dingues du C.E. 1, Oh ! le méchant, Les aventures d'un grain de café, Les hommes géants, Les grimaces ; 

·          quotidiens :

Pédali et Pédalo (achat d'une maison, son voisinage) ; 

·          de vie :

Chatte-chat, La naissance de Julien ; 

·          conte de Noël :

Le nez rouge ; 

·          de publicité :

Anti-publicité, Le fromage, Le soûlé ; 

·          d'aventures :

Les « éros du faroueste », La victoire de d’Artagnan. 

Afin que vous appréhendiez l'étonnante diversité et richesse de nos films, je ne citerai pour exemple que leur durée qui s'échelonne de quinze secondes à vingt-cinq minutes. 

Pourquoi faire du cinéma ? 

J'ai déjà écrit que la caméra était cette nouvelle imprimerie capable de démystifier/ démythifier la télé mais aussi :

- C'est un acte essentiellement pédagogique, créateur et coopératif.

- C'est écrire un nouveau langage avec sa dialectique particulière.

- C'est connaître du soleil et des nuages, les caprices du ciel.

- C'est appréhender les distances et le temps.

- C'est travailler ensemble, se débrouiller, inventer... 

Inventer comme Stéphan écrivant à la machine pour les parents de chacun de ses camarades : « Voulez-vous aider les enfants à faire un film en donnant 5 F ? » C'est un acte hautement politique que celui de se prendre en charge ! 

Nos histoires en photo 

Nous avons tous l'habitude d'inventer des histoires que nous lisons à toute la classe. Souvent aussi, nous les illustrons de dessins. Nous réalisons parfois des B.D. (bandes dessinées). 

Plusieurs classes de Haute-Savoie ont décidé d'inventer et de réaliser des histoires en photo, grâce à l'aide du service audiovisuel de la Fédération des oeuvres laïques. Les enfants vous expliquent comment ils ont fait. 

COMMENT RÉALISER ENSEMBLE UN ROMAN-PHOTO ? 

L'histoire 

Il faut d'abord une histoire bien intéressante, mais pas trop compliquée, ou un texte libre ou une idée apportée par un camarade.

Mais avec des paroles ou de l'écriture, on ne s'exprime pas comme avec des images.

Nous avons décidé de mettre en roman-photo un texte libre de Véronique. Ce texte a provoqué trois histoires assez différentes.

Nous avons choisi la plus simple à illustrer en photos, car nous nous sommes apercus que certaines auraient été impossibles à prendre. 

Le découpage de l'histoire 

Vous pouvez commencer par étudier de près comment sont découpées les bandes dessinées. Comparez la taille, le contenu des différentes vignettes. Observez bien chaque image. Vous remarquerez que l'angle de vue et l'échelle des plans (vue générale, vue rapprochée, détail en gros plan) ne sont pas toujours les mêmes. C'est cette diversité des images qui crée l'animation de l'histoire. 

Pour en savoir plus, lire la B. T. J. n°251 du même titre.

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Travaux collectifs autour des textes 

A l'école maternelle 

Le travail est essentiellement oral. L'enfant raconte son histoire. La maîtresse intervient si le message passe mal. Elle le restitue dans une forme communicable, à la portée de l'enfant. 

Dans la classe enfantine d'Annie :

On éclaire le feu dans la cheminée pour plus qu'il pleut. (Stéphane, 4 ans.)
Réaction de Benoît : Il ne pleut pas dans la maison, il pleut dehors.
Annie : Est-ce que tu allumes le feu quand il pleut ?
Stéphane : Oui.
Annie : Pourquoi l'allumes-tu ?
Stéphane : Parce que quand il pleut, il fait froid. Alors, ma maman, elle allume le feu.
Annie : Alors, ta maman allume le feu quand il pleut pour réchauffer la maison.

Ce travail est nécessaire pour que les enfants ne restent pas enfermés dans les clichés du langage « bébé ». 

Un vécu collectif riche et passionnant au cours élémentaire 

Cécile parle du cheval de son grand-père et ses camarades demandent si on ne pourrait pas aller le voir. Le grand-père consulté nous amène « Gamin » et répond à toutes nos questions. 

Nous prenons des photos, nous réalisons un album, nous lisons des poèmes parlant du cheval (complainte du petit cheval blanc de Paul Fort et Cheval de Lucienne Desnoue). 

Le lendemain de « la visite de Gamin », les enfants imaginent : « Les pensées de Gamin pendant le reportage ». 

- « Qu'est-ce que c'est tous ces gens ? C'est la première fois qu'ils voient un cheval ? Il y en a bien à la télévision.
Ils posent des questions à mon maître, qu'est-ce qu'ils me veulent, peut-être veulent-ils m'acheter ?
On ne sait jamais
Qu'est-ce que c'est cet appareil ? Je vais faire un petit sourire.
Il me chatouille avec son couteau
Qu'est-ce que c'est ce grand bâtiment ? Je ne vais pas rentrer dedans avec ma charrette ? Je casserais les marches d'escaliers, les enfants tomberaient, je serais en cause, j'irais au juge. Je pourrais apprendre à lire, je saurais le langage des êtres humains.

Ils me fatiguent à me faire avancer et reculer. Je vais baver un peu pour leur faire peur. J'en ai assez d'être « planté » au même endroit, je voudrais bien marcher un peu. Enfin, me voilà parti, je vais pouvoir être tranquille. »

Puis à l'atelier magnéto, un groupe du C.E.1 élabore le texte suivant, pas forcément meilleur que le texte initial, qu'il écrit ensuite : 

Le cheval dans le pré 

Le cheval dans le pré
trotte sur l'herbe verte
et saute les barrières.
Quand son maître vient
il galope vers lui.
Des fois, il va aux champs
pour tirer la houe
ou la charrette.
Quand le soir arrive,
son maître l'amène
à l'écurie.
 

Un groupe du C.E.1

Et Johny, un matin, lit à la classe :

Le cheval
Le cheval galope dans l'herbe.
Il fait des courses, il gagne,
on lui met des médailles,
on lui donne des coupes d'or.
Il joue à saute-mouton avec les rochers,
les branches d'arbres,
Il se sent seul, ce petit cheval.
Aidez-le ce petit cheval.

Johny, C.E.2

L'enquête sur un sujet qui intéressait les enfants a permis la création de textes libres.

Classe de Anne-Marie

 

L'écoute disponible du maître :

Comment est née l’écriture poétique dans ma classe de C.M.2 

Un soir du mois de novembre, avant de quitter l'école, Christine s'approche de moi et me dit :

- J'ai inventé une chanson !
- Chante-la.

Juste le temps de brancher le magnétophone et Christine me sussurre de sa petite voix douce sa chansonnette « Dis-moi ».

DIS-MOI

Un mois, deux mois, trois mois
Quatre mois, cinq mois, six mois
Sept mois, huit mois, neuf mois, dix mois.

Dis-moi si notre terre
est plus grande que le ciel
dis-moi, dis-moi, dis-moi, dis-moi.

Dis-moi, dans la montagne
y a-t-il un cheval qui broute ?
Dis-moi, dis-mois, dis-moi, dis-moi.

Dis-moi si dans la rue
il y a beaucoup de gens.
Dis-moi, dis-moi, dis-moi, dis-moi,

Dis-moi ce que tu veux,
Dis-moi ce que tu vois,
Dis-moi, dis-moi, dis-moi, dis-moi.

J'ai trouvé ca très intéressant ; aussi le matin suivant, nous avons écouté, déchiffré et appris le chant de Christine. 

Ce fut pour cette enfant un déclic, car à partir de ce moment-là, elle se mit à écrire des textes tels que Sylvie et Dors petit enfant.

Ses camarades furent de plus en plus intrigués et bientôt Corinne se mit elle aussi à écrire La pluie, Il neige 

SYLVIE

Je ne dors pas Sylvie
Je ne pleure pas Sylvie
Je ne cours pas Sylvie
Je ne ris pas Sylvie
Je ne fuis pas Sylvie
Je n'entends pas Sylvie
Je ne crie pas Sylvie
Mais je travaille, Sylvie.

DORS PETIT ENFANT

Dors petit enfant aux joues rondes
Dors petit enfant au nez rouge
Dors petit enfant aux grosses chaussures
Dors petit enfant aux habits déchirés
Dors, dors, petit enfant clown.

IL NEIGE 

Il neige à Paris
Sur les toits gris
Il neige à Versailles
Sur les toits de paille
Il neige partout
Il neige sur tout
Mais voilà, tout à coup.
Il ne neige plus du tout.

LA PLUIE

 Madame la pluie
Couverte d'un manteau jauni
Déposa sur les toits
Ses gouttes de soie.

 Madame la pluie
Couverte d'un manteau jauni
Est morte à minuit
Sur les toits ses amis.

Nous étions à quelques jours de Noël, lorsque Patrick nous lut : Je l'attends, puis Christine D. nous apporta C'est pour. Ainsi était née dans la classe une « atmosphère réceptive » à ce nouveau genre d'expression et depuis, les textes se sont multipliés.

Ainsi des enfants se sont livrés :

Patrick a dévoilé dans Loin de tout sa hantise de la mort ; hantise justifiée, puisque sa soeur atteinte de la maladie bleue est décédée pendant les dernières vacances.

Christine D. nous livra sa joie dans l’attente d'une naissance prochaine d'une petite soeur (qui en réalité fut un petit frère) dans Mon enfant.

Et bien d'autres encore...

Ce qui est certain, c'est que dans cette atmosphère, les enfants se sont arrêtés sur des textes et des auteurs qui jusqu'alors ne les accrochaient pas.

J.-C. DUMARTIN École de Pontonx-sur-L'Adour (Landes)

 JE L'ATTENDS

 Je l'attends depuis longtemps
dans ma chambre je l'attends.
Je sais qu'il viendra
un jour
Et puis il m'emmènera loin,
loin dans le monde,
Mais je l'attendrai toujours
Mon amour.

L'accueil du groupe-classe et la part du maître

Marie-Noëlle, après plus d'un trimestre de classe, n'a écrit que deux ou trois textes récits de ses activités, tout le reste étant des poèmes (mais quelle profusion !). Ils ont d'ailleurs, en général, été bien accueillis par la classe parce que pleins d'imagination à tous les niveaux (forme et fond). Mais un jour, la remarque est venue, pertinente : 

- Moi, je trouve que Marie-Noëlle écrit que des poèmes. Elle pourrait changer un peu. 

COCHON 

Cochon qui cochonne
honne ! honne !
C'est pas un cochon.
Un âne ?
Oui c'est un âne
avec des oreilles de lapin
et la queue en tire-bouchon.
Cochonne qui cochon
Hon ! hon !
C'est pas un cochon.
Un loup ?
Oui c'est un loup
qui fait ouh ! ouh !
A moi ! à moi !

Là j'ai un coeur qui souffle
souffle sur les nuages
mon coeur a un trou
je ne vis plus
mon coeur s'envole
sur le soleil
 

CHICH0

Chicho Chichoco
Chichoco Chicholi

Chicholi Chicho-maîtresse
Chicho-maîtresse est une bombe
Un deux trois et ça explose !

MA VACHE

Ma vache a des oreilles
d'écureuil
ma vache a une queue
ronde
ma vache a les dents
longues
ma vache a le ventre
musclé
ma vache
fait un bruit extra.

Marie-Noëlle, 10 ans

 C'est vrai ça. Elle ne répondait rien. Elle avait assez mal reçu la remarque, tout le monde la regardait. Je me suis empressée de rompre le silence pour dire :

 - Marie-Noëlle est tout à fait capable d'écrire une histoire, elle a sûrement plein d'idées, n'est-ce pas Marie-Noëlle ?

 Un hochement de tête répondit à mon intervention et le début d'un conte apparut dès le lendemain, puis un récit de ses perruches la semaine suivante.

 LA FAMILLE ECUREUIL

 Il était une fois une maman écureuil qui avait trois adorables petits.
Ils habitaient une petite maison au sommet du plus grand sapin de la forêt, et ils étaient très heureux.
Mais, un jour, les animaux sauvages sont tous partis. La maman alla regarder son calendrier et s'écria :
Ciel ! c'est le premier jour de la chasse et il ne doit plus rester que moi et mes peits dans la forêt. Il nous faut partir au plus vite, et elle alla réveiller ses enfants .Vite, vite, levez-vous, la chasse est ouverte, il ne faut pas rester ici, nous risquons de mourir !
Puis elle partit chercher les valises. 

(à suivre)

 Si je n'étais pas intervenue, Marie-Noëlle aurait été capable de décider qu'elle n'écrirait plus. Voilà un exemple vivant de la part du maître, et, en définitive, ses camarades lui ont permis de changer le genre de ses productions. Le texte libre c'est pour chacun des enfants d'une classe, l'occasion d'exercer sa libre expression qui se développera en fonction de la disponibilité du maître et de l'accueil du groupeclasse.

 LA PETITE FILLE

 Un jour, une petite fille s'amusait à la balle. Tout à coup, elle dit :
- Je vais voir ma maman à l'enterrement.
Maman ! maman ? si tu étais vivante,
je t'aimerais de tout mon coeur.
 

Marie-Noëlle, 10 ans

 Ainsi, j'ai pu constater, depuis quelques années que la production de l'enfant s'amplifie au fur et à mesure que s'établit un réseau de communication plus riche ; c'est-à-dire que j'obtiens un nombre croissant de textes au fil des jours et à partir du moment où les enfants découvrent l'intérêt que suscitent leurs productions en même temps que s'exerce leur pouvoir sur les autres. (L'imprimerie et la correspondance demeurent des motivations pour écrire, mais moins puissantes, me semble-t-il.)

 Jeannette GO

 Lier l'écrire-lire et le lire-écrire

 Premier exemple

 Les enfants ont de multiples occasions d'écrire dans la semaine. Mais une heure, le jeudi matin, est particulièrement consacrée à l'écriture personnelle. A ce moment-là les enfants ont toujours un double choix :
 - soit écrire ce qu'ils ont envie d'écrire... s'ils sont parvenus au stade de l'écriture libre ;
- soit écrire sur le vécu du groupe-classe et son interprétation. Par exemple, depuis trois semaines, toutes les activités d'observation sont centrées sur la vie d'une courtilière et de différents insectes. Ce qui a amené dans la classe : des documents variés sur les insectes, des lectures sur ce thème, des dessins, des jeux dramatiques, un émerveillement (la naissance d'un papillon s'arrachant lentement à sa chrysalide) ...

Nous avons particulièrement travaillé deux textes :

a) Un de Le Clezio (Voyages de l'autre côté) :

Naja Naja, quand elle a trouvé la cachette qui lui convient, s'assied en boule au soleil et reste immobile.

Elle est devenue minuscule, à peine grande comme un insecte... Elle est posée sur la terre, entre les genêts et les ronces. Le soleil brûle, il chauffe sa carapace noire, brillante... Pattes minuscules, élytres, antennes. Si on bougeait, on mettrait des jours à explorer un arbre, des heures à faire le tour d'une feuille.

Naja Naja reste longtemps dans sa cachette, enfermée dans la broussaille. Elle ne bouge presque pas : tu fais un mouvement un peu brusque et tout à coup tu te remets à grandir.

Jouer ce texte. L'apprendre par corps. Le reciter.

b) Un des bardes celtes d'Irlande (C.-J. Guyonvarc'h  - Textes mythologiques irlandais - I - Ogam-Celticum)

Je suis vent sur la mer,
Je suis vague de l'Océan,
Je suis le bruit de la mer,
Je suis le taureau aux sept combats.

 Le thème proposé est celui de l'identification, à partir du « je suis... »

 Ce qui a provoqué l'écriture de textes, comme :

 Je suis une petite bête. (Une puce). Je monte, je monte et j'arrive dans une grande forêt. Tout d'un coup j'entends quelqu'un qui vient. C'était un bonhomme un peu plus gros que moi. Un pou ! Alors j'en ai profité pour lui demander la sortie de la forêt. J'arrive dans un désert (le front) avec deux ronds (les yeux) et une montagne (le nez)...

 Yves (10 ans)

 Je suis le cheval qui galope.
Cheval blanc, cheval noir.
Il fait beau, il va pleuvoir.
Je suis le cheval qui trotte,
cheval gris. Cheval d'or.
Il fait bien gris. Il fait très beau.
Je suis le cheval au pas.
Cheval doux, cheval nerveux.
Je suis le cheval dans toutes ses allures.
Cheval très beau, cheval très grand.
Il fait beau, il va pleuvoir.
Il fait bien gris. Il fait très beau.
Il fait doux. il fait orageux.
Le cheval s'en va et le poème part avec lui...  

Ikel (11 ans)

 P. HÉTIER

 Deuxième exemple :

 ·          De l'influence du texte d'auteur sur l'expression de l'enfant.

 Dans un profond silence...

 Parce qu'un matin Bruno dessine et dit : Le bateau se promène sur la montagne, ce qui vaut la réflexion suivante : Les vagues, c'est les montagnes de la mer !, je propose quelques jours plus tard, le 17.10.74, ce texte de Jean Arp :

 Les voiliers

 Dans le profond silence des Vosges
j'ai rencontré
de grands voiliers sans équipage
voguant silencieusement
à travers les forêts.
 

Les enfants réagissent au texte, entrent mieux que je ne l'aurais cru dans l'évocation du poète : voici quelques-unes de leurs réactions

- Les Vosges, c'est pour se promener.
- La mer aussi est profonde.
- Le sommeil de la belle au bois dormant était profond.
- C'est un mer de sommeil.
- Et dans la forêt c'est une mer de silence.
- On peut dire « un mer de sommeil » ?
- Les troncs, c'est les mâts des voiliers.
- Oui, c'est une forêt de bateaux.
- Et l'eau ?
- Il n'y en a pas besoin, et si on veut on peut l'inventer.
- On peut tout dire.
- Même quand ce n'est pas vrai, on peut quand même dire qu'il y a des bateaux.
- Mais la  mer fait parfois du bruit.

Nous n'avons pas appris ce texte par coeur (nous n'en apprenons jamais systématiquement), mais à plusieurs jours d'intervalle, certains enfants redisent le texte, du moins ce qu'ils en ont retenu, compris, ce qui les avait frappés. En voici des exemples :

- Dans ce profond silence j'ai rencontré des bateaux, (Nathalie)
- Dans un grand silence, j'ai vu passer des voiliers. (Marie)
- Dans le profond silence des Vosges, j'ai rencontré des voiliers sans équipage qui voguent par un grand silence. (Marc)
- Dans un profond silence, j'ai rencontré quatre voiliers. (Cécile)
- J'ai vu passer un voilier dans un silence profond (Richard).
- Dans les Vosges, j'ai vu quatre voiliers.
(Nathalie).
- Dans un profond silence, j'ai rencontré trois grands voiliers qui traînaient ça et là. (Marc)

L'association des deux mots silence et profond a semble-t-il retenu l'attention de la plupart d'entre eux. (Marc utilise l'expression « qui traînaient ça et là » en la reprenant d'un texte de Georges Jean). Contrairement à ce que j'attendais un peu, l'évocation de voiliers dans une forêt n'a pas choqué les enfants.

Une semaine s'écoule encore (je ne sais plus si nous avons redit entre temps le texte d'Arp) et Richard, devant le groupe, commente ainsi un de ses dessins :

Le bateau est petit la mer est immense le bateau est tout seul dans un grand silence (Le 26.10.74.)

Je vois une influence du texte d'Arp sur l'expression de Richard et je me suis demandée pourquoi.

Des notes concernant le comportement de Richard, ses cahiers de textes et de dessins me fournissent quelques éléments pour une possible réponse.

Richard semblait dès le départ un enfant très anxieux, timide, manquant nettement d'assurance , il est par ailleurs très sensible ; il aime et retient (sans doute parce qu'il les aime) très vite des poèmes ; il est parmi les plus actifs pendant les séances de poésie.

En feuilletant son cahier de textes, je trouve :

- Le 20.9.74 (son 4e texte) : Je m'amuse avec mon bateau.
- Le 26.9.74 (son 6e texte) : Le bateau regarde les étoiles tourner autour de la lune.
- Le 27.9.74 (son 7e texte) : Le bateau voit un ballon et un hélicoptère.
- Le 18.10.74 (son 13e texte) : Le voilier voit l'île.
- Le 21.10.74 (son 14e texte) : Le soleil brille sur les quatre voiliers.
- Le 4.11.74 (son 16e texte) : Le soleil brille sur le bateau et l'oiseau chante sur l'étoile.
- Le 14.11.74 (son 18e texte) : Le bateau a vu un ballon atterrir dans la mer.

Et cette chaîne s'arrête bruquement.

Je note que les 18 et 21 octobre, il écrit voilier à la place de bateau alors que j'ai lu le texte de Jean Arp le 17 octobre. Les dessins qui illustrent ses textes et ceux qui figurent dans son cahier de dessins sont très expressifs et représentent souvent des bateaux de guerre, des scènes de bombardement... Je relève à ce propos, dans un ouvrage du docteur Aubin, que le bateau est considéré comme un symbole de l'évasion, de la solitude (cette solitude n'est-elle pas clairement exprimée dans le texte de Richard ?) J'y lis aussi que le bateau, s'il est cuirassé peut être signe d'agressivité, d'angoisse (et anxieux, Richard l'était visiblement). Il parle également de la mer (refuge du ballon, texte 7) et de son immensité : la mer est immense. L'eau est un symbole féminin et peut représenter la mère. Pour Gaston Bachelard, la barque est le berceau redécouvert. Pour F. de Meredieu, la présence d'eau dans les dessins (et pourquoi pas dans les textes) peut traduire « une volonté de régression », et elle cite à ce sujet J. Servier : Ce désir inconscient d'être bercé par une mer tiède et de découvrir la paix des eaux intra-utérines, un renouveau de (ses) rêves embryonnaires.

Mon propos n'était pas de tenter d'interpréter les textes de Richard ; je voulais simplement dire que s'il a été, plus que d'autres, sensible à ce texte d'Arp, c'est peut-être parce qu'il portait quelque chose en lui, qu'il a peut-être saisi dans le message du poète ce qu'il exprimait déjà inconsciemment. Cet apport extérieur qu'était le texte d'Arp a été un maillon dans sa chaîne, s'y imbriquant parfaitement et de ce fait il « l'a assimilé » (d'ailleurs, il ne reprend pas l'expression un profond silence mais écrit :

DANS UN GRAND SILENCE.

Son texte (sa poésie ?) n'est donc pas né du hasard, mais dû au fait que plusieurs éléments concouraient, à savoir :
- Sa situation affective ;
- La possibilité qu'il avait de l'exprimer ;
- Sa sensibilité, sa perméabilité à l'expression d'autrui (est-ce lié à un profond désir d'entrer en communication ?) ;
- L'apport extérieur du texte d'auteur. 

Bien entendu, tout ceci n'est qu'hypothèse. Mais peu importe. Richard s'est exprimé ; son texte a beaucoup plu à la classe et l'a sûrement aidé, lui le timide, l'anxieux, à prendre une place et à s'affirmer dans le groupe et cela est important. Par la suite, il a souvent été fait appel à lui pour trouver un mot juste, traduire une image, une impression. Le groupe lui a reconnu une valeur.

 Anne-Marie MISLIN
Cours préparatoire

68490 Ottmarsheim


Genèse du texte libre à l'école maternelle 

Comment naissent les bandes dessinées collectives en petite section 

Les circonstances :

- un petit groupe d'enfants volontaires pour raconter une histoire collective (environ une douzaine) ;

- un adulte (au moins) pour écouter, écrire, dessiner. 

Le matériel :

- des grandes feuilles de papier (environ 65 cm x 100 cm si possible glacé) si possible glacé (c'est plus joli) fixées verticalement (tableau, mur, cloisonnette...) ;

- une poignée de stylos feutres de couleur (grosse mèche), sur le papier glacé les feutres indélébiles sont plus jolis ;

- un peu de temps (mais pas trop pour ne pas se lasser). 

Le déroulement : 

1. Les enfants décident du début de l'histoire l'adulte aide à choisir parmi toutes les propositions ; pour l'instant il s'agit toujours d'animaux ayant un pouvoir un peu « magique » dans l'esprit des enfants).

2. L'adulte écrit, en demandant des précisions si besoin, puis il dessine en très grand, « à la commande » (il faut un bateau, des poissons, tu as oublié le nombril...).

3. Quand l'histoire est finie (ou quand le groupe n'a plus envie de continuer), elle est présentée à toute la classe.

4. On peut l'afficher ainsi, mais c'est plus joli quand elle est découpée puis collée sur une bande de papier kraft brun, mise en couleur et quand certains passages sont recopiés pour mettre le texte en valeur. C'est le travail d'un adulte.

5. On choisit un lieu d'affichage pour que les enfants puissent « relire » l'histoire tout à leur guise. Ils nous demandent souvent de leur relire les bandes dessinées anciennes qui sont encore affichées.

6. Les bandes dessinées sont réduites au format 21 x 29,7 et ronéotées pour faire un petit livre (avec nos chansons et nos poésies) que les enfants emporteront en fin d'année.

Brigitte et Roger

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Le journal des moyens 

(Extraits d'informations rédigées pour les parents). 

Nous avons continué la pratique de l'an passé en petite section à partir du deuxième trimestre :

- les faits importants racontés le matin à l'entretien,

- certaines grandes histoires inventées ensemble,

- des informations diverses donnent lied à la rédaction collective d'une grande affiche murale. 

Nous ferons de même en petite section cette année, dès que les enfants nous sembleront prêts à pratiquer ce type d'activité. 

L'affiche rédigée en moyenne section est ensuite reproduite à la ronéo sous forme de pages individuelles que les enfants emportent à la maison. (Plus tard, les enfants reproduiront eux-même le journal au limographe). C'est cette page qui constitue, pour l'instant, le journal quotidien. Il grossira si besoin avec le temps. Ce journal a pour but de servir de support à une meilleure liaison entre l'école et la maison. Grâce à lui, vous devez pouvoir plus facilement parler avec votre enfant de ce qu'il a fait à l'école.

Avant d'emporter le journal, on le relit en petits groupes pour que chacun saisisse bien la continuité avec l'activité du matin et pour permettre une sensibilisation à un aspect de la lecture des « grands ». 

Il arrive, pour des « événements » que les petits bénéficient aussi d'une page à emporter à la maison (exemple : le cinéma). Cela les familiarise avec le document écrit qui prend alors une grande valeur : il se rattache à un événement. Il permet de se considérer pour une fois à l'égal des « grands » de moyenne section.

TRES IMPORTANT 

Dans le cadre du travail entrepris avec les moyens pour la préparation à l'enseignement de la lecture, nous avons modifié la présentation du journal afin qu'il mette mieux en évidence chaque paragraphe et la correspondance entre le texte et l'illustration. 

Par ailleurs, nous vous proposons à tour de rôle, d'emporter à la maison l'affiche du jour qui correspond au texte du journal et de l'afficher dans la chambre de votre enfant. 

Vous pourrez vous inscrire sur un tableau à l'entrée de l'école.

Pour plus de renseignements, nous consulter. Merci.

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